1849. Battu à la présidentielle et pire que tout ridiculisé, Lamartine est le grand perdant de l’histoire, mais il n’est pas le seul. Cependant que le président se fabrique une stature nationale et déjà impériale.
« Monsieur de Lamartine […] est bien toujours le même, un pied dans chaque camp et sur chaque rive, un vrai colosse de Rhodes, ce qui fait que le vaisseau de l’État lui passe toujours entre les jambes. »2191
(1805-1881), Critique sociale (1885)
Grand homme et surtout grande voix de l’opposition sous la Monarchie de Juillet, héros à la tête du gouvernement provisoire, avec « L’enthousiasme fanatique et double de la République que je fonde et de l’ordre que je sauve ». Il refuse l’adoption du « drapeau rouge qui n’a jamais fait que le tour du Champ de Mars, traîné dans le sang du peuple en 91 et 93 », alors que « le drapeau tricolore a fait le tour du monde avec le nom, la gloire et la liberté de la patrie ! » Seul des onze membres du gouvernement, il sort pour affronter la foule en armes qui cerne l’Hôtel de Ville.
Seul capable d’apaiser les insurgés du jour et de rallier le lendemain les modérés à la République, Lamartine a perdu en quelques mois toute sa popularité pour rester fidèle à ses principes démocratiques, à commencer par le suffrage universel.
Candidat à la présidentielle, perdant ridiculisé par le suffrage (17 914 voix), il va quitter la scène politique et vivre ses vingt dernières années en « galérien de la plume » : pas assez riche pour s’exiler comme Hugo ni pour se draper dans sa dignité d’opposant comme Chateaubriand, condamné à des travaux forcés littéraires pour éponger ses dettes, obligé de vendre sa propriété de Milly, il devra solliciter de l’Empire un secours d’abord refusé. Sa famille refusera les funérailles nationales, en 1869.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Plus ça change, plus c’est la même chose. »2193
Alphonse KARR, titre de deux recueils d’articles, Les Guêpes, janvier 1849
Le journaliste multiplie les pamphlets dans sa revue de satire politique, sans savoir à quel point l’avenir va lui donner raison. « L’histoire, comme une idiote, mécaniquement se répète », écrira Paul Morand (Fermé la nuit). En vertu de quoi la République, bientôt volée aux républicains, débouchera sur l’Empire.
« Je suis leur chef, il fallait bien les suivre. »2198
LEDRU-ROLLIN, au lendemain de l’insurrection du 13 juin 1849. Ledru-Rollin (1859), Eugène de Mirecourt
Mot d’un antihéros conscient de ses limites, quand une manifestation dégénère en émeute. Débordé par ses troupes, déchu de son mandat de député, fuyant en Angleterre, condamné par contumace, il rentre en France sous la Troisième République. Exemple de « non-carrière » politique, son nom reste néanmoins dans la liste des hommes de gauche.
« On craint une folie impériale. Le peuple la verrait tranquillement. »2200
Élise THIERS, née Dosne. Napoléon III (1969), Georges Roux. Novembre 1849
Elle témoigne, ayant vu le « prince Louis-Napoléon » passer en revue les troupes. Très populaire dans l’armée, le président multiplie les grandes revues, augmente la solde des sous-offs, se fait acclamer en province, crée son parti, ses journaux. Craintes justifiées de Mme Thiers, la carrière de son mari marquera un temps d’arrêt, sous le Second Empire.
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