Autre défi capital de la Troisième, installer la République dans un pays encore monarchiste… et qui restera prudent, en la personne de ses bourgeois et ses paysans largement majoritaires. Résoudre cette équation demande une diplomatie politique et sur ce coup, Gambetta prend leçon de Thiers, fond et forme.
« La république, c’est l’inévitable et vous devriez l’accepter. Vous devriez prendre votre parti de l’existence dans le pays d’une démocratie invincible à qui restera certainement le dernier mot. »2442
(1838-1882), Chambre des députés, 5 août 1874
Les Partis politiques sous la IIIe République (1913), Léon Jacques.
Le « commis voyageur de la République » propose une constitution républicaine. Légitimistes et conservateurs n’en veulent toujours pas, mais Gambetta va rallier une partie de la gauche à la cause du seul régime possible dans la France de cette époque : une république modérée, qui n’effraie pas le pays (bourgeois et paysans). Un renouveau bonapartiste aux élections partielles et le spectre du jeune prince impérial (fils de Napoléon III) effraient les députés, qui préfèrent encore la République à l’Empire !
C’est dans ce climat politique que va travailler la commission de 30 membres désignés par l’Assemblée pour accoucher enfin d’un projet de Constitution : « Le président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages par le Sénat et par la Chambre des députés réunis en Assemblée nationale. » Sans effet oratoire, sans tambour ni trompette d’aucune sorte, c’est bien discrètement que la République s’installe en France. « Le 30 janvier 1875, à une seule voix de majorité (353 contre 352), l’amendement Wallon, qui prononçait le nom de République, qui l’inscrivait officiellement dans les lois, était adopté » (Jacques Bainville, Histoire de France).
« À reculons, nous entrons dans la République ! »2444
Léon GAMBETTA (1838-1882), La République française. Il ironise dans son journal. Mais il l’a voulue, il l’a eue et son opportunisme permet à la Constitution de passer. Texte plein de compromis et d’incertitudes, cette imprécision fera sa force : on va résoudre les problèmes à mesure qu’ils se posent et d’abord choisir entre régime présidentiel (voulu par Mac-Mahon) ou parlementaire (option de l’Union républicaine).
« Quand la France aura fait entendre sa voix souveraine, il faudra se soumettre ou se démettre. »2453
Léon GAMBETTA (1838-1882), Discours de Lille, 15 août 1877. Il s’adresse au président Mac-Mahon, suite à la crise institutionnelle ouverte le 16 mai - renvoi du président du Conseil, dissolution de la Chambre. Il méprise « ce caporal, le plus insignifiant des reîtres de l’Empire » et Thiers ne l’appelle que « cet imbécile de maréchal ». Le peuple arbitre en votant. Le Parlement l’emporte et Mac-Mahon s’inclinera.
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