Dans la galerie des révolutionnaires, Marat, c’est le méchant. Pas un ami de son vivant. Pas un historien pour en faire un héros. Pas un théoricien pour se dire « maratiste », comme on peut être dantoniste ou robespierriste.
« Les siècles finissent par avoir une poche de fiel. Cette poche crève. C’est Marat. »1301
(1802-1885), Quatre-vingt-treize (1874)
Dans la galerie des révolutionnaires, Marat, c’est le méchant. Pas un ami de son vivant. Pas un historien pour en faire un héros. Pas un théoricien pour se dire « maratiste », comme on peut être dantoniste ou robespierriste.
Marat fut pourtant « L’Ami du peuple » (titre de son journal), jouissant d’une incroyable popularité auprès des sans-culottes qui trouvent en lui un porte-parole : « La classe des infortunés, que la richesse insolente désigne sous le nom de canaille, est la partie la plus saine de la société. » Il jouera le rôle du journaliste redresseur de torts et formateur de l’opinion publique, critiquant toujours tout et tous, ne cessant de réclamer des têtes, inventant le langage même de la Terreur. En cela, il incarne le révolutionnaire type jusqu’à la caricature.
« Au-delà de ce que propose Marat, il ne peut y avoir que délire et extravagance. »1305
Camille DESMOULINS (1760-1794)
Le Vieux cordelier : journal politique (1825), Camille Desmoulins, Joachim Vlate
Parole de Girondin. Même rejet d’un Montagnard, Levasseur de la Sarthe : « Ce fanatique énergumène nous inspirait une sorte de répugnance et de stupeur… Ses vêtements en désordre, sa figure livide, ses yeux hagards avaient je ne sais quoi de rebutant et d’épouvantable qui contristait l’âme… Je le considérai avec cette curiosité inquiète qu’on éprouve en contemplant certains insectes hideux. »
Marat est affligé d’une laideur irrémédiablement repoussante, en raison d’une dermatose chronique – l’obligeant à passer des heures dans son bain, c’est là qu’il sera surpris et assassiné par Charlotte Corday.
« L’aigle marche toujours seul, le dindon fait troupe ! »1303
MARAT (1743-1793) en réponse à Fréron et Desmoulins, 1789
Le Petit Livre de la Révolution française (1989), Jean Vincent
Marat est un solitaire, il ne supporte pas la moindre objection. Quand il crée son journal, l’Ami du peuple (12 septembre 1789), il refuse en ces termes aux deux journalistes révolutionnaires de participer à la rédaction.
Cet éternel aigri n’a pas d’ami. Marat est tout à la fois le grand malade, le grand persécuté, le grand visionnaire de son temps. Il se pose comme « le seul homme à avoir vu clair », éternel prophète de malheur.
« Pour enchaîner les peuples, on commence par les endormir […] C’est des feux de la sédition que naît la liberté. »1270
MARAT (1743-1793), Les Chaînes de l’esclavage (1774)
Ce livre (en anglais) paraît à Londres, où Marat travaille comme médecin. Pages déjà révolutionnaires, au sous-titre étonnamment explicite : « Ouvrage destiné à développer les noirs attentats des princes contre les peuples ; les ressorts secrets, les ruses, les menées, les artifices, les coups d’État qu’ils emploient pour détruire la liberté, et les scènes sanglantes qui accompagnent le despotisme ».
L’auteur attaque la tyrannie sous toutes ses formes et dénonce la corruption de la cour – mais de retour en France, il devient médecin des gardes du comte d’Artois, en 1776. Il fait aussi une théorie du processus révolutionnaire, avec une révolution sans cesse réamorcée et pour tout dire permanente, à la Engels. Le livre sera traduit et publié en France en 1792. Mais Marat, depuis 1789, est passé de la théorie à l’action.
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