Le patriotisme maurrassien est monarchiste et antirépublicain : envers et contre tout, et d’abord contre le sens de l’Histoire en marche.
À feuilleter pour tout savoir.
« Si vous avez résolu d’être patriote, vous serez obligatoirement royaliste, la raison le veut. »2528
(1868-1952), L’Enquête sur la monarchie (1900)
La date est importante. Venant après l’affaire Dreyfus, annonçant le renouveau du mouvement et la création du journal de l’Action Française (1908-1944) dont il sera le principal animateur, Maurras défend le « nationalisme intégral » et acquiert une considérable influence sur la partie la plus conservatrice de la bourgeoisie française. Maurras et Barrès, bientôt Péguy et Claudel, vont inspirer un renouveau des valeurs nationales et traditionnelles. Les excès du syndicalisme révolutionnaire et d’un socialisme qui tombe souvent dans l’antimilitarisme provocateur auront, par réaction, le même effet. Cercle infernal de la violence qui répond à la violence, au nom d’une idée, d’un idéal, d’une idéologie.
Rappelons qu’au début de la Troisième République, tout le monde est patriote, dans une France vaincue, humiliée par l’Allemagne et amputée des deux provinces sœurs devenues étrangères. Maurras traduit l’unanimité nationale autour du culte de l’Alsace-Lorraine, en parlant de « la Revanche reine de France ». Paul Déroulède, créant la Ligue des patriotes en 1882, incarne un patriotisme nationaliste et revanchard qui fait beaucoup de bruit et déchaîne pas mal de fureurs jusqu’à la prochaine guerre. Mais les milieux gouvernementaux font preuve de réserve, sachant la France trop isolée pour mettre la revanche dans les faits.
Le patriotisme de Maurras qui promeut le nationalisme intégral séduit comme une solution radicale pour résoudre les problèmes de la (Troisième) République, en revenant à la monarchie de l’Ancien Régime. Cette « restauration » pouvait sembler possible et souhaitable aux monarchistes majoritaires à la Chambre jusqu’en 1875, mais les Républicains l’emportent ensuite et le régime parlementaire est définitivement installé en 1880. Fort d’une idée fixe, Maurras continue son combat et mobilise des troupes, conforté par les crises du régime.
« Vive les camelots du roi, ma mère ! / Vive les camelots du roi.
Ce sont des gens qui s’foutent des lois, / Vive les camelots du roi !
Refrain Et vive le roi, à bas la république !
Et vive le roi, la gueuse, on la pendra ! »2552BRIENNE (1886-1926) et de BUXEUIL (1867-1959), Chanson des camelots du roi
Les Camelots du Roi, fédération créée en novembre 1908, recrute parmi les étudiants disciples de Maurras, pour vendre (en camelots) son journal l’Action Française. Ils deviendront commandos royalistes et troupe de choc pour défendre le nationalisme intégral. Le mouvement touche les milieux intellectuels et catholiques parisiens, où libéralisme et socialisme sont en perte de vitesse.
« Oui ou non, l’institution d’une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée n’est-elle pas de salut public ? »2645
Charles MAURRAS (1868-1952), Enquête sur la monarchie, Discours préliminaire (1924)
Première apogée du maurrassisme avant la mise à l’Index de son œuvre par l’Église en 1926. L’Action française tire à 100 000 exemplaires. Les Camelots se battent contre les Rouges, la violence culminera lors du Front populaire (1936), aggravée par l’antisémitisme contre Léon Blum.
« À bas la Marianne, la fille à Bismarck,
La France est à nous, la France de Jeanne d’Arc. »2646Me MAGNIER (fin XIXe-début XXe s.), Quand on pendra la gueuse au réverbère, chanson des Camelots du roi
On chante dans l’entre-deux-guerres, aussi naturellement que l’on se bat. Les manifestations dégénèrent et font des morts.
« L’ennemi numéro un est l’Allemagne. Après Hitler, ou, qui sait ? avant lui, sur un tout autre plan, il y a un autre ennemi. C’est la République démocratique, le régime électif et parlementaire légalement superposé comme un masque grotesque et répugnant à l’être réel du pays français. »2687
Charles MAURRAS (1868-1952), L’Action Française, 11 janvier 1937
Front populaire et montée des périls, Maurras persiste et signe. Seconde apogée du maurrassisme, le polémiste étant élu à l’Académie française en juin 1938.
« Que voulez-vous, Monsieur le préfet, soixante-dix ans de démocratie, ça se paie. »2745
Charles MAURRAS (1868-1952), au préfet de la Vienne, juin 1940
Défaite de la France et amère victoire : Maurras a toujours dit que la démocratie, c’est la mort politique d’un pays ! En vertu de quoi il a soutenu Mussolini, Franco. Mais pas Hitler, ennemi parce qu’envahisseur du sol sacré.
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