Mac-Mahon, premier président bien installé dans une Troisième République qui se cherche encore.
Un personnage original, plus attachant que la caricature qui en est faite. L’Histoire en citations se plaît à rendre justice aux mal aimés ou mal connus et l’humour fait partie du jeu.
« Il est assez difficile que Monsieur Mac-Mahon nous dise ce qu’il veut, puisqu’il ne peut même pas nous apprendre ce qu’il est. C’est ce qu’on appelle en photographie un négatif, et en histoire naturelle un mulet. »2440
(1831-1913), La Lanterne, 1874
Plus républicain que jamais, le journaliste, communard déporté à Nouméa (avec Louise Michel, la Vierge rouge) réussit la seule évasion du bagne de Nouvelle-Calédonie. Il rejoint à Londres un groupe de communards exilés. Sa Lanterne reparaît de juillet 1874 à octobre 1876, diffusée clandestinement en France, mariant humour et opposition, et régalant les amateurs.
Avec le recul de l’histoire, il faut pourtant rendre justice à Mac-Mahon. Maréchal illustre et improbable président de la République, populaire par sa prestance et sa franchise, il va assister ou participer à la mise en place d’institutions durables : le domaine réservé du chef de l’État, la cohabitation et ses difficultés, la dissolution et ses risques institutionnels - avec le septennat et la présidence du Conseil des ministres, qui ont durablement fonctionné… Au total, ce président fit autant pour l’établissement de la République que Thiers, Gambetta ou Grévy, ses contemporains et adversaires.
Pour l’heure et dans la fameuse « affaire du drapeau blanc », il sait ce qu’il veut : il n’en veut pas ! Ce symbole est tellement périmé que même l’armée, son armée par nature conservatrice, ne l’acceptera jamais. D’où le malentendu avec le prétendant au trône que Mac-Mahon soutenait jusque-là, en catholique et monarchiste convaincu.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Je croyais avoir affaire à un Connétable de France, je n’ai trouvé qu’un capitaine de gendarmerie. »2438
Comte de CHAMBORD, apprenant le refus de Mac-Mahon qui se récuse, le 12 novembre 1873
Au long de son exil autrichien, les aristocrates de sa cour ont habitué le prétendant à tous les égards ! Mac-Mahon devait introduire le monarque à la Chambre, appuyé à son bras, venant se faire acclamer par la majorité monarchiste. Mais le maréchal dit non à ce « roi » et garde sa présidence.
« Premier magistrat du pays,
L’honneur me met, je vous l’atteste,
Au-dessus de tous les partis.
Aussi, Messieurs, j’y suis, j’y reste. »2439Paul AVENEL, J’y suis, j’y reste (1873), chanson reprenant le mot célèbre du vainqueur de Sébastopol au siège de 1855
Le vieux maréchal a compris que la restauration est impossible avec cet « Henri V » qui serait funeste à la France : « La Chambre à mon honnêteté / A confié la République / Je dois garder sa liberté / Et protéger sa politique. »
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