
Directoire, Consulat, Empire – et Napoléon, fil directeur des trois régimes qui se succèdent.
Chansons anonymes ou Noms connus, on retrouve les sources d’humour de l’Histoire en citations.
Le Directoire a sans nul doute la palme de l’humour. La France respire et s’amuse – du moins les privilégiés. Mais ce régime mal conçu a trop de défauts pour durer.
« Notre Montagne enfante un Directoire Applaudissons à son dernier succès ! Car sous ce nom inconnu dans l’histoire Cinq rois nouveaux gouvernent les Français […] En adoptant un luxe ridicule Ils font gémir la sainte Égalité ; À leur aspect la Liberté recule Et dans leur cœur plus de Fraternité ! » 1641
Le Directoire (1795), chanson
Poésies révolutionnaires et contre-révolutionnaires (1821), À la Librairie historique éd.
« …En adoptant un luxe ridicule / Ils font gémir la sainte Égalité ; / À leur aspect la Liberté recule / Et dans leur cœur plus de Fraternité ! »
Après la Révolution et avant l’Empire, la France vit une transition. Phénomène récurrent : après le Moyen Âge vint la Renaissance où « le monde rit au monde » (Marot) ; après Louis XIV et une fin de règne sinistre, le temps de l’aimable Régence rimait avec licence ; après les horreurs de la Première Guerre mondiale, les Années folles se déchaîneront.
En 1795, au lendemain de la Terreur, la jouissance est à l’ordre du jour – pour la bonne société. La danse fait fureur : 645 bals à Paris, dont le bal des Zéphirs au cimetière Saint-Sulpice et le bal des Victimes, réservés aux parents d’un guillotiné. C’est le temps des « Muscadins » (jeunes royalistes lyonnais usant de riches parfums au musc). Sur les boulevards parisiens, on voit se pavaner les « Merveilleuses » (élégantes aux perruques de toutes les couleurs) et les « Incroyables » (excentriques à l’extrême). Tout ce petit monde s’étourdit dans des fêtes coûteuses.
Quant au Directoire, régime né de la Constitution du 5 fructidor an III (22 août 1795), il présente deux inventions, une mauvaise et une bonne. Les « cinq rois » qui gouvernent, appelés Directeurs, ne vont cesser de se disputer, ce qui fragilise ou paralyse le pouvoir exécutif. À l’inverse, le bicamérisme cher à Montesquieu, pouvoir législatif confié à deux Chambres sur le modèle anglais, instaure une formule toujours reprise : la Chambre basse (élue au suffrage direct, par le peuple) est tempérée par la Chambre haute (élue au suffrage indirect, représentant les régions et les départements). En 1795, on a le Conseil des Cinq-Cents et le Conseil des Anciens – sous la Cinquième République, la Chambre des députés et le Sénat.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« La goinfrerie est la base fondamentale de la société actuelle. » 1642
Louis-Sébastien MERCIER, Nouveau Paris (1799-1800)
Auteur dramatique connu avant 1789, il juge la bonne société. Selon un policier, « le débordement des mœurs dépasse toute idée. » Réaction normale, après les années d’austérité et de terreur, mais ce beau monde est frelaté et le reste du pays souffre.
« Je jure sur ma parole d’honneur que cela n’est pas vrai !
— Ne lève pas la main, il en dégoutterait du sang. » 1650Paul BARRAS, répondant à Lazare Carnot, première séance du Directoire, début novembre 1795
Le Grand Carnot, « Organisateur de la victoire » , siégea au Comité de salut public, responsable de la Terreur. Barras, le plus célèbre des cinq Directeurs, a un passé plus chargé. Débauché, sans scrupule, « le roi des pourris » , selon Bonaparte.
« Les Français, las de se gouverner, se massacrèrent ; las de se massacrer au dedans, ils subirent le joug de Bonaparte qui les fit massacrer au dehors. » 1645
RIVAROL, Fragments et pensées politiques (s.d.)
Raccourci saisissant d’une histoire française particulièrement mouvementée, entre la Révolution et l’Empire à venir. Et pourtant, la génération suivante, celle des jeunes romantiques, en gardera la nostalgie.

