« Mon enfant, vous allez être un grand roi. Tâchez de soulager vos peuples, ce que je suis malheureux pour n’avoir pu faire. »943
(1638-1715), au futur Louis XV, 26 août 1715
Mémoires (posthume), Saint-Simon.
Le roi, mourant, reçoit le petit Dauphin dans sa chambre. Il donne une ultime leçon à cet enfant de 5 ans – son arrière petit-fils, tous ses autres héritiers sont morts.
Lui si fier de cette monarchie absolue, à la fois prestigieuse et conquérante, il éprouve de terribles regrets ainsi résumés : « Ne m’imitez pas dans le goût que j’ai eu pour les bâtiments ni dans celui que j’ai eu pour la guerre. » La postérité lui pardonne aisément Versailles et sa belle politique culturelle, mais pas cette politique de conquête et d’hégémonie qui a coalisé toute l’Europe contre la France.
« La plus éclatante victoire coûte trop cher, quand il faut la payer du sang de ses sujets. »941
LOUIS XIV (1638-1715), Lettre à l’intention du Dauphin, août 1715
Lettre écrite peu de jours avant sa mort à 77 ans, confiée au maréchal de Villeroi son ami de toujours, pour être remise à Louis XV, le jour de ses 17 ans.
Roi Très Chrétien et fort croyant, Louis XIV fait preuve ici d’autant de dignité que d’humilité, dans son Mea culpa. La guerre fut une passion royale, entreprise et soutenue par souci de grandeur, mais aussi par vanité personnelle. Cause de la ruine du peuple, elle devient son principal remords.
« Quel massacre ! Et sans résultat ! Spectacle bien fait pour inspirer aux princes l’amour de la paix et l’horreur de la guerre ! »1821
NAPOLÉON Ier (1769-1821), sur le champ de bataille d’Eylau (Prusse), 9 février 1807
La Chambre noire de Longwoog : le voyage à Sainte-Hélène (1997), Jean-Paul Kauffmann
Même prise de conscience que Louis XIV, mais plus étonnante chez ce conquérant de 38 ans, qui n’en a pas fini avec son destin.
Près de 50 000 tués ou blessés autour de lui : coûteuse et amère victoire en date du 8 février, remportée contre les Russes supérieurs en nombre et ce qui restait des Prussiens. Le lendemain, Napoléon découvre l’atrocité du spectacle. Il commande un tableau, dicte tout ce que le peintre doit faire passer. Le projet fait l’objet d’un concours.
Pour la première fois de l’histoire, on voit l’empereur bouleversé, entouré de ses généraux (Murat, Davout, Ney, Soult, Augereau et Lannes), s’inquiétant des soins apportés aux blessés, français ou ennemis. Admirable tableau (signé Antoine-Jean Gros), œuvre de propagande, naturellement, mais le message est nouveau, et le repentir très clair, dans l’exclamation impériale.
« Mon mariage m’a perdu, l’Autriche était devenue ma famille, j’ai posé le pied sur un abîme recouvert de fleurs. »1847
NAPOLÉON Ier (1769-1821)
Correspondance de Napoléon Ier, publiée par ordre de l’empereur Napoléon III (1858)
En 1810, François Ier, empereur d’Autriche, lui donna sa fille Marie-Louise, pour sceller la paix, au lendemain de ses défaites. Divorcé de l’impératrice Joséphine, stérile, Napoléon le parvenu se donne des ancêtres : « C’est un ventre que j’épouse. »
Trois ans après, François se joindra aux alliés de l’Europe contre son gendre : sixième et dernière coalition qui amène la chute de l’Empire. C’est donc un mauvais calcul de Napoléon, une erreur qu’il reconnaît à Sainte-Hélène en se confiant à Montholon, compagnon de son dernier exil.
« Du sublime au ridicule, il n’y a qu’un pas. »1871
NAPOLÉON Ier (1769-1821), à son ambassadeur à Varsovie, Monseigneur de Pradt, 5 décembre 1812
Biographie universelle ancienne et moderne (1854), Michaud
Ce mot figure dans ses Maximes et pensées. En pleine retraite de Russie, il fait partie d’un étrange discours, tenu par un homme fatalement éprouvé par ce désastre.
En même temps, il nie avoir été vaincu, il nie même les dangers courus. Il dit que « l’armée est superbe ». Quant à lui : « Je vis dans l’agitation ; plus je tracasse, mieux je vaux. Il n’y a que les rois fainéants qui engraissent dans les palais ; moi, c’est à cheval, et dans les camps. »
« La fortune m’a ébloui. »1873
NAPOLÉON Ier (1769-1821), à ses ministres, 19 décembre 1812
Les Ministres de Napoléon (1959), Jean Savant
De retour à Paris pour contrer un (énième) complot, il avoue aussi à ses ministres : « J’ai été à Moscou, j’ai cru signer la paix. J’y suis resté trop longtemps. J’ai fait une très grande faute, mais la fortune peut encore la réparer. »
En fait, rien n’est plus réparable et il le sait. Mea culpa. C’est la débâcle en Russie : bilan total de cette campagne, 530 000 morts, victimes surtout du typhus, du froid et de la faim.
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