1936. Le Front populaire apparaît comme un entracte social, porteur d’espoirs immenses et de mesures concrètes pour les Français. Mais face à la situation internationale, l’aveuglement prévaut toujours.
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« Nous n’attendrons ni une semaine, ni trois jours, ni même une heure pour le répéter solennellement : nous ne subirons pas la loi de la spéculation internationale. »2670
(1872-1950), annonçant le programme de la gauche unie, en mai 1935
Histoire de la France : les temps nouveaux, de 1852 à nos jours (1971), Georges Duby.
Les trois grands partis de gauche ont conclu une alliance électorale : parti communiste de Maurice Thorez, parti socialiste de Léon Blum et, plus près du centre, parti radical-socialiste d’Édouard Daladier. Dans un an, ils seront au pouvoir.
« Donner du pain aux travailleurs, du travail à la jeunesse, et au monde la grande paix humaine. »2671
André CHAMSON (1900-1983), Jean GUÉHENNO (1890-1978), Jacques Kayser (1900-1963), Serment de la gauche au vélodrome Buffalo à Montrouge, 14 juillet 1935
Deux intellectuels de gauche et un journaliste radical signent ce Serment et participent à ce rassemblement populaire. Face à la « montée des périls » (fascisme et nazisme), la « grande paix humaine » est bien menacée. Le Front populaire fait déjà front, dans un climat politique, social, idéologique et un contexte international de plus en plus difficiles.
« Tout va très bien, Madame la marquise. » « Y’a d’la joie ! »2675
Ray VENTURA (1908-1979) et Charles TRENET (1913-2001), titres et refrains des deux succès de l’année 1936, chansons
Ray Ventura et ses Collégiens et sur un tout autre registre, Charles Trenet, le « fou chantant », tentent de faire oublier aux Français la montée des périls, cependant que la France va vivre quelques mois sous le signe du Front populaire.
« Les banques, je les ferme, les banquiers, je les enferme. »2677
Vincent AURIOL (1884-1966), ministre des Finances, Front Populaire, 1936
Avocat et expert financier de la SFIO, avant de devenir caution bourgeoise sous la prochaine république, Auriol apparaît à nombre de Français comme un parangon de la révolution, au lendemain de la victoire des gauches unies. Par génération spontanée plus que par mouvement organisé, une vague nationale de grèves se propage et terrifie le patronat.
« Il s’agit, après avoir toujours plié, tout subi, tout encaissé en silence, d’oser enfin se redresser. Se tenir debout. Prendre la parole à son tour. Se sentir des hommes pendant quelques jours… Cette grève est en elle-même une joie. »2678
Simone WEIL (1909-1943), La Révolution prolétarienne, 10 juin 1936
Agrégée de philo et ouvrière chez Renault pour être au contact du réel, passionnée de justice, mystique d’inspiration chrétienne, toujours contre la force et du côté des faibles, des vaincus et des opprimés, elle vibre à cette aventure et (jusqu’à sa mort à 34 ans) participe pleinement : « Joie de vivre parmi ces machines muettes, au rythme de la vie humaine. Bien sûr, cette vie si dure recommencera dans quelques jours. Mais on n’y pense pas, on est comme des soldats en permission pendant la guerre. Joie de pénétrer dans l’usine avec l’autorisation souriante d’un ouvrier. Joie de trouver tant de sourires, tant de paroles d’accueil fraternel… »
« Il faut savoir terminer une grève. »2680
Maurice THOREZ (1900-1964), secrétaire général du PCF, Déclaration du 11 juin 1936
Parole de dirigeant responsable, souvent reprise par les chefs syndicalistes. La semaine des accords Matignon débute le 12 juin, entre patronat et CGT. Reconnaissance du droit syndical, institution de contrats collectifs de travail et de délégués du personnel ; semaine de quarante heures, congés payés de deux semaines, augmentation de salaires de 7 à 15 %.
« Il est revenu un espoir, un goût du travail, un goût de la vie. »2681
Léon BLUM (1872-1950), constat du chef du gouvernement, 31 décembre 1936
« … La France a une autre mine et un autre air. Le sang coule plus vite dans un corps rajeuni. Tout fait sentir qu’en France, la condition humaine s’est relevée. » Duby confirme, dans son Histoire de la France : « Le Front populaire, ce n’est pas seulement un catalogue de lois ou une coalition parlementaire. C’est avant tout l’intrusion des masses dans la vie politique et l’éclosion chez elle d’une immense espérance. »
« Il faut s’entendre avec quiconque veut la paix, avec quiconque offre une chance, si minime soit-elle, de sauvegarder la paix. Il faut s’entendre avec l’Italie en dépit de la dictature fasciste. Il faut s’entendre même avec l’Allemagne de Hitler. »2682
Maurice THOREZ (1900-1964), Chambre des députés, 2 septembre 1936
Parole de député communiste, aveuglement d’une gauche pacifiste, attachée aux vieux idéaux, qui préconise le désarmement au niveau imposé par le traité de Versailles à l’Allemagne et qui a fait son unité « contre le fascisme et la guerre » pour arriver au pouvoir, en cette année 1936. Mais le pays est majoritairement pacifiste.
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