L’humour à l’italienne rend hommage à l’humour français. Une occasion de rappeler la théâtromanie du siècle des Lumières, entre deux considérations fiscales. À signaler, juste avant la Révolution, la popularité de deux grands ministres des finances, Turgot et Necker.
« C’est le ton de la nation ; si les Français perdent une bataille, une épigramme les console ; si un nouvel impôt les charge, un vaudeville les dédommage. »1149
(1707-1793), Mémoires (1787)
Cet Italien de Paris connaît bien notre pays et notre littérature. Surnommé le Molière italien, Goldoni veut réformer la comédie italienne dans son pays, ôtant les masques aux personnages et supprimant l’improvisation pour écrire ses pièces de bout en bout, d’où son premier chef-d’œuvre, La Locandiera. Son grand rival Carlo Gozzi, comte querelleur et batailleur, défend la tradition de la commedia dell’arte à coups de libelles et de cabales.
Fatigué de cette guerre des deux Carlo, le paisible Goldoni, invité par Louis XV, s’installe définitivement à Paris, en 1762. Il écrit en français pour la Comédie-Italienne (rivale de la Comédie-Française), devient professeur d’italien à la cour. Il sera également pensionné sous Louis XVI. Il rédige ses Mémoires à la fin de sa vie, pauvre, malade, presque aveugle, mais exprimant toujours sa gratitude pour la France – même si la Révolution supprime sa pension à l’octogénaire.
« Point de banqueroute, point d’augmentation d’impôts, point d’emprunt. »1212
TURGOT (1727-1781), Lettre au roi, résumant ses projets de nouveau contrôleur général des Finances, fin août 1774
Toutes ses idées sont bonnes, et Turgot a l’art du raccourci, dans la formule. Il ne manque pas de le rappeler au roi. Mais ses réformes vont lui aliéner les privilégiés. Louis XVI, si faible, si hésitant, peut-il vraiment le soutenir dans son combat ? Et pourtant, l’espoir existe encore…
« Enfin, j’ons vu les Édits / Du roi Louis Seize !
En les lisant à Paris, / J’ons cru mourir d’aise […]
Je n’irons plus au chemin / Comme à la galère
Travailler soir et matin / Sans aucun salaire.
Le Roi, je ne mentons point, / A mis la corvée à bas. »1218Les Édits (1776), chanson des Jacques Bonhomme de France
Turgot, en janvier 1776, demande au Conseil l’abolition de la corvée royale des paysans (les Jacques), remplacée par une taxe additionnelle payable par tous les propriétaires terriens. S’y ajoute une série de mesures fiscales pour plus de justice et d’efficacité. Au total, six édits.
C’est l’amorce d’une véritable équité fiscale : mesure très populaire auprès du petit peuple, le ministère semble bien assuré, mais tous les privilégiés qui se retrouvent frappés fiscalement vont s’opposer aux édits de Turgot.
« Le mur murant Paris rend Paris murmurant. »1240
Alexandrin cité par BEAUMARCHAIS (1732-1799) évoquant l’impopularité du mur en 1785
C’est le mur des Fermiers généraux, enceinte de 24 km qui ménage une soixantaine de passages (ou barrières) flanqués de bureaux d’octroi – impôt indirect, perçu à l’entrée des marchandises.
Calonne, contrôleur général des Finances, a donné satisfaction aux fermiers généraux : pouvant mieux réprimer les fraudes, notamment la contrebande sur le sel au nez des gabelous (commis de la gabelle), ils verseront davantage au Trésor qui en a plus que jamais besoin.
Ce mur se veut imposant comme une fortification, dans un style néoclassique avec références à l’antique. Mais les Parisiens ont l’impression d’étouffer derrière cette petite ceinture à vocation fiscale. D’où l’épigramme : « Pour augmenter son numéraire / Et raccourcir notre horizon, / La Ferme a jugé nécessaire / De mettre Paris en prison. »
Le mur, achevé sous la Révolution, renforcé sous le Consulat et l’Empire, sera démoli en 1860 par le préfet Haussmann, Paris s’agrandissant de 11 à 20 arrondissements.
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