Gambetta, vedette de cette jeune République, manifeste autant d’humour que de passion à la tribune. Son courage politique et son intelligence de la situation (baptisée opportunisme) auraient fait de lui un grand premier rôle, s’il n’était mort à 44 ans. En attendant, il parle, il agit, il incarne l’Histoire en citations.
« Vous êtes le gouvernement des prêtres et le ministre des curés. »2451
(1838-1882), au ministre de l’Intérieur Fourtou, mi-juin 1877
Discours et plaidoyers politiques de M. Gambetta (1884).
Oscar Bardy de Fourtou, adepte de la manière forte, se retrouve en poste à l’Intérieur, ayant pour mission d’empêcher le retour en force des républicains à l’Assemblée. La coalition monarchiste et conservatrice caresse de nouveau la France à rebrousse-poil, pour reprendre l’expression d’Edmond About sur la politique réactionnaire du duc de Broglie.
Quant à Gambetta, fervent leader de l’Union républicaine à gauche, il anime la Chambre par ses talents d’orateur et scandalise toujours les conservateurs.
Le 18 juin, les 363 députés républicains font adopter un ordre du jour - l’Ordre des 363 - qui refuse la confiance au cabinet de Broglie. Une semaine plus tard, avec l’accord du Sénat, Mac-Mahon dissout la Chambre des députés. Cette épreuve de force est la crise institutionnelle la plus grave depuis la Commune : l’avenir du régime républicain est en jeu. Tout va dépendre des prochaines élections, fixées au 14 octobre. Suspense.
Le 15 août, dans son discours de Lille, Gambetta lance au président la formule devenue historique : « Quand la France aura fait entendre sa voix souveraine, il faudra se soumettre ou se démettre. »
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« L’ordre moral atteint au délire de la stupidité. »2452
Gustave FLAUBERT commentant la campagne électorale de l’été 1877, Correspondance, volume IV
Mac-Mahon prend parti, tel un maréchal à la tête de ses troupes, et lance dans la bataille les fonctionnaires et le clergé ! De leur côté, les républicains font bloc avec deux têtes d’affiche : le toujours jeune Gambetta (40 ans) et le déjà vieux Thiers (80 ans) qui se verrait bien succéder à son successeur, Mac-Mahon.
« La monture a l’air intelligent, ma foi. »2454
Légende humoristique sous un portrait de propagande officielle avec Mac-Mahon à cheval, été 1877
Journal poursuivi pour offense au président de la République - 500 francs d’amende pour cette publication. On ne compte plus les condamnations pour délits de presse et cris séditieux. « Le chef-d’œuvre du cabinet Broglie-Fourtou, c’est d’avoir concentré en cinq mois tout ce que le despotisme impérial avait fait d’arbitraire en dix-huit années » (Edmond About).
« Nous partons trois cent soixante-trois, nous reviendrons quatre cents ! »2458
Léon GAMBETTA s’inspirant de la tirade du Cid, Histoire de la France (1947), André Maurois
Le chef des républicains pèche par optimisme. Partis 363, ils n’auront que 321 élus à la Chambre. La pression de Fourtou a joué. Reste une majorité républicaine, face aux 208 députés monarchistes. De Broglie démissionne, le 23 novembre. Et Mac-Mahon va se soumettre, les larmes aux yeux : sa République présidentielle devient parlementaire.
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