Naissance de la monarchie absolue - Règne de Louis XIII et Richelieu (suite).
Chronique (1624-1643)
Premières manifestations d’autorité du cardinal : interdiction des duels et siège de La Rochelle.
L’autoritaire cardinal de Richelieu, devenu « principal ministre », va « foudroyer les humains » plus que les gouverner, travaillant jusqu’à l’épuisement de ses forces à restaurer la puissance de l’État, donc à rendre la monarchie absolue. Il réduit d’abord les prétentions des Grands et interdit à la noblesse le jeu dangereux des duels, punis par la peine capitale. Il brise la puissance des protestants alliés à l’ennemi anglais, notamment en leur enlevant La Rochelle qui tombe après plus d’un an de siège (1628).
Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.
« La France, le plus beau royaume après celui du Ciel. »691
GROTIUS (1583-1645), Épître dédicatrice. De jure belli ac pacis (1625). Le XVIIe siècle : diversité et cohérence (1992), Jacques Truchet
Le jurisconsulte hollandais adresse son traité à Louis XIII, d’où le superlatif (…) La France a cependant de bons atouts. Sa démographie : elle est plus peuplée que l’Espagne, l’Italie et l’Angleterre réunies (…) L’industrie textile prospère dans les manufactures (…) celle du bâtiment profite de la croissance des villes, où s’épanouit le « style français » (…)
« Les rois doivent être sévères et exacts à faire punir ceux qui troublent la police et violent les lois de leur royaume, mais il ne faut y prendre plaisir. »692
Cardinal de RICHELIEU (1585-1642). Le Cardinal de Richelieu : étude biographique (1886), Louis Dussieux
Ces mots du cardinal ministre peuvent s’appliquer à tous les ennemis du pouvoir royal. Et d’abord, les Grands : la haute noblesse est la première responsable de l’anarchie qui prévaut depuis la mort d’Henri IV. Richelieu tente de la mater, mais la Fronde qui éclate après sa mort prouve assez que ce fut en vain (…)
« Il n’est pas besoin de beaucoup d’ordonnances, mais bien de réelles exécutions. »693
Cardinal de RICHELIEU (1585-1642), Discours à l’assemblée des notables tenue à Paris, fin 1626. Histoire de la Ville de Paris (1725), Michel Félibien
Les lois et ordonnances (…) ne font pas défaut, mais on néglige trop souvent de les mettre en pratique. « Faire une loi et ne pas la faire exécuter, c’est autoriser la chose qu’on veut défendre », dit Richelieu dans ses Mémoires. En février 1626, un édit va faire beaucoup parler de lui : il interdit les duels, ne faisant que renouveler l’édit d’Henri III, non appliqué (…)
« Je dois la justice à mes sujets, et en cet endroit je dois préférer la justice à la miséricorde. »694
LOUIS XIII (1601-1643), à la femme du baron de Guémadeuc, cité dans Le Mercure français (…)
Défiant l’édit royal, Guémadeuc a tué en duel le baron de Nevet. Louis XIII le fait comparaître devant un tribunal qui le condamne à mort. Il est décapité en 1627. Le 22 juin de la même année, Montmorency-Boutteville et Des Chapelles bravent à leur tour l’édit en plein Paris, leur sort est identique (…)
« Je réponds de la vertu de la reine de la ceinture aux pieds. Je n’en dirai pas autant du reste. »695
Princesse de CONTI (1574-1631). Mazarin (1972), Paul Guth
Anne d’Autriche, peu heureuse dans son royal ménage, est compromise par la folle passion du duc de Buckingham, ministre et favori du roi d’Angleterre (…) Certaine lettre de la reine à Buckingham confirme : « Si une honnête femme avait pu aimer un autre homme que son mari, vous auriez été le seul qui aurait pu me plaire. »
« Puisqu’on refuse de me recevoir en France comme ambassadeur qui veut porter la paix, j’y entrerai, malgré les Français, comme un général qui porte la guerre ! »696
Duc de BUCKINGHAM (1592-1628). George Villiers, duc de Buckingham (1951), Philippe Erlanger
