2. Napoléon et ses soldats.
Sur ce terrain, tout est clair. Sa passion de la guerre, il la communique aux soldats comme aux maréchaux. Il a l’art de parler aux hommes, de galvaniser les énergies. C’est aussi un chef qui paie de sa personne, profitant du contexte guerrier, hérité de la Révolution.
« Vous n’avez ni souliers, ni habits, ni chemises, presque pas de pain, et nos magasins sont vides ; ceux de l’ennemi regorgent de tout. C’est à vous de les conquérir. Vous le voulez, vous le pouvez, partons ! »1656
(1769-1821), à ses soldats, Toulon, 29 mars 1796
L’Europe et la Révolution française, Cinquième partie, Bonaparte et le Directoire (1903), Albert Sorel.
Nommé général en chef de l’armée d’Italie par le Directoire, il tient ce langage le jour de son arrivée devant Toulon. Une invitation au pillage, de tradition à l’époque. Début de la (première) campagne d’Italie et d’une irrésistible ascension.
À 26 ans, il a déjà l’art de galvaniser ses troupes, vagabonds en guenilles dont il fera des soldats victorieux face à des armées supérieures en nombre, avec les mots dictés par les circonstances : « Votre patience à supporter toutes les privations, votre bravoure à affronter tous les dangers excitent l’admiration de la France ; elle a les yeux tournés sur vos misères… »
« Soldats, vous avez en quinze jours remporté six victoires, pris vingt et un drapeaux, cinquante-cinq pièces de canon, plusieurs places fortes, conquis la partie la plus riche du Piémont ; vous avez fait quinze mille prisonniers, tué ou blessé plus de dix mille hommes. Mais soldats vous n’avez rien fait puisque ni Turin, ni Milan ne sont à vous. »1657
Napoléon BONAPARTE (1769-1821), à l’armée d’Italie, Proclamation de Cherasco, 26 avril 1796
Dans cette campagne d’Italie, le jeune général impose son autorité sur l’armée française, 38 000 hommes mal vêtus, mal nourris, qui vont voler de victoire en victoire. Bonaparte en Italie, c’est le prélude de l’épopée napoléonienne. Et toujours cet art oratoire, ces mots forts et vrais qui galvanisent ses hommes, parce qu’ils se sentent compris de ce chef qui partage leur sort : « Vous avez gagné des batailles sans canons, passé des rivières sans ponts, fait des marches forcées sans souliers, bivouaqué sans eau-de-vie et souvent sans pain. »
« Soldats, songez que du haut de ces pyramides, quarante siècles vous contemplent. »1671
Napoléon BONAPARTE (1769-1821), Proclamation supposée, avant la bataille des Pyramides du 21 juillet 1798
Débarquement à Alexandrie, 1er juillet : la ville tombe aux mains des Français le 2. Cette expédition est un rêve oriental qui se réalise. Le corps expéditionnaire a échappé par miracle à la flotte britannique commandée par Nelson. Pour en finir au plus vite, Bonaparte prend le chemin le plus court, d’Alexandrie au Caire : le désert, trois semaines de chaleur qui pouvaient être fatales aux soldats non préparés. Et près des pyramides de Gizeh, la bataille contre les mamelouks est réglée en deux heures !
Cette fois, la proclamation est un « faux », pour servir la légende, mais un faux authentique. Napoléon (devenu empereur) lit cette formule dans Une histoire de Bonaparte (anonyme, publiée en 1803), elle lui plaît et il la fait sienne.
« Soldats, je suis content de vous. »1809
NAPOLÉON Ier (1769-1821), Proclamation d’Austerlitz, 2 décembre 1805
Au soir de la victoire, le général sait comme toujours trouver les mots pour ses hommes. Ici, le plus simple est le plus vrai. Et pour finir : « Il vous suffira de dire : j’étais à la bataille d’Austerlitz, pour qu’on vous réponde : voilà un brave ! »
Cette « bataille des Trois Empereurs » opposa les 65 000 hommes de Napoléon aux 90 000 hommes d’Alexandre Ier (Russie) et de François II (Saint Empire romain germanique). Le dieu de la guerre et de la fortune est véritablement avec Napoléon : le brouillard matinal cache ses mouvements à l’ennemi, et le soleil d’Austerlitz brille sur une suite de manœuvres tactiques hardies, et réussies – un classique, encore enseigné dans les écoles de guerre ! Le bronze des 180 canons ennemis sera fondu pour édifier la colonne Vendôme (inspirée de la colonne de Trajan, à Rome).
« Officiers, sous-officiers et soldats de la vieille garde, je vous fais mes adieux […] Depuis vingt ans, je suis content de vous. Je vous ai toujours trouvés sur le chemin de l’honneur. Je ne puis vous embrasser tous, mais j’embrasserai votre général. »1913
NAPOLÉON Ier (1769-1821), Adieux aux soldats de la Vieille Garde, dans la cour du palais de Fontainebleau, 20 avril 1814
L’empereur vaincu et déchu embrasse le général Petit, puis le drapeau avec l’aigle impérial. À côté de la Jeune Garde et de la Moyenne Garde, les vétérans de la Vieille Garde, toujours fidèles à Napoléon, restent comme les plus valeureux soldats de notre histoire. Retraités ou réformés, on les appelle « les vieux de la Vieille ». C’est l’origine de cette expression populaire. Le 28 avril, Napoléon s’embarque à Fréjus sur une frégate anglaise, pour l’île d’Elbe. Son premier exil.
Notre portrait de Napoléon en citations :
- Napoléon face au destin : « Les hommes de génie sont des météores… »
- Napoléon et les femmes : « …nous avons tout gâté en traitant les femmes trop bien »
- Napoléon et son fils, l’Aiglon : « Je me donne des ancêtres. »
- Napoléon et la religion : « Si je gouvernais le peuple juif, je rétablirais le temple de Salomon. »
- Napoléon cet inconnu : « Quand j’ai besoin de quelqu’un… »
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