« Cas sans précédent de suicide en plein bonheur. »3087
François MAURIAC (1885-1970), à propos du référendum d’avril 1969, suivi de la démission présidentielle
De Gaulle, volume III (1986), Jean Lacouture.
Contre vents et marées, avis et prédictions, alors que l’Assemblée lui assurait une fin de septennat sans histoire après l’épreuve de Mai 68, le général a voulu un référendum, annoncé en février 1969 : sur la réforme régionale et la réforme du Sénat.
C’est comme toujours une question de confiance entre lui et le pays. Il met tout son poids politique dans la balance, menaçant de partir en cas d’échec : « De la réponse que fera le pays à ce que je lui demande va dépendre évidemment soit la continuation de mon mandat, soit aussitôt mon départ. » (Entretien télévisé avec Michel Droit, 10 avril 1969).
Tous les partis de gauche font campagne pour le non, mais Giscard d’Estaing aussi. Pompidou appelle au oui, mais sans conviction. Verdict du 27 avril : 48 % de oui et 52 % de non. Le lendemain, le président de la République démissionne.
De Gaulle part en Irlande, pour ne pas être impliqué dans la campagne présidentielle – il votera par procuration. Il retourne ensuite à Colombey, s’enfermant dans sa propriété de la Boisserie pour un dernier face à face avec l’histoire : rédaction quelque peu désenchantée, quoique sereine, de ses Mémoires d’espoir.
« Être, avoir été le premier collaborateur du général de Gaulle est un titre inégalé. »3008
Michel DEBRÉ (1912-1996), Premier ministre, fin de la lettre au général de Gaulle, rendue publique le 15 avril 1962
L’Année politique, économique, sociale et diplomatique en France (1963)
1962, premier septennat du général de Gaulle : voici la démission infiniment digne d’un de ses plus fidèles compagnons de route. À ses côtés pendant la guerre, puis sous la IVe République, Debré participe comme garde des Sceaux à la rédaction de la nouvelle Constitution très présidentielle, créée sur mesure pour le général de retour au pouvoir - appelé pour en finir avec la guerre d’Algérie. Il devient ensuite le premier des Premiers ministres de la Ve.
Mais il fallait tourner la page, après la conclusion du drame algérien : « Comme il était convenu, et cette étape décisive étant franchie, j’ai l’honneur, Mon Général, de vous présenter la démission du gouvernement. » Ce à quoi le général de Gaulle répond : « En me demandant d’accepter votre retrait du poste de Premier ministre et de nommer un gouvernement, vous vous conformez entièrement et de la manière la plus désintéressée à ce dont nous étions depuis longtemps convenus. »
Pompidou entre alors sur la scène de l’histoire : il forme le nouveau gouvernement, le 25 avril. Promotion inattendue : ce n’est pas un parlementaire rompu au jeu politique, juste un « agrégé sachant écrire », parachuté à 33 ans dans le cabinet de Gaulle, en 1944. Il restera six ans chef de gouvernement – durée record, sur ce siècle !
« Je ne dispose pas des moyens que j’estime aujourd’hui nécessaires pour assurer efficacement mes fonctions de Premier ministre et, dans ces conditions, j’ai décidé d’y mettre fin. »3169
Jacques CHIRAC (1932-2019), Déclaration à l’hôtel Matignon, 25 août 1976
Bréviaire de la cohabitation (1986), Maurice Duverger
Chirac parle face à la presse, convoquée après la remise de sa lettre de démission au président Giscard d’Estaing. L’initiative vient du Premier ministre : une première, sous la Ve République, et une inversion des rôles très inhabituelle dans l’histoire des institutions.
Sa lettre de démission est un acte d’accusation contre le laxisme du président, qui ne manquera pas d’accuser à son tour son ex-partenaire d’imprévision face à l’inflation et au chômage.
Chirac avait soutenu Giscard d’Estaing contre Chaban-Delmas, à la présidentielle de 1974. Le divorce est désormais consommé dans le couple Giscard-Chirac. Des raisons extrapolitiques ont mené à ce jeu pervers : « Chacun trompant l’autre et se trompant sur l’autre », écrira Catherine Nay (La Double méprise). Mais l’explication prémonitoire de Jacques Fauvet vaut également : « Un Premier ministre qui est avant tout un homme d’action, mais a peu d’idées personnelles, et un président qui en a trop parfois, mais n’a guère de capacité d’action sur l’administration et sur la majorité » (Le Monde, 8 juin 1976).
Quelle que soit l’époque, chaque démission a ses raisons, à la fois personnelles, politiques, institutionnelles.
À ce rythme - 4 citations par jour - les 10 Chroniques de l’Histoire en citations sont à vous dans trois ans. Encore trois ans et vous aurez aussi le Dictionnaire. Mais que de temps perdu !
Faites un tour dans la Boutique, feuilletez les 20 premières pages de chaque volume et voyez si ça vaut le coût (4 € le volume).
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.
Commentaires (2)
tu sais c est mysterieux le pays des larmes
je n avais pas bien saisi le sens de la demarche propose excusez moi .Toutefois je me permet de vous faire parvenir ces quelques mots magnifique de Saint-Exupery qui pourrait faire eventuellement une bonne question " je ne savais comment l atteindre, je ne savais quoi dire , je me sentais tres maladroit , tu sais c est mysterieux le pays des larmes " Le Petit Prince .amities et bonsoir