Boulanger met la République en danger, le temps d’une crise qui pouvait mener au coup d’État.
Général en marche pour la présidence et populaire du jour au lendemain, le personnage n’est pas fait pour ce rôle trop grand pour lui et le boulangisme fait long feu. L’opérette nationale se termine en fait divers pitoyable.
« La popularité du général Boulanger est venue trop tôt à quelqu’un qui aimait trop le bruit. »2481
Le Boulangisme (1946), Adrien Dansette.
Boulanger est imposé au gouvernement le 7 janvier 1886 par les radicaux, Clemenceau en tête, avec qui les républicains opportunistes doivent compter pour avoir la majorité. Il s’apercevra un peu tard que l’homme est bien léger, pour ne pas dire totalement irresponsable.
Nouveau ministre de la Guerre, il devient vite le « brav’général Boulanger » pour l’armée, sachant se rendre populaire par des réformes qui améliorent l’ordinaire du conscrit. Sa popularité gagne dans les rangs des innombrables mécontents du régime. 14 juillet 1886, première apothéose de son irrésistible ascension, avec un hymne bon enfant, chanté à sa gloire par Paulus, vedette de music-hall : « Gais et contents / Nous marchions triomphants / En allant à Longchamp / Le cœur à l’aise, / Sans hésiter, / Car nous allions fêter, / Voir et complimenter / L’armée française. »
« Hymne boulangiste », triomphe cocardier pour le « Brave général » acclamé à Longchamp, barbe blonde et fière allure, rendant encore plus terne et vieillot le cortège du président de la République octogénaire, Jules Grévy, usé politiquement par un dernier scandale. Paul Déroulède, chef de la Ligue des Patriotes, voit en lui « le seul ministre qui fasse peur à l’Allemagne » et le baptise « général Revanche ». La droite va exploiter Boulanger qui se prétend pourtant général d’« extrême gauche ». Facile et payant, au début.
Le boulangisme sera la réunion de tous les contraires et le lieu de bien des paradoxes. Cela porte un nom : le populisme.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Puisqu’il y a une bêtise à faire, la Ville Lumière la fera ! »2495
Jules SIMON, Souviens-toi du Deux-décembre (1889)
Républicain hostile au boulangisme, il prévoit le pire. Exclu du ministère, élu député, Boulanger triomphe à Paris lors d’une nouvelle partielle, 27 janvier 1889. La foule et certains amis le poussent au coup d’État. « Pourquoi voulez-vous que j’aille conquérir illégalement le pouvoir quand je suis sûr d’y être porté dans six mois par l’unanimité de la France ? »
« Il est mort comme il a vécu : en sous-lieutenant. »2499
Georges CLEMENCEAU, épitaphe cinglante, en apprenant le suicide du général Boulanger sur la tombe de sa maîtresse à Ixelles (Belgique), le 30 septembre 1891
Accusé de complot contre l’État, le Brave Général s’est enfui le 1er avril 1889 avec sa maîtresse (de mèche avec la police). Elle meurt de phtisie, 16 juillet 1891. Sur sa tombe, il fait graver : « Marguerite… à bientôt ». Il revient se tirer une balle dans la tête, pour être enterré dans la même tombe où l’on gravera : « Ai-je bien pu vivre deux mois et demi sans toi ? »
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