Siècle des Lumières, siècle de Voltaire. Il y a un certain retour à la nature, mais la référence aux animaux annonce la Révolution et oublie soudain l’humour, même chez Voltaire ! Notre petit bestiaire emprunté à la grande Histoire en citations reflète cette évolution.
« Je suis flexible comme une anguille et vif comme un lézard et travaillant toujours comme un écureuil. »1014
(1694-1778), Lettre à d’Argental, 22 octobre 1759, Correspondance (posthume)
Dictionnaire de français Littré, au mot « travaillant ».
Autoportrait zoologique du sexagénaire, bien que de santé précaire et sachant se ménager, en se refusant tout excès. De son adolescence libertine et frondeuse à sa « retraite frénétique », Voltaire déborde d’une activité voyageuse, européenne, batailleuse, mondaine, courtisane, épistolière, théâtrale, politique, économique, scientifique, sociale, agronomique, encyclopédique, et naturellement philosophique.
« Voltaire alors régnait, ce singe de génie
Chez l’homme en mission par le diable envoyé. »1017Victor HUGO (1802-1885), Les Rayons et les ombres (1840)
L’hommage nuancé s’explique : si différents que soient les deux personnages, si opposée par leur nature même, Victor Hugo et Voltaire furent l’un et l’autre à l’image de leur temps, entrés vivants dans la légende après s’être jetés dans toutes les luttes.
« Le monstre est un chien qui aura entendu aboyer quelques chiens et qui aura pris la rage. »1144
VOLTAIRE (1694-1778), Lettre à Mme de Lutzelbourg, 20 janvier 1757, Correspondance (posthume)
Attentat manqué contre Louis XV. Le « chien », c’est Damiens, plus fou que régicide, sans doute épileptique et simple d’esprit, condamné pour « parricide » à la série des supplices jadis infligés à Ravaillac (après la mort d’Henri IV). Damiens a servi comme domestique chez plusieurs magistrats du Parlement de Paris, dont certains très virulents contre le roi. Il se vanta d’avoir voulu donner une leçon au roi, pour que désormais il obtempérât aux remontrances… La Révolution se prépare au siècle des Lumières et Voltaire est tout, sauf révolutionnaire.
« Le peuple ressemble à des bœufs, à qui il faut un aiguillon, un joug, et du foin. »1028
VOLTAIRE (1694-1778), Correspondance, 17 avril 1765
La métaphore est sans équivoque ! Courtisé en tous temps par les démagogues, en attendant d’être divinisé par la Révolution, le peuple est souvent assimilé à la populace et ouvertement méprisé par le mondain Voltaire. De tous les philosophes, il n’est pas le plus aristocratique - comparé à Montesquieu, seigneur de la Brède. Mais c’est assurément le moins « peuple », s’opposant en cela comme en tout à Rousseau.
« La feinte charité du riche n’est en lui qu’un luxe de plus ; il nourrit les pauvres comme des chiens et des chevaux. »986
Jean-Jacques ROUSSEAU (1712-1778), Correspondance, à M. Moulton
Humilié dans ses divers postes de laquais et gouverneur auprès de maîtres orgueilleux, Rousseau parle de ce qu’il sait et que les autres philosophes ignorent – hormis Diderot qui connut la pauvreté, avant de vivre en courtisan. Chiens et chevaux sont naturellement associés, signes extérieurs de richesse et de noblesse, au XVIIIe s.
« J’entends toujours demander si les chiens et les chevaux sont las et jamais les hommes. »1116
LANSMATE (XVIIIe siècle), premier piqueur du roi
Mémoires sur les règnes de Louis XV et Louis XVI et sur la Révolution (1886), comte Jean-Nicolas Dufort de Cheverny, Robert Saint John de Crèvecœur
Lors d’une chasse qui a épuisé bêtes et gens, Lansmate déplore l’insolente santé de Louis XV, jointe à un égoïsme certain. L’enfant chétif et plusieurs fois mourant est devenu un sportif infatigable, avant tout grand et bon chasseur, par tous les temps. Ajoutons que son métier de roi l’ennuie et que sa nature mélancolique (voire neurasthénique) exige toujours plus de divertissements.
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