3. Napoléon et les femmes. Un homme moins doué pour l’amour que pour la guerre. Misogynie assumée jusqu’à la muflerie, préjugés sexistes.
Piètre amant de cent maîtresses, deux mariages malheureux, un grand amour avec Joséphine qui l’a beaucoup trompé, la raison d’État avec Marie-Louise qui lui a fait son Aiglon. Mais… « Napoléon eut une autre femme que Joséphine et Marie-Louise. Cette compagne porte un manteau d’azur constellé d’étoiles, elle est couronnée de lauriers. La croix d’honneur brille sur sa poitrine. Elle se nomme la Gloire. » (Anatole France)
« Nous autres peuples d’Occident, nous avons tout gâté en traitant les femmes trop bien […] Elles ne doivent pas être regardées comme les égales des hommes, et ne sont, en réalité, que des machines à faire des enfants […] Il vaut mieux qu’elles travaillent de l’aiguille que de la langue. »1823
(1769-1821)
Histoire de la France : dynasties et révolutions, de 1348 à 1852 (1971), Georges Duby.
Création de la maison d’éducation des jeunes filles de la Légion d’honneur d’Écouen, le 15 mai 1807, une occasion parmi d’autres de manifester sa misogynie, en réaction contre un XVIIIe siècle des Lumières relativement émancipateur et une idéologie révolutionnaire démocratique. Bref, selon une note de l’empereur : « Élevez-nous des croyantes et non pas des raisonneuses. » Dans la même logique : « La femme doit obéissance à son mari. » Code civil, la voix de Napoléon.
« Les femmes sont l’âme de toutes les intrigues, on devrait les reléguer dans leur ménage, les salons du gouvernement devraient leur être fermés. »1779
Napoléon BONAPARTE (1769-1821), Lettre du jeune général à son frère Joseph, 8 septembre 1795
On croirait entendre le cardinal de Richelieu.
La misogynie de Napoléon est célèbre. Elle a des conséquences juridiques, dans le Code civil : la femme vit sous la tutelle du mari qui peut l’envoyer en prison, si elle commet un adultère. L’homme adultère sera puni d’une simple amende. Même inégalité de traitement en matière de divorce : pour l’obtenir, la femme doit établir que son époux a établi sa concubine au foyer commun. Par ailleurs, l’instruction est réservée aux hommes, dans les lycées et à l’Université.
Il motive cette misogynie avec des attendus laborieux : « La femme est notre propriété, nous ne sommes pas la sienne ; car elle nous donne des enfants, et l’homme ne lui en donne pas. Elle est donc sa propriété comme l’arbre à fruit est celle du jardinier. » Ou des considérations domestiques : « Les hommes sont faits pour le grand jour. Les femmes sont faites pour l’intimité de la famille et pour vivre dans leur intérieur. »
Bien que misogyne, Napoléon a beaucoup de maîtresses, mais ce n’est pas un bon amant – en homme trop pressé, il n’ôte même pas ses bottes. Il a beaucoup aimé sa première femme – Joséphine, qui l’a beaucoup trompé. Et très peu la seconde, Marie-Louise, qui lui a quand même fait un fils, l’Aiglon.
« L’arrivée de cette femme, comme celle d’un oiseau de mauvais augure, a toujours été le signal de quelque trouble. Mon intention n’est pas qu’elle reste en France. »1738
Napoléon BONAPARTE (1769-1821), au Grand Juge Régnier (ministre de la Justice)
Histoire de la France et des Français (1972), André Castelot, Alain Decaux
Premier Consul sous le Consulat, il vient d’apprendre le retour de Mme de Staël près de Beaumont-sur-Oise, 3 octobre 1803. Il lui donne cinq jours pour partir, sinon, il la fera reconduire à la frontière par la gendarmerie. L’empereur sera encore plus expéditif, informant le procureur général de la Haute Cour, 20 avril 1807 : « J’écris au ministre de la Police d’en finir avec cette folle de Mme de Staël, et de ne pas souffrir qu’elle sorte de Genève, à moins qu’elle ne veuille aller à l’étranger faire des libelles. »
Napoléon est fort irrité par cette femme de talent qui s’oppose politiquement au dictateur et le hait d’autant plus qu’elle voulut se faire aimer de lui, jadis : les deux plus grands génies du siècle, lui l’homme et elle la femme, n’étaient-ils pas faits pour cela, pensait-elle ! Ce n’était certainement pas le genre de maîtresse qu’il recherchait.
« C’est un ventre que j’épouse. »1846
NAPOLÉON Ier (1769-1821)
Le Fils de l’empereur (1962), André Castelot
Rappelons le mot du prince de Ligne, évoquant le mariage de la fille de l’empereur François Ier : « L’Autriche fit au Minotaure le sacrifice d’une belle génisse. »
Le 11 mars 1810 est célébré le mariage par procuration, une pratique courante de la noblesse de l’Ancien Régime. Elle permet, en l’absence d’un des époux, de concrétiser rapidement une alliance politique entre deux familles, malgré l’éloignement (par exemple en cas de guerre). Dans ce cas précis, seule Marie-Louise est présente, et l’archevêque de Vienne doit bénir douze anneaux car on ignore la taille précise du doigt de Napoléon ! Ce dernier est représenté par l’oncle de la mariée archiduc Charles, ancien ennemi qui commandait les troupes autrichiennes, vaincues à Wagram.
La cérémonie civile a lieu le 1er avril 1810 et Napoléon assume le rôle du Minotaure prédateur, sans y mettre les formes. Il manifeste tant de hâte qu’on parle d’un enlèvement, plus que d’un mariage.
La cérémonie religieuse a lieu le 2 avril. Marie-Louise a 18 ans, il vit une lune de miel de trois semaines qui le comble, sa seconde femme lui donnera un fils, le 20 mars 1811 : le roi de Rome.
« Mon mariage m’a perdu, l’Autriche était devenue ma famille, j’ai posé le pied sur un abîme recouvert de fleurs. »1847
NAPOLÉON Ier (1769-1821). Correspondance de Napoléon Ier, publiée par ordre de l’empereur Napoléon III (1858)
En 1810, François Ier, empereur d’Autriche, lui a donné sa fille pour sceller la paix, au lendemain de ses défaites. Trois ans après, conseillé par Metternich, il se joindra aux alliés de l’Europe contre son gendre : sixième et dernière coalition, qui amène la chute de l’Empire (…)
Notre portrait de Napoléon en citations :
- Napoléon face au destin : « Les hommes de génie sont des météores… »
- Napoléon et ses soldats : « Vous n’avez ni souliers, ni habits, ni chemises… »
- Napoléon et son fils, l’Aiglon : « Je me donne des ancêtres. »
- Napoléon et la religion : « Si je gouvernais le peuple juif, je rétablirais le temple de Salomon. »
- Napoléon cet inconnu : « Quand j’ai besoin de quelqu’un… »
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