Onzième jour de notre série de citations historiques sur le travail. La grève, arme des travailleuses et des travailleurs, est un droit reconnu en 1864. Mais il y a toujours des cas très particuliers, y compris en temps de guerre et par patriotisme.
« Faisons donc la grève, camarades ! la grève des ventres. Plus d’enfants pour le Capitalisme, qui en fait de la chair à travail que l’on exploite, ou de la chair à plaisir que l’on souille ! »2637
(1878-1922), La Voix des femmes, 6 mai 1920
Histoire du féminisme français, volume II (1978), Maïté Albistur, Daniel Amogathe.
Rares sont les féministes de l’époque aussi extrêmes que cette journaliste marxiste, militante antinataliste, en cette « Journée des mères de familles nombreuses ». Le féminisme, revendiquant des droits pour une catégorie injustement traitée, se situe logiquement à gauche dans l’histoire. Mais du fait de la guerre, la condition des femmes a bien changé.
Devenues majoritaires dans le pays, avec un million de veuves de guerre et plusieurs millions de célibataires, elles ont pris l’habitude d’occuper des emplois jadis réservés aux hommes et d’assumer des responsabilités nouvelles. De tels acquis sont irréversibles. Le droit, la médecine, la recherche, le sport leur ouvrent enfin de vrais débouchés. Il faut attendre 1924 pour avoir les mêmes programmes d’enseignement secondaires, d’où l’équivalence des baccalauréats masculin et féminin. Les femmes entreront au gouvernement à la faveur du Front populaire de 1936, dans le ministère Blum. Mais toujours pas de droit de vote, jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« En combattant, la classe ouvrière ne se coupe pas de la nation, au contraire […] La cessation collective du travail, à ce moment-là, devient une action sociale et patriotique. »2805
Appel de la CGT (Confédération générale du travail) aux ouvriers, manifeste du 12 décembre 1943
Dissoute par le gouvernement de Vichy, la CGT se reconstitue dans la clandestinité en 1943. Dans l’Europe occupée, les communistes vont aider l’URSS en difficulté. Discipline et dynamique, langage patriotique, sens révolutionnaire au service d’une cause qui s’impose : les communistes sont de grands résistants et militants, à tout niveau de responsabilité.
« La seule arme qui reste aux travailleurs pour défendre le pain de leurs enfants, quand tous les autres moyens ont été utilisés, c’est la grève. »2872
Georges MARRANE, Conseil de la République, 1er décembre 1947
Ramadier a parlé du PCF comme d’un « chef d’orchestre clandestin » organisant des grèves en mi-juin, les communistes (dont Marrane) ayant quitté le gouvernement. Reprise des grèves en septembre. Manifestations à caractère insurrectionnel en novembre : c’est la « Grande peur d’automne ». Le monde du travail non communiste fait bloc contre les consignes de la CGT : reprise du travail, le 10 décembre.
« Désormais, quand il y a une grève, plus personne ne s’en aperçoit. »3434
Nicolas SARKOZY, au siège de l’UMP, 6 juillet 2008
Le service minimum instauré dans les services publics (enseignement, transports) évite le blocage ou la gêne des usagers trop souvent « pris en otage ». Le quinquennat, placé sous le signe de la crise économique, se verra épargner les grandes grèves des régimes précédents, mais à la moindre manifestation sociale, la petite phrase reviendra comme un boomerang au président. C’est de bonne guerre.
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