Restauration
Les Cent-Jours, le come-back le plus stupéfiant de l’Histoire.
Napoléon s’ennuyait en exil à l’île d’Elbe. L’épopée napoléonienne semble recommencer avec « le vol de l’Aigle ». L’empereur retrouve les mots pour galvaniser les foules. La France est réellement divisée par l’Événement, l’Europe tétanisée, mais les chansonniers sont très inspirés…
Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.
« Français ! […] j’arrive parmi vous reprendre mes droits qui sont les vôtres. »1924
NAPOLÉON Ier (1769-1821), Golfe Juan, Proclamation du 1er mars 1815. France militaire : histoire des armées françaises de terre et de mer de 1792 à 1833 (1838), Abel Hugo
À peine débarqué, il parle au pays et il n’a pas besoin qu’on l’aide à trouver les mots : « Dans mon exil, j’ai entendu vos plaintes et vos vœux : vous réclamiez ce gouvernement de votre choix qui est seul légitime. » (…) Le frère aîné de Victor Hugo reprend le récit de la geste napoléonienne.
« D’sus l’trône Louis XVIII placé,
Notre Emp’reur que rien n’inquiète,
Lui dit : pour un an j’t’ai laissé,
Ot’-toi d’là que j’m’y mette ! »1925Ot’-toi d’là que j’m’y mette, chanson de 1815
Cette chanson sera saisie par la police, après les Cent-Jours. La censure n’est pas si terrible, mais l’humour de Louis XVIII a ses limites, et l’humiliation sera grande, durant cent jours.
« Ils n’ont rien oublié, ni rien appris. »1926
NAPOLÉON Ier (1769-1821), Golfe-Juan, Proclamation du 1er mars 1815
(…) Napoléon reprend la formule de Dumouriez, parlant des courtisans qui entourent Louis XVIII, le mot étant également attribué à Talleyrand. Quoi qu’il en soit, il résume parfaitement la mentalité des Bourbons et surtout de leurs partisans, les ultras, plus royalistes que le roi.
« L’aigle, avec les couleurs nationales, volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame. »1927
NAPOLÉON Ier (1769-1821), Golfe-Juan, Proclamation du 1er mars 1815
L’empereur annonce la couleur, dès le premier jour, se pose devant l’armée en soldat de la Révolution et honnit le drapeau blanc de la Charte constitutionnelle : « Arrachez ces couleurs que la nation a proscrites, et qui pendant vingt-cinq ans servirent de ralliement à tous les ennemis de la France ! Arborez cette cocarde tricolore ; vous la portiez dans nos grandes journées […] Reprenez ces aigles que vous aviez à Ulm, à Austerlitz, à Iéna. »
Il n’en faut pas plus, pas moins non plus, pour que Napoléon gagne cet incroyable pari : rallier les troupes envoyées pour l’arrêter, soulever d’enthousiasme les populations et traverser la France en vingt jours, sous les yeux de l’Europe pétrifiée. Ainsi commence le vol de l’Aigle, sur la route Napoléon.
« La grande mesure décrétée contre Bonaparte fut un ordre de “courir sus” : Louis XVIII, sans jambes, “courir sus” le conquérant qui enjambait la terre. »1928
François René de CHATEAUBRIAND (1768-1848), Mémoires d’outre-tombe (posthume)
Quand il écrit ses Mémoires, l’auteur qui s’est rallié à la Restauration est passé dans l’opposition, ce qui est sa vraie nature. Quant à la France, elle est profondément divisée, face à l’événement. Chaque camp a sa chanson.
« Enfin, v’la qu’je r’voyons à Paris
Ce fils de la victoire !
L’aigle remplace la fleur de lys,
C’est c’qui faut pour sa gloire.
De l’île d’Elbe en quittant le pays,
Crac ! Il se met en route.
En vingt jours, il arrive à Paris.
C’t’homm’-là n’a pas la goutte. »1929Ot’-toi d’là que j’m’y mette, chanson de 1815
Un des couplets du chant des partisans, de plus en plus nombreux : la magie impériale agit encore. Cependant qu’à Paris comme à Vienne, la réaction s’organise. Dès que la nouvelle touche la capitale, le 5 mars 1815, le comte d’Artois prend la route de Lyon. Le Journal des Débats stigmatise le traître (…)
« Il est donc revenu cheux nous
C’t’homme qu’on croyait si tranquille ?
J’aurions ben parié deux sous
Qu’i n’resterait pas dans son île,
Car c’n’est pas un fait nouveau
Qu’les enragés n’aimions pas l’iau. »1930Le Retour de Nicolas, chanson de 1815. Histoire de France par les chansons (1982), France Vernillat, Pierre Barbier
Une des chansons royalistes qui surnomment Napoléon « Nicolas » ou « Nicodème », autrement dit un sot, en langage de l’époque. Mais le futur Charles X ne parvient pas à rassembler les régiments espérés. Quant au congrès de Vienne, il ne marche plus, il ne danse plus.
« Cet homme est revenu de l’île d’Elbe plus fou qu’il n’était parti. Son affaire est réglée, il n’en a pas pour quatre mois. »1931
Joseph FOUCHÉ (1759-1820), lucide quant à l’avenir, mars 1815. 1815 (1893), Henry Houssaye
Paroles de celui qui va redevenir ministre de la Police sous les Cent-Jours et sous la seconde Restauration. (…) « Avant trois mois, je serai plus puissant que lui et s’il ne m’a pas fait fusiller, il sera à mes genoux (…) Mon premier devoir est de contrarier tous les projets de l’empereur. » Fouché a tort de trahir, mais raison de penser ainsi (…) La France n’a aucune chance de gagner (…)
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