Le procès de Jeanne est un modèle du genre, en terme de dramaturgie. Il a inspiré d’innombrables auteurs et quelques chefs d’œuvre, mais la réalité n’a pas moins de talent.
« Jeanne, croyez-vous être en état de grâce ? — Si je n’y suis, Dieu veuille m’y mettre ; si j’y suis, Dieu veuille m’y tenir. »344
(1412-1431), Rouen, procès de Jeanne d’Arc, 24 février 1431
Jeanne d’Arc (1888), Jules Michelet, Émile Bourgeois.
Jeanne va subir une suite d’interrogatoires minutieux et répétitifs, en deux procès. Les minutes sont les sources originales et précieuses, mais la traduction du vieux français est plus ou moins fidèle et claire. D’où le recours à diverses sources, pour plus de clarté.
Le premier procès d’« inquisition en matière de foi » commence le 9 janvier 1431, sous la présidence de Pierre Cauchon, évêque de Beauvais (diocèse où elle a été faite prisonnière). Ce n’est pas sa personne que l’Église veut détruire, c’est le symbole, déjà très populaire.
Que lui reproche l’Église ? Le port de vêtements d’homme, sacrilège à l’époque, une tentative de suicide dans sa prison, et ses visions considérées comme une imposture ou un signe de sorcellerie.
Jeanne est seule, face à ses juges. Charles VII, qui lui doit tant, et d’abord son sacre, l’a abandonnée. Il ne lui reste plus que sa foi, son Dieu. Elle va résister, jusqu’au 24 mai.
[Question à l’accusée] « Dieu hait-il les Anglais ?
— De l’amour ou de la haine que Dieu a pour les Anglais, je n’en sais rien ; mais je sais bien qu’ils seront tous boutés hors de France, excepté ceux qui y périront. »345JEANNE d’ARC (1412-1431), Rouen, procès de Jeanne d’Arc, interrogatoire du 17 mars 1431
Dictionnaire de français Larousse, au mot « bouter »
Pour Pierre Cauchon, rallié à la couronne d’Angleterre comme un tiers de la France à cette époque, Jeanne est rebelle au pouvoir légitime, au terme du traité de Troyes signé et ratifié par les deux pays en 1420. Mais grâce à Jeanne, Charles VII a repris courage et c’est lui qui va « bouter » les Anglais hors de France. Il ne leur restera que Calais. Ainsi finit la guerre de Cent Ans.
En attendant, le procès se déroule selon les règles – de peur d’une annulation ultérieure. La partialité est cependant évidente dans la conduite des interrogatoires et dans la manière dont on abuse de l’ignorance de Jeanne, qui n’a pas 20 ans. La simplicité de ses réponses est admirable.
[Question à l’accusée] « Pourquoi votre étendard fut-il porté en l’église de Reims au sacre, plutôt que ceux des autres capitaines ?
— Il avait été à la peine, c’était bien raison qu’il fût à l’honneur. »347JEANNE d’ARC (1412-1431), Procès, 9e interrogatoire du 15 mars 1431
Dictionnaire de français Larousse, au mot « peine »
Le calme bon sens de la jeune fille l’emporte sur tous les pièges. Le théâtre et le cinéma ont repris ce dialogue, presque au mot à mot. C’est dire si Jeanne avait du talent, que son inspiration soit divine ou pas.
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