Premier président de la Troisième République, élu par l’Assemblée en 1871, Thiers s’est beaucoup battu pour instaurer ce régime qui va devenir celui du pays (sauf sous le gouvernement de Vichy, en 1940-1944).
Longue carrière et brève victoire, pour cet homme politique « mal aimé » de l’Histoire et malmené par les événements, mais politicien de grand talent et républicain convaincu.
« Chef, c’est un qualificatif de cuisinier ! »2418
Histoire de la France et des Français (1972), André Castelot, Alain Decaux.
Le petit homme, qu’on surnommait Foutriquet pour sa houppe de cheveux et son mètre cinquante-cinq, troque son titre de « chef du pouvoir exécutif » pour celui, plus prestigieux, de président de la République, le 31 août 1871 (loi Rivet). L’Assemblée se proclame Constituante et la République entre par la petite porte dans les textes : c’est la loi Rivet (député de centre gauche, ami de Thiers).
La tâche institutionnelle avait été remise à plus tard, en février : 1871, année terrible, la guerre contre la Prusse si mal finie et la guerre civile débouchant sur la Commune de Paris aux suites sanglantes. Profitant de son prestige national, le « libérateur du territoire » s’impose enfin, aussi conservateur que républicain, soutenu par Gambetta, républicain d’extrême gauche à la tête de l’Union républicaine. Pour Thiers, c’est le couronnement d’une longue carrière.
Entré en politique à la fin de la Restauration, il est dans le camp des révolutionnaires qui renversent Charles X en juillet 1830, lors des « Trois Glorieuses ». Il sera plusieurs fois ministre, sous la Monarchie de Juillet. Dans l’opposition républicaine sous le Second Empire, il se fait remarquer pour sa défense des libertés, puis son hostilité à la guerre franco-allemande. Son nom reste surtout attaché à la répression de la Commune. 1871, année de tous les pouvoirs pour cet homme de 74 ans, élu député par vingt-six départements à la fois et devenu « chef du pouvoir exécutif de la République », le 17 février. Lourde tâche, « mission impossible » dans une France vaincue et déchirée.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Gouverner, c’est prévoir. »2331
THIERS, maxime attribuée aussi au journaliste Émile de Girardin
Il l’a dit ou pensé combien de fois, en quarante ans de carrière ? Sa plus lourde responsabilité fut la répression de l’imprévisible révolution, la Commune de Paris. La France lui en est alors reconnaissante, mais l’Histoire l’en rend coupable.
« La République existe, elle est le gouvernement légal du pays, vouloir autre chose serait une nouvelle révolution et la plus redoutable de toutes. »2422
THIERS, Discours de rentrée parlementaire, 13 novembre 1872
Le président défend « sa » République qui n’est encore que provisoire. Il assure que c’est « le régime qui nous divise le moins » et met en garde les monarchistes, majoritaires à l’Assemblée et dans le pays.
« La République sera conservatrice ou elle ne sera pas. »2423
THIERS, Discours de rentrée parlementaire, 13 novembre 1872
Il prêche pour sa paroisse et sa personne : « Tout gouvernement doit être conservateur et nulle société ne pourrait vivre sans un gouvernement qui ne le serait point. » Cette fois, il vise les républicains avancés de l’Assemblée. Tactique classique, un coup à droite, un coup à gauche.
« Il faut tout prendre au sérieux, mais rien au tragique. »2427
THIERS, Discours à la Chambre des députés, 24 mai 1873
Contesté pour son parti pris républicain par les monarchistes majoritaires, il est l’objet d’un blâme. Il démissionne, sûr d’être rappelé. Il ne l’est pas et Mac-Mahon (royaliste) est élu. Thiers perd sa place et son pari, mais reste beau joueur.
« La République, c’est la nécessité. »2455
THIERS, dernier message du vieux républicain (possible successeur de Mac-Mahon à la présidence), mort le 3 septembre 1877
« Je n’aimais pas ce roi des prud’hommes. N’importe ! comparé aux autres, c’est un géant et il avait une vertu rare : le patriotisme. Personne n’a résumé comme lui la France, de là l’immense effet de sa mort. » Flaubert, Correspondance.
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