Mourir avec une dernière pensée POLITIQUE, en forme de message au dernier interlocuteur présent… ou à la postérité à venir. Tous ces mourants se distinguent par un sens de l’Histoire remarquable.
« Sire, je vous dois tout, mais je m’acquitte envers Votre Majesté en lui donnant Colbert. »805
(1602-1661) à Louis XIV, le 9 mars 1661. C’est son « mot de la fin » politique
Le Plutarque français, vie des hommes et femmes illustres de la France (1837), Édouard Mennechet.
Premier ministre de la reine mère, gardé par Louis XIV à sa majorité, se donnant tout entier à son métier de « principal ministre », il a eu la totalité du pouvoir. Il a parallèlement collectionné les charges et acquis une immense fortune. Il recommande au roi le financier Jean-Baptiste Colbert, parfait gestionnaire de ses biens. Louis XIV le gardera à son service jusqu’à sa mort, durant plus de vingt ans - atout majeur pour le règne.
Mazarin parle et meurt comme il a vécu, maître en Politique et pas vraiment chrétien pour un cardinal (à l’inverse de son prédécesseur, Richelieu).
« Si j’avais fait pour Dieu ce que j’ai fait pour cet homme, je serais sauvé dix fois. »891
COLBERT (1619-1683), sur son lit de mort, parlant de Louis XIV, début septembre 1683
Il meurt en ministre, plus qu’en chrétien. Mais la France est une monarchie de droit divin, donc « cautionnée » par Dieu omniprésent.
Ce grand commis de l’État accomplit une tâche surhumaine, cumulant les postes d’intendant des Finances, contrôleur général, surintendant des Bâtiments, Arts et Manufactures, secrétaire à la Maison du roi et à la Marine. En vertu de quoi il dirigea et réglementa l’économie, réorganisa l’administration, géra les « affaires culturelles », encouragea le commerce défini comme « une guerre d’argent » et enrichit le pays au nom d’un mercantilisme qui fait loi – le « colbertisme ». Louis XIV lui doit, autant que la France, une part de cette grandeur dont il est si fier.
« Mon ami, j’emporte avec moi les derniers lambeaux de la monarchie. »1384
MIRABEAU (1749-1791), à Talleyrand, fin mars 1791
Talleyrand est venu voir le malade, juste avant sa mort (2 avril). Voyant la fin de l’Ancien Régime, il a tout fait pour conserver une monarchie constitutionnelle (à l’anglaise). Comme Talleyrand, d’ailleurs. Certains députés, connaissant son double jeu et son double langage entre le roi et l’Assemblée, l’accusent de trahison - le fait sera prouvé en novembre 1792, quand l’armoire de fer où le roi cache ses papiers compromettants révélera ses secrets.
Mirabeau, l’Orateur du peuple, fut le premier personnage marquant de la Révolution. Le peuple prend le deuil de son grand homme, qui a droit aux funérailles nationales et au Panthéon. Démasqué, il sera aussitôt dépanthéonisé.
« Eh ! qui suis-je pour me plaindre, quand des milliers de Français meurent aux frontières pour la défense de la patrie ? On tuera mon corps, on ne tuera pas ma mémoire. »1549
Pierre Victurnien VERGNIAUD (1753-1793), guillotiné le 31 octobre 1793
L’homme si élégant, séducteur au charme romantique, avocat brillant sous l’Ancien Régime, devenu l’un des orateurs les plus doués de la Législative et de la Convention, a perdu toute flamme, usé par cinq mois de prison et résigné au pire. Il aurait pu fuir comme quelques autres, mais non : « Fuir, c’est s’avouer coupable. » Il fait donc partie des 21 Girondins exécutés. Débordé sur sa gauche par les Montagnards, il relativise son martyr, dans une mise en perspective politique.
« Je meurs le jour où le peuple a perdu la raison ; vous mourrez le jour où il l’aura recouvrée. »1550
Marc David Albin LASOURCE (1762-1793), 31 octobre 1793
Parfaite analyse politique : il voit la situation et prévoit l’avenir. Ancien pasteur, acquis à la Révolution, défendant toujours ses convictions avec courage, décrété d’accusation, il est jugé avec les Girondins auxquels il s’est rallié, fin octobre 1793. Les 21 sont condamnés à mort. Cinq charrettes les mènent à l’échafaud le même jour.
« Liberté, que de crimes on commet en ton nom ! »1554
Mme ROLAND (1754-1793), montant à l’échafaud et s’inclinant devant la statue de la Liberté (place de la Révolution), 8 novembre 1793
Plus héroïque que son Girondin de mari qui a fui à Rouen et se suicidera deux jours après, en apprenant sa mort. Plus politique aussi, en tout cas plus affirmée dans ses convictions - beaucoup plus jeune aussi.
Manon Roland fit preuve d’une belle énergie et d’une plume infatigable, dans sa prison (l’Abbaye, puis la Conciergerie). Elle écrit pour se défendre devant le Tribunal révolutionnaire, même sans espoir. Elle écrit ses Mémoires, destinées à sa fille Eudora. Elle écrit des lettres, notamment à son ami Buzot qui, contrairement à elle, a fui comme son mari, pour échapper au sort des Girondins. Il se suicidera lui aussi, apprenant, quelques mois plus tard, la mort de Manon Roland.
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