« Dire que l’homme est un composé de force et de faiblesse, de lumière et d’aveuglement, de petitesse et de grandeur, ce n’est pas lui faire son procès, c’est le définir. »1053
(1713-1784), Addition aux pensées philosophiques (1762)
À 57 ans, le dernier des quatre grands philosophes du XVIIIe s. fait son autoportrait. Sensible à l’excès, extrême dans ses sentiments comme dans ses jugements, sensuel, extraverti, jouant du paradoxe, péchant par excès de mots et défaut de rigueur : « J’enrage d’être empêtré d’une diable de philosophie que mon esprit ne peut s’empêcher d’approuver, ni mon cœur de démentir » (Correspondance). Et plus que tout, personnage tiraillé entre les lumières de la raison et les transports de la passion, à l’image du tournant de ce siècle, entre Lumières et romantisme.
Diderot en souffre moins que Rousseau et bien moins qu’il ne le dit, la contradiction étant le moteur de sa pensée.
« Nous sommes l’univers entier. Vrai ou faux, j’aime ce système qui m’identifie avec tout ce qui m’est cher. »1054
DIDEROT (1713-1784), Lettres, à Falconet. Mémoires, correspondance et ouvrages inédits de Diderot (1831)
Curiosité universelle, culture « encyclopédique » au sens littéral, travailleur infatigable, auteur d’une œuvre foisonnante et désordonnée, amoureux de la nature et adorant la société, l’homme est aussi à l’aise avec les petites gens (né de modeste bourgeoisie, début de vie bohème, marié à une lingère) qu’avec les intellectuels des salons et les Grands. En cela, Diderot est bien l’homme de son siècle.
Il l’est aussi par sa prédisposition au bonheur : « Il n’y a qu’un devoir, c’est d’être heureux… Ma pente naturelle, invincible, inaliénable, est d’être heureux. » Même parti pris de Voltaire et Montesquieu, opposés à Rousseau, éternel persécuté.
« Hâtons-nous de rendre la philosophie populaire. Si nous voulons que les philosophes marchent en avant, approchons le peuple du point où en sont les philosophes. »1066
DIDEROT (1713-1784), Pensées sur l’interprétation de la nature (1753)
Diderot initie un vaste public (sinon déjà le grand public) aux choses de l’art, par ses brillants comptes rendus (Salons). Il est surtout le maître d’œuvre de l’Encyclopédie, signant plus de mille articles sur les sujets les plus divers : philosophie et littérature, morale et religion, politique et économie, arts appliqués. Ce grand agitateur d’idées aura une influence considérable sur ses contemporains, sur le XIXe siècle et jusqu’à nous.
« La plus haute efficacité de l’esprit est d’éveiller l’esprit. »1067
GOETHE (1749-1832) rendant hommage à Diderot
Littérature du XVIIIe siècle (1950), Lagarde et Michard
Ce mot du génie allemand sur le philosophe français s’applique également à « son » Encyclopédie. Simple entreprise de librairie à l’origine, voulant exploiter la vogue croissante des sciences et présenter au public un répertoire du savoir humain, elle devient l’effort gigantesque de toute une « armée ». Le Prospectus l’annonce comme « un tableau général des efforts de l’esprit humain dans tous les genres et dans tous les siècles ».
L’œuvre développe dans le public le goût de la recherche scientifique et l’esprit de libre examen sur des points aussi sensibles que la religion, la morale et la politique. L’Encyclopédie annonce le mouvement d’opinion qui aboutit aux États généraux de 1789, mais la Révolution transforme bientôt le cosmopolitisme en nationalisme conquérant, le pacifisme en militarisme, la tolérance en fanatisme, la liberté en Terreur. Le destin des idées, leur chemin dans l’histoire échappent toujours à leurs auteurs.
Les philosophes des Lumières :
- Montesquieu : « Il n’y a point encore de liberté si… »
- Rousseau : « La nature a fait l’homme heureux et bon, mais… »
- Voltaire : « Les Français ne sont pas faits pour la liberté. »
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