Venu en ambassadeur du roi d’Angleterre, sa présence est jugée indésirable par Richelieu et Louis XIII (…) l’Angleterre s’inquiète des projets commerciaux et maritimes de Richelieu (…) Elle déclare la guerre à la France en 1627. Anglais et Rochelais concluent un pacte. Richelieu va profiter de l’occasion (…)
« Nous serons si fous que nous prendrons La Rochelle ! »697
Maréchal de BASSOMPIERRE (1579-1646), été 1627 (…)
Avec les Grands, toujours prêts à comploter contre le roi, les protestants sont l’autre source d’anarchie dans le royaume. La Rochelle est la plus forte des villes de sûreté que leur a concédées l’édit de Nantes (…) La lutte entre pouvoir royal et puissance protestante se joue donc au siège de La Rochelle, qui commence le 10 septembre 1627 (…)
« Prends ta foudre, Louis, et va comme un lion
Donner le dernier coup à la dernière tête
De la Rébellion. »698François de MALHERBE (1555-1628), Poésies, Ode pour le roi (1628)
(…) Paradoxe cruel, cette bataille risque d’anéantir le premier port de France, principale place de course et d’armement, atout majeur pour la politique maritime et coloniale du cardinal, et vrai motif de la guerre avec l’Angleterre. Malgré tout, il faut prendre La Rochelle. C’est dans la logique d’une monarchie qui se veut absolue.
« Pourvu qu’il reste un homme pour fermer les portes, c’est assez. »699
Jean GUITON (1585-1654), maire de La Rochelle, à la tête des assiégés. Nouvelle Histoire de France (1922), Albert Malet
Grand armateur, protestant convaincu, il va tenir un siège de quinze mois (…) Richelieu a conduit personnellement les travaux préparatoires : une ligne de 12 km de fortifications sur terre et une digue construite au large, pour empêcher le ravitaillement par la flotte anglaise. C’est la famine qui acculera La Rochelle à la reddition (…)
« Sire, ne soyez point courtois
À ces rebelles Rochellois
Point de pardon : il faut tout pendre !
Vous m’avez donné la maison
D’un parpaillot. S’il faut la rendre,
Je serai sot comme un oison. »700Les Rochellois, chanson (…)
Malgré la tradition qui en fait un droit, le pillage est interdit, d’où les murmures des vainqueurs désabusés, entrant dans la ville, le 1er novembre 1628. Après quinze mois de siège, les trois quarts des habitants ont péri (22 500 morts) et l’on n’ose pas fêter cette amère victoire des Français contre des Français (…) la ville ne s’en remettra pas de longtemps.
« Maintenant que La Rochelle est prise, si le roi veut se rendre le plus puissant monarque du monde […] il faut avoir en dessein perpétuel d’arrêter le cours des progrès d’Espagne, et au lieu que cette nation a pour but d’augmenter sa domination et étendre ses limites, la France ne doit penser qu’à se fortifier en elle-même. »701
Cardinal de RICHELIEU (1585-1642), avis donné au roi après la paix de La Rochelle, 13 janvier 1629 (…)
Selon lui, l’ennemi numéro un est la maison de Habsbourg, notamment l’Espagne, maîtresse de l’actuelle Belgique, de la Franche-Comté, du Roussillon et alliée avec l’empereur d’Allemagne (…) Dans l’entourage du roi, le parti dévot (ultra-catholique) est naturellement très hostile à cette politique anti-espagnole.
« Les sources de l’hérésie et de la rébellion sont maintenant éteintes. »702
Cardinal de RICHELIEU (1585-1642), Lettre au roi Louis XIII, août 1629. L’Âme de la France : une histoire de la nation, des origines à nos jours (2007), Max Gallo
(…) L’édit de grâce (ou paix) d’Alès, accordé aux rebelles le 28 juin 1629, laisse aux protestants la liberté de leur culte et confirme en cela l’édit de Nantes, mais leur ôte tous les privilèges militaires et politiques. C’est la fin de ce dangereux « État dans l’État » (…) Mais le parti dévot, avec la reine mère, ne peut accepter la paix faite à ces conditions.
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.