4e jour : de Gaulle fut un président « absolu » et contesté, notamment par une partie de la presse d’opinion et par Mitterrand, opposant irréductible à sa personne et à sa politique, mais qui appréciera le temps venu la place tant désirée.
« Qui a jamais cru que le général de Gaulle, étant appelé à la barre, devrait se contenter d’inaugurer les chrysanthèmes ? »3024
(1890-1970), conférence de presse, 9 septembre 1965
De Gaulle ou l’éternel défi : 56 témoignages (1988), Jean Lacouture, Roland Mehl, Jean Labib.
Il réfute l’accusation de « pouvoir personnel » : le président de la République a seulement « pris personnellement les décisions qu’il lui incombait de prendre ».
Sera-t-il candidat à sa propre succession ? Il n’est pas encore entré en campagne, cependant qu’un fait constitutionnel change la vie politique en France : l’élection du président aura lieu pour la première fois au suffrage universel. Et l’inauguration des chrysanthèmes va devenir célèbre. De Gaulle a toujours le sens du mot qui fait mouche, souvent avec humour, mais la forme est toujours au service du fond. C’est le secret des belles citations et des grands hommes de notre Histoire.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Le président de la République est atteint d’une hypertrophie maladive du moi ; ses intuitions politiques, souvent justes à l’origine, apparaissent vite dénaturées par une large surestimation du rôle et des possibilités de la France. »2975
BEUVE-MÉRY (alias SIRIUS), Le Monde, 1er août 1967
Critique récurrente, mais sa forte personnalité sert le prestige de la France à l’étranger. D’où sa réponse : « Il va de soi que notre action est réprouvée par ce qu’il faut bien appeler l’école du renoncement national. Étrange passion de l’abaissement ! »
« Régime oblige : le pouvoir absolu a des raisons que la République ne connaît pas. »3101
MITTERRAND, Le Coup d’État permanent (1964)
Il attaque la pratique de la Cinquième par le pouvoir gaulliste : centralisme excessif, décisions liberticides à l’égard de la presse, juges aux ordres, régime policier, mépris du Parlement, ministres traités en exécutants, Premier ministre totalement soumis. Mais la « raison d’État » s’impose à tous les États.
« Qu’appelez-vous pouvoir ? Un logement dans un palais ? Le grand cordon de la Légion d’honneur ? Le droit de grâce régalien ? La curiosité des foules ? La maîtrise des décrets ? Les hommes qui se courbent ? Les hommes qui se couchent ? La télévision à la botte ? La chasse au lièvre, au tigre, au pauvre ? […] Le doigt sur le bouton de la guerre atomique ? Un Président qui règne, qui gouverne, qui juge, qui légifère, qui commente lui-même les nouvelles qu’il inspire, monarque souverain d’un pouvoir absolu ? J’ai prononcé le mot qu’il fallait taire, l’absolu. »3102
MITTERRAND, Ici et maintenant (1980)
Un an plus tard, à sa troisième présidentielle, enfin élu, il aura ce pouvoir « absolu », lui imprimant une marque personnelle qui l’oppose moins au gaullisme qu’au giscardisme.
« Détenir à la fois les clefs du pouvoir présidentiel et donc du long terme sans pour autant avoir la responsabilité de la gestion gouvernementale directe, tout en ayant un pied dans l’opposition par l’intermédiaire du PS, c’est vraisemblablement pour lui la forme la plus achevée du bonheur politique, celle qui, de toute évidence, convient le mieux à son mode de pensée. »3103
Serge JULY, Sofres, Opinion publique 1986, Revue française de science politique
Le patron de Libé décrit l’équilibre instable de la cohabitation, héritage de la Constitution voulue par de Gaulle. Après les législatives ratées pour la gauche, Mitterrand se tire mieux de l’épreuve que son Premier ministre, Chirac (mars 1986 à mai 1988).
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