La théâtromanie du Siècle des Lumières se joue plutôt bien de la censure et le public se régale.
L’esprit de Voltaire a fait merveille dans tous ses écrits - sauf sur scène où il choisit le genre noble, la tragédie. Sur scène, la palme de l’humour revient donc sans conteste à Beaumarchais qui triomphe en deux pièces, Le Barbier de Séville et surtout Le Mariage de Figaro, avant de rater la fin de sa carrière (tristes mélos) et de sa vie.
« Pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs. »1235
(1732-1799), Le Mariage de Figaro ou La Folle Journée (1784)
La censure royale a remplacé la censure religieuse de la Sorbonne au XVIIe siècle : 79 censeurs ont charge d’autoriser ou d’interdire livres ou pièces, selon leur moralité. La censure inquiète plus ou moins tous les philosophes, qui vont se faire éditer en Suisse, Hollande, Angleterre. Abolie par la Révolution, rétablie en 1797, de nouveau abolie, rétablie, etc., ce sera une longue histoire dans l’histoire, jusqu’au début du XXe siècle.
Le théâtre, spectacle public, est exposé plus encore que le livre aux foudres ou aux tracasseries d’Anastasie aux grands ciseaux. Normal que Beaumarchais en traite, pour s’en moquer. En tout cas, l’auteur écrit là son chef-d’œuvre.
Sa vie est un roman, celle d’un aventurier, libertin, parvenu, trafiquant d’armes, très représentatif de cette période de fermentation sociale qui précède la Révolution. Fils d’un horloger, professeur de harpe des filles de Louis XV, puis juge des délits de braconnage sur les terres royales, Pierre Augustin Caron de Beaumarchais est introduit dans le monde de la finance. Un procès l’oppose à un Grand (le comte de La Blache) et lui vaut une notoriété subite, en lui offrant l’occasion de dénoncer publiquement la vénalité d’un de ses juges.
Il doit sa gloire à sa plume théâtrale. Ensuite, il en fait trop, se retrouve à la prison de Saint-Lazare (mars 1785) et sa popularité ne sera plus jamais ce qu’elle fut au soir du Mariage qui prit valeur de symbole. Selon Antoine Vitez, administrateur de la Comédie-Française qui monte l’œuvre pour le bicentenaire de la Révolution en 1989, « Le Mariage de Figaro est très légitimement considéré comme une pièce révolutionnaire ».
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Il y a quelque chose de plus fou que ma pièce, c’est son succès ! »1236
BEAUMARCHAIS, suite au triomphe du Mariage, créé à la Comédie-Française, 1784
Sous-titré La Folle Journée, joué plus de cent fois de suite - un record, à l’époque. Mozart en fait aussitôt un opera buffa de génie : Les Noces de Figaro.
« Le mur murant Paris rend Paris murmurant. »1240
Alexandrin cité par beaumarchais évoquant l’impopularité du mur en 1785, au point d’en faire une des causes de la Révolution
C’est le mur des Fermiers généraux, enceinte de 24 km qui ménage une soixantaine de passages dont Paris garde aujourd’hui quelques traces.
« On taxe tout, hormis l’air que nous respirons. »967
Mme du DEFFAND, femme de salon et d’esprit
La marquise paie proportionnellement moins que le peuple, mais se plaint d’impôts nouveaux frappant nobles et propriétaires. La perception les rend à la fois injustes et inefficaces.
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