Les femmes de la Révolution, cinquième épisode : Louise Michel.
Louise Michel, l’héroïne d’une autre révolution, plus brève, plus sanglante, la Commune de 1871. La « Vierge rouge » des barricades va au-devant de la mort, mais elle y échappe. De même qu’à la répression terrible qui suit l’insurrection du peuple de Paris. Condamnée au bagne, elle reviendra en 1880, encore plus socialiste, anarchiste, idéaliste, utopiste, féministe et prosélyte.
« Faisons la révolution d’abord, on verra ensuite. »2330
(1830-1905)
L’Épopée de la révolte : le roman vrai d’un siècle d’anarchie (1963), Gilbert Guilleminault, André Mahé.
Même contexte de « patrie en danger » que sous la Révolution française. Même climat de guerre civile dans Paris, littéralement coupé du reste de la France, puisque l’Assemblée nationale siège à Bordeaux, puis à Versailles, et que Thiers, chef du pouvoir exécutif, doit faire face à tous les problèmes à la fois, en 1871.
Révolutionnaire anarchiste, ex-institutrice et militante républicaine, Louise Michel se retrouve très naturellement sur les barricades, dès les premiers jours du soulèvement de la capitale, dans ses quartiers les plus populaires : cause perdue d’avance, révolution sans espoir, utopie d’un « Paris libre dans une France libre » ?
En tout cas, rien de moins prémédité que ce mouvement qui échappe à ceux qui tentent de le diriger, au nom d’idéaux d’ailleurs contradictoires.
« Montmartre, Belleville, ô légions vaillantes,
Venez, c’est l’heure d’en finir.
Debout ! La honte est lourde et pesantes les chaînes,
Debout ! Il est beau de mourir. »2326Louise MICHEL (1830-1905), À ceux qui veulent rester esclaves
La Commune (1898), Louise Michel
La Commune de Paris inspire bien des poèmes, des chants qui sont autant de cris de guerre, de haine ou d’espoir.
Louise Michel est l’héroïne la plus populaire de cette page d’histoire : surnommée la « Vierge rouge », elle appelle à l’insurrection les quartiers « rouges » de la capitale, ceux qui font toujours peur aux bourgeois. Mais c’est le drapeau noir de l’anarchie qu’elle brandit, et popularise.
« La révolution sera la floraison de l’humanité comme l’amour est la floraison du cœur. »2365
Louise MICHEL (1830-1905), La Commune, Histoire et souvenirs (1898)
Plus que jamais militante et anarchiste (prête à un attentat contre Thiers qui symbolise la bourgeoisie et les forces de l’ordre), auteur de poèmes et de théâtre, c’est d’abord une idéaliste comme tant de communards, et l’héroïne la plus populaire de la Commune. Un quart de siècle après, elle fait revivre ces souvenirs vibrants, et tragiques.
Rappelons les faits et le contexte. Le Second Empire est mort, après la capitulation de Sedan (2 septembre 1870). L’armistice avec les Allemands est signé en janvier 1871, mais Paris refuse la défaite, la perte de l’Alsace-Lorraine, et se soulève. Face aux Communards (ou Fédérés), les Versaillais se préparent, troupes commandées par les généraux Mac-Mahon et Vinoy. En plus des 63 500 hommes dont l’État dispose, il y a les 130 000 prisonniers libérés par Bismarck - chancelier allemand, hostile à tout mouvement populaire à tendance révolutionnaire.
Le 30 mars, Paris est pour la seconde fois ville assiégée, bombardée, et à présent par des Français. C’est une guerre civile qui se joue sur fond de guerre franco-allemande. Premiers affrontements, le 2 avril : bataille de Courbevoie. Les Communards tentent une sortie de Paris pour marcher sur Versailles, mais sont arrêtés par le canon du Mont Valérien, fort stratégique tenu par les Versaillais : les rêveurs de la Commune qualifient les obus qui les écrasent de « choses printanières ». 17 tués (dont les 5 premiers fusillés de la Commune) et 25 prisonniers chez les Fédérés. Dans l’armée versaillaise, 5 morts et 21 blessés.
« Elles ont pâli, merveilleuses / Au grand soleil d’amour chargé,
Sur le bronze des mitrailleuses / À travers Paris insurgé. »2329Arthur RIMBAUD (1854-1891), Les Mains de Jeanne-Marie (1871)
Adolescent de 17 ans, bouleversé par la déclaration de guerre, puis par la tragédie de la Commune, il fugue deux fois à Paris, en 1870 et 1871, chante Le Dormeur du val, jeune soldat cueilli par la mort, mais aussi les communardes sur les barricades, mêlant poésie, révolte, soif de révolution sociale et morale.
Rimbaud comprend très vite l’impuissance des vers à « changer la vie » et après un silence de dix-huit ans, ce poète précoce et génial meurt à 37 ans. L’auteur du Bateau ivre reste comme un phénomène de la littérature française.
Louise Michel, quant à elle, va vivre longtemps encore, croira toujours à la « lutte finale » et ne renoncera jamais à son idéal. Seul point commun avec Rimbaud : elle a les mots pour dire…
Ces citations sont tirées de notre Chronique de citations sur le Second Empire et la Troisième République.
À ce rythme - 4 citations par jour - les 10 Chroniques de l’Histoire en citations sont à vous dans trois ans. Encore trois ans et vous aurez aussi le Dictionnaire. Mais que de temps perdu !
Faites un tour dans la Boutique, feuilletez les 20 premières pages de chaque volume et voyez si ça vaut le coût (4 € le volume).
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.
