« Qu’était la Grande Armée, sinon une France guerrière d’hommes qui, sans famille, ayant de plus perdu la République, cette patrie morale, promenait cette vie errante en Europe ? »
(1798-1874), Extraits historiques (posthume, 1907)
Telle est la définition humaine et romantique.
Sur le plan institutionnel, la « Grande Armée » est d’abord le nom générique donné par Napoléon à l’armée d’invasion, basée à Boulogne, pour attaquer l’Angleterre en franchissant la Manche – projet abandonné après Trafalgar (1805) et l’anéantissement de la flotte française. La Grande Armée désigne ensuite l’armée napoléonienne, la meilleure du monde : grande par le nombre des soldats, plus d’un million, et cent mille hommes de réserve ; grande aussi par la qualité, l’organisation, les généraux d’exception. Elle est initialement composée de sept corps d’armée, les sept « torrents » commandés par les maréchaux Augereau, Bernadotte, Davout, Lannes, Ney, Soult, et par le général Marmont.
« L’ogre corse sous qui nous sommes,
Cherchant toujours nouveaux exploits,
Mange par an deux cent mille hommes
Et va partout chiant des rois. »Pamphlet anonyme contre Napoléon. Encyclopædia Universalis, article « Premier Empire »
De nombreux pamphlets contribuent à diffuser la légende noire de l’Ogre de Corse, contre la légende dorée de la propagande impériale.
Les rois imposés par l’empereur sont nombreux, pris dans sa famille ou parmi ses généraux : rois de Naples, d’Espagne, de Suède, de Hollande, de Westphalie. Royautés parfois éphémères, souvent mal acceptées des populations libérées ou conquises.
Les historiens estimeront à un million les morts de la Grande Armée, « cette légendaire machine de guerre » commandée par Napoléon en personne.
« Je suis un pauvre conscrit / De l’an mille huit cent dix […]
Ils nous font tirer z’au sort / Pour nous conduire à la mort. »Le Départ du conscrit, vers 1810, chanson anonyme à plusieurs versions
La guerre d’Espagne, désastreuse pour la Grande Armée, va devenir très coûteuse au pays. Les coalitions qui se succèdent font 200 000 morts par an. Il faut recruter : les conscrits partent sans enthousiasme, le nombre des réfractaires augmente, avec la complicité de la population paysanne.
« L’armée, c’est la nation », dans la doctrine impériale. Mais à partir de 1811, il faut intégrer des contingents étrangers, et recourir massivement à la conscription (ou service militaire) : la Révolution française avait commencé, avec la levée en masse des soldats de l’an II.
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