Clemenceau et le régime parlementaire de la IIIe République : duo et duels, suite.
Avec un humour assassin, le député dénonce l’insignifiance du personnel politique. Il en joue par ailleurs, étant dans l’opposition. La faiblesse des institutions s’explique aussi par le fonctionnement du régime parlementaire - opposé au présidentiel.
« Il y a deux organes inutiles : la prostate et le président de la République. »2391
(1841-1929)
Histoire des présidents de la République : de Louis Napoléon Bonaparte à Charles de Gaulle (1960), Adrien Dansette.
C’est l’une des raisons de la faiblesse du régime : le Président n’est là que pour « inaugurer les chrysanthèmes ». L’expression est du général de Gaulle, et c’est lui qui va changer le fonctionnement des institutions françaises sous la Ve République, en redonnant le pouvoir exécutif au Président.
« Il s’agit toujours du même. »2472
Georges CLEMENCEAU (1841-1929)
Encyclopædia Universalis, article « Gouvernement »
Parole du célèbre « tombeur de ministères » qui se ressemblent tous, puisque les mêmes hommes reviennent, changeant seulement de portefeuille. Les « républicains de gouvernement », « opportunistes », modérés, sont attaqués sur leur droite par les bonapartistes (en perte de prestige après la mort du prince impérial en 1879) et les monarchistes (avec une clientèle encore importante de ruraux et de catholiques), et sur leur gauche par les radicaux qui, avec Clemenceau et Rochefort, réclament le « maximum de République », mais sont déjà talonnés sur leur propre gauche par les socialistes ! Dans le même temps, conservateurs et radicaux n’hésitent pas à faire alliance pour renverser les ministères : « Ils [les radicaux] ne se distinguent des conservateurs que par l’hypocrisie », écrira Jules Guesde dans Le Citoyen du 24 février 1882.
« Qu’est-ce qui les sépare ? Leurs idées. Ils en ont si peu. »2535
Georges CLEMENCEAU (1841-1929), ironisant à la vue de deux députés fâchés à mort, ce qui ne les empêche pas de trinquer à la buvette du Palais-Bourbon
La République des députés devient « La République des camarades ». Comme l’écrira Robert de Jouvenel dans ce livre daté de 1914 : « Il y a moins de différence entre deux députés dont l’un est révolutionnaire et l’autre ne l’est pas, qu’entre deux révolutionnaires, dont l’un est député et l’autre ne l’est pas. »
Modérée, puis radicale, la IIIe République a créé tout à la fois les règles du jeu parlementaire et le métier de député comme de ministre. Décriée, souvent compromise par les crises, scandales et autres affaires, elle constitue un étrange microcosme de camaraderie et de rivalités, voire de haines.
« Votons pour Carnot, c’est le plus bête, mais il porte un nom républicain ! »2491
Georges CLEMENCEAU (1841-1929), à l’occasion de l’élection présidentielle du 3 décembre 1887
C’est Marie François Sadi Carnot : petit-fils de Lazare Carnot (le Grand Carnot, célèbre révolutionnaire), fils de Lazare Hippolyte Carnot (député, ministre, sénateur), neveu de Sadi Carnot (physicien qui laisse son nom à un théorème), il est lui-même polytechnicien, ingénieur des ponts et chaussées, préfet, puis député républicain modéré et plusieurs fois ministre. « Bête » n’est sans doute pas le qualificatif le plus approprié, mais le Tigre a la dent dure et l’humour féroce. En réalité, Clemenceau qui ne peut pas être élu cherche seulement à faire élire un président inoffensif.
L’argument resservira en 1912 : « Je vote pour Pams parce que c’est le plus bête ! » Poincaré faisait campagne pour succéder à Fallières et Clemenceau, son ennemi politique, choisit de voter pour Pams, ministre de l’Agriculture, homme aimable, très riche et inoffensif, proposé par les groupes de gauche.
Carnot est assassiné le 25 juin 1894, cinq mois avant la fin de sa présidence, par Caserio, un illuminé, jeune anarchiste italien.
« Ce sont les oies qui ont sauvé le Capitole. »2544
Georges CLEMENCEAU (1841-1929)
La Vie orgueilleuse de Clemenceau (1987), Georges Suarez
À qui lui reproche de ne s’entourer que de personnages falots dans son gouvernement. Le tombeur de ministères, le radical intransigeant des années 1880 devient à 65 ans président du Conseil, et reste à ce poste de 1906 à 1909. Clemenceau arrive avec un vrai programme de réformes sociales. Et le chef de gouvernement se révèle un homme d’État décidé. Il ne sera jamais président de la République - il effraie trop de gens, à ce poste ! Il va néanmoins se révéler dans un rôle capital, celui de chef de guerre : ce sera bientôt le Père la Victoire.
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