Esprit de Mai 68, d’où viens-tu ? Prenons garde à l’anachronisme et la récupération, deux pièges voisins !
On peut cependant trouver des similitudes dans le passé - et augurer de l’avenir. C’est l’une des missions de l’histoire.
Le rapprochement avec la Fronde s’impose en priorité.
Louis XIV est un enfant, sa mère est régente et Mazarin Premier ministre, quand la Fronde éclate (1648-1653).
Mouvement festif et brouillon, improvisé quoique mis en scène, convergence de tous les mécontentements et rôle moteur de Paris, avec des meneurs nourris de littérature baroque et rêvant de mille réformes, journées de barricades, chaos et confusion, remise en cause de l’État, brèves vacances du pouvoir… et au final, retour à la normale - mais avec des conséquences historiques.
Que de points communs avec Mai 68 ! Trois historiens témoignent.
À feuilleter pour tout savoir.
« La Fronde est réputée, non sans cause, pour une des périodes les plus amusantes de l’histoire de France, les plus divertissantes, celle où brille d’un inexprimable comique la vivacité légère et spirituelle du caractère national. »748
(1798-1874), Histoire de France au dix-septième siècle, Richelieu et la Fronde (1858)
Historien préféré des Français, c’est aussi un auteur doué d’un vrai style. Enfant du peuple, il aura toujours le cœur à gauche et vibre avec la Fronde, comme il se passionnera pour la Révolution.
« Ils font comme leurs enfants, ils jouent « à la fronde ». »745
Louis MADELIN (1871-1956), La Fronde
Historien assurément de droite. Le « jeu » sera quand même assez sérieux pour faire fuir hors de Paris le gouvernement et la famille royale, à plusieurs reprises. Cela fait franchement désordre, à l’époque où naît la monarchie absolue.
« Nos guerres civiles, sous Charles VI, avaient été cruelles, celles de la Ligue furent abominables, celle de la Fronde fut ridicule. »747
VOLTAIRE (1694-1778), Lettres philosophiques (1734)
On lui doit la première histoire du Siècle de Louis XIV (1751) qu’il admire. Homme d’ordre et de raison, il critique sans indulgence la Fronde parlementaire, relayée par celle des princes, et les émeutes populaires qui s’ensuivent en province.
« Il est des occasions où le meilleur moyen de servir les princes, c’est de leur désobéir. »773
Pierre BROUSSEL (1575-1654), conseiller au Parlement de Paris, 1648
Oser dire cela, alors que la monarchie (de droit divin) tend à devenir absolue ! Le plus en vue des meneurs est arrêté le 26 août 1648, sur ordre d’Anne d’Autriche, régente. Ce coup d’autorité, signé en fait de Mazarin, déclenche le premier soulèvement populaire.
« Qu’ils chantent, pourvu qu’ils paient. »759
MAZARIN (1602-1661), ministre succédant à Richelieu, son maître en politique
Peu soucieux de son impopularité (due aux impôts, entre autres raisons), le cardinal qui gouverne la France va quand même devoir compter avec cette rébellion qui le vise au premier chef.
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