1851. Louis-Napoléon Bonaparte va forcer le destin avec son coup d’État du 2 décembre. Opération bien préparée, constitution violée, républicains battus, réduits au silence ou à l’exil.
« Une opération de police un peu rude. »2216
(1811-1865), ministre de l’Intérieur (et demi-frère de Louis-Napoléon) qualifiant le coup d’État du 2 décembre 1851.
Mot attribué plus tard, selon certaines sources à l’écrivain Eugène-Melchior de VOGÜÉ (1848-1910)Les Grands Procès de l’histoire (1924), Me Henri-Robert.
Cela s’appelle un doux euphémisme. Mot attribué plus tard, selon certaines sources, à l’écrivain Eugène-Melchior de Vogüé (1848-1910).
Louis-Napoléon Bonaparte, du fait de la Constitution, ne peut pas légalement être réélu président de la République, et n’aime d’ailleurs pas la République. Il se résout donc à faire un coup d’État - comme son illustre ancêtre en son temps.
Dans la nuit du 1er au 2, il y a bal à l’Élysée. La troupe envahit le palais Bourbon, un « Appel au peuple et aux soldats » s’affiche sur les murs, avec deux décrets : état de siège, dissolution de l’Assemblée et rétablissement du suffrage universel (restreint en mai 1850) ; appel des Français à un plébiscite pour reconnaître l’autorité de Louis-Napoléon Bonaparte.
Le 2, arrestation de députés, dispersion de manifestants, tandis qu’un Comité de résistance, animé par Hugo, Schœlcher et Jules Favre, tente de soulever le peuple de Paris.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Le propre de la démocratie est de s’incarner dans un homme. »2215
Louis-Napoléon BONAPARTE, à la veille du coup d’État. Le Second Empire : innovation et réaction (1973), Alice Gérard
Le jour est bien choisi : l’anniversaire d’Austerlitz, victoire majeure de Napoléon. Louis-Napoléon Bonaparte a voulu personnellement et ardemment ce coup d’État, mais il en ressentira une réelle culpabilité : c’est sa « tunique de Nessus », dira l’impératrice Eugénie. C’est quand même bien joué !
« Vous allez voir comment on meurt pour 25 francs. »2217
Alphonse BAUDIN, député, appelant le peuple à la lutte, sur une barricade de la rue Sainte-Marguerite, 3 décembre 1851
(Indemnité parlementaire de 25 francs, salaire ouvrier, moins de 5 francs par jour) Homme de gauche, « médecin des pauvres », il veut mobiliser la foule, mais les Parisiens se rappellent les journées sanglantes de juin 1848. « Nous ne voulons pas nous faire tuer pour vous garder vos 25 francs par jour ! » D’où la réplique. Un coup de feu part, la troupe riposte, Baudin tombe, mortellement blessé.
« Nous n’avons pas su garder le gouvernement libre, sachons supporter le pouvoir nécessaire ; il a aujourd’hui une mission de flagellation, d’expiation et de répression de l’anarchie que nul autre que lui ne saurait accomplir. »
François GUIZOT (1787-1874), au lendemain du coup d’État du 2 décembre 1851. Histoire de la France : les temps nouveaux, de 1852 à nos jours (1971), Georges Duby
Guizot parle en témoin et historien de son temps, ne jouant plus aucun rôle politique à cette époque. Morny a constitué un nouveau ministère avec les hommes du Président, dès le 4 décembre.
La répression des rébellions républicaines va engendrer une Terreur blanche : pas de vrai soulèvement populaire à Paris, mais la province, les paysans surtout, opposent une résistance violente, dans le Sud- Est et le nord du Massif central. D’où 32 départements mis en état de siège, 27 000 arrestations, 10 000 condamnations (la plupart « transportés » en Algérie, 239 envoyés aux travaux forcés à Cayenne). Le mouvement républicain est décapité pour longtemps. La propagande gouvernementale, confondant l’effet et la cause, fait croire qu’on a sauvé le pays de la subversion socialiste.
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.