4. Napoléon et son fils, l’Aiglon.
Passionnément père, il pense à sa descendance impériale. Un échec sur toute la ligne. Napoléon le reconnaît : « Mon mariage m’a perdu, l’Autriche était devenue ma famille, j’ai posé le pied sur un abîme recouvert de fleurs. » On ne peut pas gagner sur tous les coups. La revanche viendra post mortem, avec la légende.
« Je me donne des ancêtres. »1844
(1769-1821), château de Compiègne, 27 mars 1810
Metternich (1965), Henry Vallotton.
« Ivre d’impatience, ivre de félicité », il apprend la valse (viennoise) et attend sa future femme, Marie-Louise : archiduchesse d’Autriche, descendante de l’empereur Charles Quint et petite-nièce de Marie-Antoinette. Napoléon, de petite noblesse corse (d’origine génoise), évoque volontiers « ma malheureuse tante Marie-Antoinette » et « mon pauvre oncle Louis XVI ». Cette union flatte son orgueil.
Il s’est décidé en février, dans une hâte qui a fort embarrassé l’ambassadeur d’Autriche à Paris : pas le temps de prévenir l’empereur d’Autriche avant que Napoléon annonce sa décision aux Français ! Mais l’on ne peut rien refuser à Napoléon.
« Je l’envie. La gloire l’attend, alors que j’ai dû courir après elle… Pour saisir le monde, il n’aura qu’à tendre les bras. »1855
NAPOLÉON Ier (1769-1821), à Duroc, 20 mars 1811
L’Aiglon, Napoléon II (1959), André Castelot
Un père bouleversé devant le berceau de son fils, d’autant que cette naissance comble l’empereur. La dynastie semble installée à jamais. Il avoue son émotion au maréchal Duroc, l’un de ses plus anciens compagnons de route et de gloire, connu au siège de Toulon en 1793.
Le peuple chante cet événement impérial : « Bel enfant qui ne fait que naître, / Et pour qui nous formons des vœux, / En croissant, tu deviendras maître/ Et régneras sur nos neveux. / Dame, dame, réfléchis bien, / Dame, dame, souviens-toi bien / Qu’alors il ne faudra pas faire / Tout comme a fait, tout comme a fait ton père. » Cette Chanson pour le roi de Rome, parmi toutes celles écrites en l’honneur de l’illustre nouveau-né, résonne comme un avertissement au père. Comme bien souvent, la chanson donne le pouls d’une opinion publique – c’est rare et précieux, sous l’Empire où la rigueur de la censure étouffa bien des pensées !
« Ma vie politique est terminée. Je proclame mon fils, sous le nom de Napoléon II, empereur des Français. »1951
NAPOLÉON Ier (1769-1821), 22 juin 1815
Seconde abdication, en faveur de son fils. Napoléon II est reconnu empereur le 23 juin par les Chambres. Non sans tumulte ! Et avec un argument juridique étonnant : dans le cas contraire, l’abdication serait nulle et Napoléon pourrait repartir en guerre avec 50 000 hommes… Notons que Louis-Napoléon Bonaparte, sous le Second Empire, deviendra Napoléon III, pour respecter la mémoire de l’Aiglon.
Les Alliés veulent surtout se débarrasser de lui, définitivement. Le vaincu se rend aux Anglais, et c’est la déportation dans l’île de Sainte-Hélène, à 1 900 km, en plein océan Atlantique.
« Je préférerais qu’on égorgeât mon fils ou qu’il fût noyé dans la Seine plutôt que de le voir jamais élevé à Vienne comme prince autrichien. »1960
NAPOLÉON Ier (1769-1821)
Les Errants de la gloire (1933), princesse Lucien Murat (comtesse Marie de Rohan-Chabot)
Il ignore encore, en cette fin d’année 1815, que l’Aiglon sera précisément élevé à Vienne par son grand-père maternel, comme un prince autrichien, sous le nom de duc de Reichstadt – c’est l’« assassinat moral » tant redouté par le père pour son fils par ailleurs si fragile, physiquement et moralement.
« Quand j’étais tout-puissant, [les rois] briguèrent ma protection et l’honneur de mon alliance, ils léchèrent la poussière dessous mes pieds ; maintenant, dans mon vieil âge, ils m’oppriment et m’enlèvent ma femme et mon fils. »1962
NAPOLÉON Ier (1769-1821)
Mémorial de Sainte-Hélène (1823), Las Cases
« L’Angleterre prit l’aigle et l’Autriche l’aiglon. » Victor Hugo, Les Chants du crépuscule (1835). Les destins tragiques inspirent les poètes et entre tous, les grands romantiques du XIXe siècle. « Il avait le monde sous ses pieds et il n’en a tiré qu’une prison pour lui, un exil pour sa famille, la perte de toutes ses conquêtes et d’une portion du vieux sol français », écrira de son côté Chateaubriand, dans ses Mémoires d’outre-tombe (posthume).
Napoléon entre vivant dans l’histoire et la légende. Il s’en charge le premier, confiant ses souvenirs et ses pensées à Emmanuel de Las Cases, auteur du Mémorial, maintes fois réédité vu son succès, chaque édition revue et augmentée.
Notre portrait de Napoléon en citations :
- Napoléon face au destin : « Les hommes de génie sont des météores… »
- Napoléon et ses soldats : « Vous n’avez ni souliers, ni habits, ni chemises… »
- Napoléon et les femmes : « …nous avons tout gâté en traitant les femmes trop bien »
- Napoléon et la religion : « Si je gouvernais le peuple juif, je rétablirais le temple de Salomon. »
- Napoléon cet inconnu : « Quand j’ai besoin de quelqu’un… »
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