Les slogans de Mai 68 font littéralement l’histoire en citations et en direct. Le président part en voyage diplomatique, le Premier ministre en revient. Ex-prof, il comprend le problème – la jeunesse, les étudiants. Mais personne ne contrôle plus rien. Et les ouvriers se mettent en grève.
Tout pouvoir abuse, le pouvoir absolu abuse absolument.
Ne me libère pas, je m’en charge.
L’alcool tue, prenez du LSD.3049Slogans à Nanterre, 14 mai 1968
Nanterre joue toujours en co-vedette avec Paris, son Quartier latin en éruption et les Beaux-Arts fermés, mais travaillant jour et nuit aux affiches pour donner la parole aux murs.
Cependant que le général de Gaulle s’envole pour la Roumanie : le président ne veut pas que des querelles internes passent avant ses engagements internationaux.
Mais c’est sous-estimer l’importance des événements. Qui peut d’ailleurs juger raisonnablement d’une situation où tout semble possible et le contraire de tout !?
« À travers les étudiants, c’est le problème même de la jeunesse qui est posé, de sa place dans la société, de ses obligations et de ses droits, de son équilibre moral même. »3050
Georges POMPIDOU (1911-1974), Premier ministre, Assemblée nationale, 14 mai 1968
Rappelons qu’il fut professeur avant de s’engager en politique. Pompidou est naturellement plus proche de cette jeunesse que de Gaulle, aussi de par son âge. Il comprend la complexité du mouvement, l’ampleur de cette lame de fond : « C’est qu’il ne s’agit pas simplement de réformer l’Université… »
Cependant que des ouvriers se mettent en grève : usines et locaux occupés, directeurs et cadres séquestrés, d’abord à Sud-Aviation (Nantes).
Soyez réalistes, demandez l’impossible.
Aux examens, répondez par des questions.3051Slogans à Censier (annexe de la Sorbonne), 14 mai 1968
Que répondre à cette logique !? Les professeurs, les politiques, les commentateurs sont dépassés, mais les acteurs et les auteurs de Mai 68 ne le sont pas moins. Cohn-Bendit va tenir encore une semaine avant de fuir… Les autres ne sont pas moins fragiles. Après coup, le témoignage de Geismar est lucide.
« Se retrouver vedette presque du jour au lendemain, ça monte à la tête. Plus moyen d’entrer dans un bistrot sans qu’on attende de vous des paroles historiques […] Des gens, des inconnus vous baisent les mains en vous qualifiant de fils du peuple. C’est étrange, grisant, foncièrement jouissif. Et c’est dur, agressif, effrayant. Je ne savais plus qui j’étais. »3052
Alain GEISMAR (né en 1939), en 1986
Juste quarante ans après, pour répondre aux critiques simplistes et redire la richesse, comme les contradictions de cette période explosive, Alain Geismar a dit sa vérité et témoigné, dans Mon Mai 68 (2008).
L’homme au grand porte-voix, visible sur les photos, n’a pas la même aisance ni le parcours d’un Cohn-Bendit. Il a 31 ans. Ingénieur et maître assistant à la faculté des sciences, il restera enseignant. Il comprend les jeunes en révolte, mais il n’est pas né révolutionnaire et entre dans le mouvement par accident.
Autres meneurs de Mai 68, Jacques Sauvageot, Roland Castro, Serge July, Alain Krivine, Bernard Kouchner. Mais à côté des reconversions heureuses et de quelques réussites médiatiques à la July (Serge), il y aura les adolescents perdus, les « irrécupérables ». Gesmar se situe assez raisonnablement et logiquement entre les deux extrêmes.
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