Louis XVI : « C'est détestable ! Cela ne sera jamais joué ! » | L’Histoire en citations
Louis XVI : « C'est détestable ! Cela ne sera jamais joué ! »
Citation du jour

 

L’humour involontaire est souvent le meilleur. Pour l’apprécier à sa juste valeur, le recul du temps est parfois nécessaire, au prix d’un certain anachronisme. Que nous assumons sans complexe !

« C’est détestable ! Cela ne sera jamais joué ! […] Il faudrait détruire la Bastille pour que la représentation de la pièce ne fût pas une inconséquence dangereuse. »1234

LOUIS XVI (1754-1793), qui vient de lire Le Mariage de Figaro avant sa création sur scène

Encyclopædia Universalis, article « Le Mariage de Figaro ».

Louis XVI a fait très fort, sur ce coup (de théâtre) ! Depuis quatre ans, Paris parle de cette pièce dont l’auteur, le bouillant Beaumarchais, est déjà célèbre pour des raisons pas seulement littéraires - divers procès gagnés, aide à l’Amérique dans sa guerre d’Indépendance.

Soumise à six censeurs, interdite de représentation à Versailles au dernier moment en 1783, puis jouée en théâtre privé (chez un particulier, M. de Vaudreuil), le 23 septembre. Tout Paris se presse pour la première publique à la Comédie-Française, le 27 avril 1784. C’est un triomphe qui surprend même l’auteur.

Selon Antoine Vitez, administrateur de la Comédie-Française qui monta la pièce pour le bicentenaire de la Révolution en 1989, « Le Mariage de Figaro est très légitimement considéré comme une pièce révolutionnaire ».

« Le supplice que j’ai inventé est si doux qu’il n’y a vraiment que l’idée de la mort qui puisse le rendre désagréable. Aussi, si l’on ne s’attendait pas à mourir, on croirait n’avoir senti sur le cou qu’une légère et agréable fraîcheur. »1510

Joseph Ignace GUILLOTIN (1738-1814)

Base de données des députés français depuis 1789 [en ligne], Assemblée nationale

Dès octobre 1789 à la Convention, le député Guillotin, médecin et philanthrope, demandait l’abolition des peines infamantes et proposait que la peine capitale soit la décapitation égalitaire pour tous, par le moyen d’un mécanisme simple qu’on met à l’étude. Motion ajournée, reprise par la Législative : « Tout condamné à mort aura la tête tranchée. » Cette loi du 6 octobre 1791 marque un progrès de la justice. Sous l’Ancien Régime, le noble était décapité, le voleur de grand chemin roué de coups en place publique, le régicide et le criminel d’État écartelés, le faux-monnayeur bouilli vif dans un chaudron, l’hérétique brûlé sur un bûcher, le domestique voleur de son maître pendu. La Révolution créée l’unification des peines, une forme d’égalité devant la mort. La guillotine pourra bientôt fonctionner.

Guillotin parlait en poète de la mécanique qu’il a fait adopter. Un décret du 13 juin 1793 installe dans chaque département un « appareil de justice ». Mais la guillotine est déjà très active à Paris, depuis le début de cette année.

« Dix mille hommes sont nu-pieds dans l’armée. Il faut que vous déchaussiez tous les aristocrates de Strasbourg dans le jour et que demain à dix heures du matin, les dix mille paires de souliers soient en marche pour le quartier général. »1559

Proclamation signée Louis Antoine SAINT-JUST (1767-1794) et Philippe François Joseph LEBAS (1764-1794), 15 novembre 1793

Ces deux conventionnels s’expriment ici en tant que « représentants du peuple, envoyés extraordinairement à l’armée du Rhin, à la municipalité de Strasbourg ». Bel exemple de la façon expéditive dont la République règle les problèmes d’intendance aux armées. Mais n’oublions pas le contexte ! La patrie en danger, la France en guerre.

Une Lettre du Comité de salut public (8 octobre) dicte la politique militaire : « Il est temps de frapper des coups décisifs et pour cela, il faut agir en masse. » Or, l’adoption de la tactique de masse va de pair avec la levée en masse. Les soldats de l’an II sont à présent 750 000 – bientôt un million. On imagine la gestion de l’intendance !

« Les têtes tombaient comme des ardoises. »1595

FOUQUIER-TINVILLE (1746-1795), après la loi du 22 prairial an II (10 juin 1794)

Parole d’accusateur public, chargé des grands procès sous la Terreur à Paris. La terrible loi de Prairial énumère tous les ennemis du peuple promis à l’échafaud et justiciables du Tribunal révolutionnaire. Ce n’est plus qu’une parodie de justice : l’instruction est supprimée (article 12), l’accusé privé du secours d’un avocat (article 16), l’audition des témoins n’est plus nécessaire, s’il y a une preuve matérielle ou simplement « morale » (article 13).

Fouquier-Tinville se réjouit très sérieusement et professionnellement du nombre de têtes et ajoute : « Il faut que ça aille mieux encore la décade prochaine, il m’en faut quatre cent cinquante au moins. » Et pour cela, on passe commande aux « moutons », chargés d’espionner les suspects dans les prisons.

C’est la Grande Terreur : plus de 1 300 exécutions à Paris, du 10 juin au 27 juillet (9 thermidor). Les têtes tombent vraiment comme des ardoises. Celle de Fouquier-Tinville ne va pas tarder à les rejoindre.

Notre série sur la Révolution en (sou)riant :

  • Rivarol : « la souveraineté réside dans le peuple ; (…) le peuple ne doit jamais l’exercer. »
  • Rivarol : « Ils sont toujours en retard d’une armée, d’une année et d’une idée. »
  • Martainville : « je suis ici pour être raccourci et non pour être allongé. »
  • Thouret : « Sire… Votre Majesté a fini la Révolution. »
  • Chanson : « Guillotin – Médecin – Politique, Imagine un beau matin… »

Siècle des Lumières

 

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