Mirabeau est une mine de citations ! Et ses formules sont toujours en situation, au début de cette Révolution galopante qu’il lance, qu’il relance à la tribune de l’Assemblée, mais qu’il ne pourra plus retenir et qui va tout emporter, alors qu’il tente de sauver la monarchie ! C’est l’homme de tous les paradoxes.
« Le silence des peuples est la leçon des rois. »1334
(1749-1791), Constituante, Versailles, 15 juillet 1789
Œuvres de Mirabeau (posthume, 1827).
Louis XVI est attendu et Mirabeau demande à l’assemblée qui prépare une protestation au roi de s’abstenir de toute marque d’improbation ! Notons qu’il reprend ici le mot prononcé à l’oraison funèbre de Louis XV par l’abbé de Beauvais. Son petit-fils, Louis XVI, était présent à la cérémonie, en la basilique de Saint-Denis, il y a quinze ans… C’est dire si l’affront est subtil et bien placé !
Tel est encore le prestige du roi qu’il va retourner la situation, annonçant qu’il a donné ordre aux troupes de s’éloigner de Paris et de Versailles. Il se fait acclamer par ces députés majoritairement modérés : monarchistes (conservateurs) ou monarchiens (partisans d’une monarchie constitutionnelle). Mirabeau fait partie de ces modérés : là encore, le « jeu révolutionnaire » est subtil et serré, sur la scène de l’Histoire. Tout s’emballera plus tard, sous la Terreur. Mais déjà, la situation se tend à l’extrême et Mirabeau joue en grand auteur-acteur.
« Gardez-vous de demander du temps ; le malheur n’en accorde jamais. »1348
MIRABEAU (1749-1791), Discours à la Constituante, 26 septembre 1789
L’Orateur du peuple improvise dans le génie : « Aujourd’hui la banqueroute, la hideuse banqueroute est là ; elle menace de consumer vous, vos propriétés, votre honneur, et vous délibérez ! » Mirabeau se fait ici l’avocat du projet Necker (ministre très populaire, rappelé aux Finances le 16 juillet) prévoyant une contribution volontaire du quart des revenus. Ce n’est pas rien… mais ce n’est qu’un début.
« Choisissez parmi les plus riches, afin de sacrifier moins de citoyens ; mais choisissez ; car ne faut-il pas qu’un petit nombre périsse pour sauver la masse du peuple ? Allons, ces deux mille notables possèdent de quoi combler le déficit. »1349
MIRABEAU (1749-1791), Discours à la Constituante, 26 septembre 1789
Crise financière et déficit du budget public sont les causes les plus directes de la Révolution. Et Mirabeau tente de sauver la monarchie, tout en dénonçant les raisons du mal dont souffre le régime : « Deux siècles de déprédations et de brigandage ont creusé le gouffre où le royaume est près de s’engloutir. Il faut le combler, ce gouffre effroyable ! Eh bien, voici la liste des propriétaires français, choisissez… »
« Lorsque le roi brise son sceptre, ses serviteurs doivent briser leur épée ! »1361
MIRABEAU (1749-1791), 4 février 1790 à l’Assemblée
Cette fois, le comte est furieux contre le roi : Louis XVI vient d’accepter que les députés prêtent serment de fidélité à la nation, à la loi et – seulement après – au roi. Joignant le geste à la parole, Mirabeau quitte la séance de la Constituante. Tout est lourd de symboles, dans cette histoire.
« Madame, la monarchie est sauvée. »1368
MIRABEAU (1749-1791), à la reine, Château de Saint-Cloud, 3 juillet 1790
Introduit à la cour, il a enfin réussi à persuader Marie-Antoinette par son éloquence. Il a choisi de dialoguer avec elle plutôt qu’avec Louis XVI, dont il ne sait que trop la faiblesse - « Le roi n’a qu’un homme, c’est sa femme ! »
Une question se pose, sans réponse des historiens : Mirabeau croit-il vraiment que la monarchie peut être sauvée ? Cet homme si bien informé de tout s’illusionne-t-il encore sur les chances d’un régime condamné, mais qui peut du moins le sauver de ses créanciers, car il fait payer très cher ses services secrets ?
« Mon ami, j’emporte avec moi les derniers lambeaux de la monarchie. »1384
MIRABEAU (1749-1791), à Talleyrand, fin mars 1791
Son « mot de la fin politique ».
Talleyrand est venu voir le malade, juste avant sa mort (2 avril 1791). Certains députés, connaissant son double jeu et son double langage entre le roi et l’Assemblée, l’accusent de trahison – le fait ne sera prouvé qu’en novembre 1792, quand l’armoire de fer où le roi cache ses papiers compromettants révélera ses secrets.
Mirabeau, l’Orateur du peuple, la Torche de la Provence, fut le premier personnage marquant de la Révolution. Le peuple prend le deuil de son grand homme, qui a droit aux funérailles nationales et au Panthéon.
« Voyez ce Mirabeau qui a tant marqué dans la Révolution : au fond, c’était le roi de la halle. »1293
Joseph de MAISTRE (1753-1821), Considérations sur la France (1797)
Mirabeau, rejeté de son ordre (la noblesse), élu député par le tiers état aux États généraux, mêle plus que quiconque les attributs de la naissance et de la bohème. Selon François Furet : « Du rejeton le plus méprisé de l’ancienne noblesse, la Révolution a fait le personnage le plus brillant de l’Assemblée constituante. »
Excellent orateur, Mirabeau est une mine de bons mots et de citations. Retrouvez ses meilleures citations dans le tome 5 des Chroniques de citations historiques (Feuilletez les 20 premières pages de notre livre électronique).
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