Voltaire et Dieu, une relation très particulière, plus duo que duel.
Voltaire est plutôt favorable à Dieu. La seule chose qu’il combat inlassablement, dans ses œuvres et dans son engagement personnel, c’est le mauvais usage qui en est fait par les croyants et l’intolérance religieuse, crime si fréquent contre la liberté de pensée.
« Dieu ? Nous nous saluons, mais nous ne nous parlons pas. »1129
(1694-1778), à un ami s’étonnant de le voir se découvrir devant le Saint-Sacrement à une procession en 1750, Correspondance (posthume)
Ancien élève des jésuites, il se déclare déiste, et non athée. Le philosophe trouve la religion bien utile, notamment pour donner une morale au peuple dont il se méfie. Mais c’est aussi la raison qui l’invite personnellement à croire.
« Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer. »1024
VOLTAIRE (1694-1778), Épîtres
Déiste fervent, il s’oppose aux encyclopédistes athées (Diderot, d’Holbach). Il croit à « l’éternel géomètre », l’« architecte du monde ». Rappelons la citation des Cabales, œuvre pacifique (1772) : « L’univers m’embarrasse et je ne puis songer / Que cette horloge existe et n’ait pas d’horloger. »
Il trouve par ailleurs une grande utilité à Dieu qui fonde la morale : « Je veux que mon procureur, mon tailleur, mes valets croient en Dieu ; et je m’imagine que j’en serai moins volé. »
Cela dit, il s’en prend à la religion qui crée l’intolérance et en France, au catholicisme (religion d’État) qui bénéficie de l’appui du pouvoir civil.
« S’il n’y avait en Angleterre qu’une religion, le despotisme serait à craindre ; s’il y en avait deux, elles se couperaient la gorge ; mais il y en a trente, et elles vivent en paix et heureuses. »1025
VOLTAIRE (1694-1778), Lettres philosophiques, ou Lettres anglaises (1734)
L’auteur admire le régime anglais, qu’il eut tout loisir d’étudier, en trois ans d’exil. Il expose les leçons que la France peut en tirer en maints domaines (religion, économie, politique). « Il en a coûté sans doute pour établir la liberté en Angleterre ; c’est dans des mers de sang qu’on a noyé l’idole du pouvoir despotique ; mais les Anglais ne croient pas avoir acheté trop cher leurs lois […] Le fruit des guerres civiles à Rome a été l’esclavage et celui des troubles d’Angleterre, la liberté. La nation anglaise est la seule de la Terre qui soit parvenue à régler le pouvoir des rois en leur résistant […] Les guerres civiles de France ont été plus longues, plus cruelles, plus fécondes en crimes que celles d’Angleterre ; mais de toutes ces guerres civiles, aucune n’a eu une liberté sage pour objet. »
Ces Lettres philosophiques – « première bombe lancée contre l’Ancien Régime », selon l’historien Gustave Lanson – sont publiées sans autorisation. L’imprimeur est aussitôt embastillé, le livre condamné par le Parlement à être brûlé, comme « propre à inspirer le libertinage le plus dangereux pour la religion et la société civile ». Une lettre de cachet du 3 mai exile l’auteur en Lorraine – la province ne sera française qu’en 1766. Le château de Cirey et Mme du Châtelet accueillent Voltaire, à quelques lieues de la frontière : à la moindre alerte, le philosophe peut fuir. Il y séjourne quinze ans, le temps d’une complicité intellectuelle et amoureuse avec la marquise : l’art de conjuguer l’utile et l’agréable fait le bonheur de Voltaire.
« Je meurs en adorant Dieu, en aimant mes amis, en ne haïssant pas mes ennemis, en détestant la superstition. »1229
VOLTAIRE (1694-1778), profession de foi manuscrite, 18 février 1778. « Mot de la fin » écrit.
Ses derniers mots, écrits de sa plume, sont pour la tolérance, le combat de sa vie. Il meurt le 30 mai 1778. Ses cendres seront transférées au Panthéon sous la Révolution - seul philosophe à avoir cet honneur avec Rousseau, son intime ennemi.
« Écrasons l’infâme. »1020
VOLTAIRE (1694-1778)
Dictionnaire de français Larousse, au mot « infâme »
Rappelons cette formule souvent reprise, notamment dans ses innombrables lettres à d’Alembert et aux autres encyclopédistes. « L’infâme », c’est l’intolérance (religieuse) sous toutes ses formes, la superstition, le fanatisme, ce contre quoi il s’est tant battu.
Flaubert lui rend hommage, dans sa Correspondance : « J’aime le grand Voltaire autant que je déteste le grand Rousseau […] Son « Écrasons l’infâme » me fait l’effet d’un cri de croisade. Toute son intelligence était une machine de guerre. »
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