Chabot : « Le citoyen Jésus-Christ a été le premier sans-culotte du monde. »

« Le citoyen Jésus-Christ a été le premier sans-culotte du monde. »1536

François CHABOT (1759-1794), Discours, 7 septembre 1793

Dictionnaire de la bêtise et des erreurs de jugement (1998), Guy Bechtel et Jean-Claude Carrière.

Conventionnel, capucin défroqué, coquin porté sur la bonne chère et la chair des jolies filles, et cependant évêque constitutionnel de Blois, auteur d’un Catéchisme des Sans-culottes. Le voilà promoteur du culte de la déesse Raison, très librement inspiré de l’athéisme cher à Diderot (et cousin de l’Être suprême lancé par Robespierre qui a surtout lu Voltaire et Rousseau).

La Révolution, c’est aussi ce genre de personnage, par ailleurs compromis dans des affaires de trafic d’influence et prochaine victime de la guillotine.

La métaphore christique peut-elle raisonnablement (ou romantiquement ?) justifier le début de la Terreur ? En tout cas, elle est plusieurs fois reprise sous la Révolution, dans une France déchristianisée de force.

« J’ai l’âge du sans-culotte Jésus ; c’est-à-dire trente-trois ans, âge fatal aux révolutionnaires ! »1583

Camille DESMOULINS (1760-1794), au Tribunal révolutionnaire lui demandant son nom, son âge, 2 avril 1794

En réalité, il vient d’avoir 34 ans. Mais l’âge du Christ et le rapprochement avec cet « anarchiste qui a réussi » (André Malraux) font référence.

Montagnard à la Convention, Desmoulins a combattu les Girondins, mais leur mise à mort l’a bouleversé. Il fonde alors un journal, Le Vieux Cordelier, pour défendre la politique de Danton contre le Comité de salut public (où Robespierre fait la loi avec Saint-Just). À peine a-t-il le temps de s’émouvoir de la nouvelle épuration – celle des Enragés – qu’il est arrêté le 30 mars, guillotiné le 5 avril. Lucile, sa femme adorée, monte à l’échafaud le 13 avril.

« La Reine a été trompée, elle promet qu’elle ne le sera plus […] elle promet d’être attachée au peuple comme Jésus-Christ à son Église. »1353

LA FAYETTE (1757-1834), à la foule, Versailles, 6 octobre 1789

Au tout début de la Révolution, certains croyaient pouvoir arrêter l’engrenage de la violence, comme Mirabeau et La Fayette. Mirabeau va mourir après avoir joué double jeu et trahi la Révolution. La Fayette, très jeune héros de la Guerre d’Indépendance des Américains et républicain convaincu, est plus fair-play.

Nommé commandant de la garde nationale le 15 juillet, chargé de la sécurité du château de Versailles, il s’adresse à la foule venue de Paris le 5 octobre pour demander du pain. On a forcé les grilles et massacré deux gardes du corps.

Il n’a pu empêcher l’émeute dans la nuit, mais il calme le jeu au matin, apparaissant au balcon avec le roi, la reine (en larmes) et le dauphin dans ses bras : signe de réconciliation symbolique entre Louis XVI et son peuple. Auréolé de son aventure américaine, La Fayette se rêve le Washington d’une démocratie royale et sauve sans doute la vie à la famille du roi, ce 6 octobre.

« La Révolution française est le plus puissant pas du genre humain depuis l’avènement du Christ. »1631

Victor HUGO (1802-1885), Les Misérables (1862)

C’est dire l’importance de l’Événement !

Conscience politique de son siècle, homme de cœur et sensibilité de gauche, Hugo aime d’autant plus la Révolution (et l’Empire) qu’il est déçu par les princes qui gouvernent au XIXe siècle et par les révolutions qui l’agitent.

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