Les anarchistes et l’État : duels à mort. Histoire sans fin. Attentats sans frontière, victimes en nombre croissants. Mais la fin du XIXe siècle reste une référence, ponctuée de « faits divers » célèbres.
« Ni Dieu ni maître. »2408
(1805-1881), titre de son journal créé en 1877
Entré en politique il y a un demi-siècle (sous la Restauration), arrêté en 1871, condamné à mort et amnistié, l’infatigable socialiste reprend son activité révolutionnaire à 72 ans. Son « Ni Dieu ni maître » deviendra la devise des anarchistes qui troubleront la IIIe République pendant un quart de siècle.
Autre devise anarchiste : « Prenez ce qu’il vous faut. » Signé Prince Kropotkine. Officier, explorateur, savant, ce prince russe adhéra au mouvement révolutionnaire né dans son pays. Arrêté, évadé, il fonde en Suisse une société secrète à tendance anarchiste. Expulsé, il vient en France où il aura aussi des ennuis avec la justice. C’est de bonne guerre.
« Un édifice fondé sur des siècles d’histoire ne se détruit pas avec quelques kilos d’explosifs. »2502
Prince KROPOTKINE (1842-1921), Réponse aux militants anarchistes inquiets de la faible portée des actes terroristes
Ce prince russe a une grande influence sur les mouvements anarchistes en Europe. En France, les attentats se multiplient de 1892 à 1894. L’anarchie a diverses causes : souvenir de la Commune qui est commémorée vingt ans après, de bien des manières (y compris des tableaux, des chansons) ; hostilité envers les partis organisés de gauche qui veulent un État socialiste ; haine et mépris pour la bourgeoisie affairiste dont les affaires prospèrent.
« La société est pourrie. Dans les ateliers, les mines et les champs, il y a des êtres humains qui travaillent et souffrent sans pouvoir espérer d’acquérir la millième partie du fruit de leur travail. »2503
RAVACHOL (1859-1892), à son procès, 26 avril 1892
Ravachol est un criminel en série (tuant pour l’argent), devenu un mythe par la vertu de la dynamite et des relations nouées avec les militants anarchistes.
Les 11, 18 et 29 mars, il a fait sauter des appartements de magistrats et une caserne. La veille du procès, ses complices ont fait exploser une bombe dans le restaurant Véry. Condamné à mort (pour des crimes antérieurs), il est exécuté le 11 juillet.
Les attentats anarchistes, nombreux de 1892 à 1894, ont des origines diverses : souvenir de la Commune qui est commémorée vingt ans après, de bien des manières (y compris des tableaux, des chansons) ; hostilité envers les partis organisés de gauche qui veulent un État socialiste ; haine pour les bourgeois dont les affaires prospèrent.
« Il y a les magistrats vendus, / Il y a les financiers ventrus, / Il y a les argousins,
Mais pour tous ces coquins, / Il y a d’la dynamite, / Vive le son, vive le son,
Il y a d’la dynamite ! / Dansons la ravachole ! / Vive le son d’l’explosion. »2504Sébastien FAURE (1858-1942), La Ravachole, version anarchiste de La Carmagnole (1892), chanson
L’auteur a un long parcours militant : ex-séminariste, ex-marxiste, il devient anarchiste à la fin des années 1880, libertaire avec Louise Michel, dreyfusard au moment de l’Affaire, avant de s’afficher pacifiste et antimilitariste, au siècle suivant. L’anarchie va occuper la vie publique un quart de siècle : avec ses chansons, sa presse, ses héros et ses criminels, ses attentats, ses victimes – jusqu’au président de la République en personne.
« Messieurs, la séance continue ! »2509
Charles-Alexandre DUPUY (1851-1923), Chambre des députés, 9 décembre 1893
Enseignant de formation, républicain modéré (opportuniste) et parlementaire pendant trente-huit ans, il est président de la Chambre, le jour où l’anarchiste Vaillant lance une bombe, blessant 57 députés, provoquant la panique. Atteint à la tête, Dupuy est applaudi pour ce mot courageux et poursuit : « Il est de la dignité de la Chambre et de la République que de pareils attentats, d’où qu’ils viennent et dont nous ne connaissons pas la cause, ne troublent pas les législateurs. »
12 et 18 décembre : vote dans l’urgence des deux premières lois visant le mouvement anarchiste. En 1935, Le Crapouillot (journal satirique et politisé) donne la version d’un Vaillant téléguidé par le policier Puyrabaud, pour faire adopter les lois « scélérates » : bombe fabriquée à la préfecture de police, chargée de clous, non de balles, et faisant des blessés légers.
« Désormais, ces messieurs sauront qu’ils ont toujours une épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête, ils voteront peut-être des lois plus justes. »2510
Auguste VAILLANT (1861-1894), Déclaration à la police qui l’interroge, après l’attentat qu’il a perpétré, le 9 décembre 1893
Vaillant, ni penseur ni même militant, est un marginal qui a survécu en multipliant les petits métiers, se lançant dans la lutte politique pour faire entendre « le cri de toute une classe qui revendique ses droits ». L’inexistence d’un vrai programme social demeure l’une des faiblesses de la IIIe République – jusqu’en 1936 et l’avènement du Front populaire. Au procès, il affirme avoir lancé cette bombe pour venger son idole Ravachol, et non pour tuer. Vaillant, 33 ans, est exécuté le 5 février 1894. Cela n’empêche pas, une semaine plus tard, l’explosion d’une autre bombe.
La flambée anarchiste qui frappe la France, inspirée de Proudhon et Bakounine en rupture de socialisme, va parcourir l’Europe, tuer l’impératrice Élisabeth d’Autriche (célèbre Sissi), le roi d’Italie Humbert Ier, et franchir l’Atlantique, pour atteindre le 25e président des États-Unis d’Amérique, William McKinley. Le terrorisme est une force de frappe récurrente et le monde occidental va affronter le terrorisme rouge des années 1970, le terrorisme islamique au début du XXIe siècle.
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