Critiqué des contemporains, mal aimé des historiens, le Second Empire fait pourtant avancer l’Histoire avec l’économie, l’industrie, l’urbanisme, la politique et l’apprentissage démocratique qui va mener à la (Troisième) République.
« Monsieur Tout-le-monde est plus riche que Monsieur de Rothschild. »2236
(1824-1905), maxime du créateur du Crédit Lyonnais en 1863
Les Grandes Étapes de l’histoire économique (2002), Yves Carsalade.
Ça peut passer pour une plaisanterie, mais cette image a un fond de vérité. À côté de la banque suisse protestante et de la banque juive allemande qui, comme les Rothschild, travaillent avec les grosses fortunes, de nouveaux organismes financiers ont appel au grand public.
Le Crédit mobilier des frères Pereire donne l’exemple en 1852 : première grande banque d’affaires moderne, elle servira de leçon jusque dans ses déboires financiers. Citons aussi le Crédit foncier (1852) spécialisé dans les prêts à l’agriculture et à la construction immobilière, le Crédit lyonnais (1863), la Société générale (1864). Les épargnants portent leur argent à ces banques de dépôts et leur achètent des actions et obligations négociables en Bourse. Ce mécanisme financier, sur fond de forte croissance économique, permet au petit capitaliste de s’enrichir.
Époque de capitalisme triomphant, sans contre-pouvoir, sans syndicat et sans mécanismes correcteurs du marché, le Second Empire enrichit les riches et la classe moyenne, mais n’améliore pas la condition des pauvres.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Il démolissait pour construire, / Et pour démolir, construisait.
Est-ce démence ? Je le nie. / On n’est pas fou pour être musulman ;
Tel fut Osman, / Père de l’osmanomanie. »2258Gustave NADAUD, L’Osmanomanie, chanson
Nommé préfet de la Seine le 1er juillet 1853, le baron Haussmann voit grand et beau pour le Paris impérial. Il faut en finir avec le Paris de Balzac aux rues pittoresques, mais sales et mal éclairées, créer une capitale aussi moderne que Londres qui a séduit l’empereur, creuser des égouts, approvisionner en eau les Parisiens, aménager des espaces verts, loger une immigration rurale massive, percer de larges avenues pour faciliter l’action de la police et de l’artillerie contre d’éventuelles barricades. « Ce qu’auraient tenté sans profit / Les rats, les castors, les termites / Le feu, le fer et les jésuites / Il le voulut faire et le fit. / Puis quand son oeuvre fut finie / Il s’endormit comme un bon musulman / Tel fut Osman / Père de l’Osmanomanie. »
On accuse le baron de sacrifier des joyaux anciens, d’avoir un goût immodéré pour la ligne droite et bientôt de jongler avec les opérations de crédit. L’« osmanomanie » va rimer avec mégalomanie.
« Quand Julien fait des boulettes, / C’est un grand pâtissier,
Quand Haussmann double nos dettes, / C’est un bien grand financier !
Refrain. Ce préfet – Est parfait
Il fait bien tout ce qu’il fait. »2299Paul AVENEL, Les Comptes fantastiques d’Haussmann, chanson
Les grands travaux d’« Osman » se révèlent ruineux, l’« osmanomanie » rime plus que jamais avec mégalomanie, les combinaisons de crédit sont douteuses. Le préfet Haussmann sera limogé en 1870, mais le Paris impérial de ses rêves et de ses plans est presque achevé et restera le nôtre, jusque sous la Quatrième République.
« Rugissons contre Monsieur Thiers ! Peut-on voir un plus triomphant imbécile, un croûtard plus abject, un plus étroniforme bourgeois ! Non, rien ne peut donner l’idée du vomissement que m’inspire ce vieux melon diplomatique, arrondissant sa bêtise sur le fumier de la bourgeoisie. »2293
Gustave FLAUBERT, Lettre à George Sand (1867)
Élu député de Paris en 1863, Thiers devient le chef de l’opposition républicaine. Orateur toujours pugnace à 70 ans, il occupe la scène politique jusqu’à sa mort en 1877. Flaubert regrettera alors cet humour de mauvaise foi.
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.