IV. Siècle des Lumières (1er septembre 1715, mort de Louis XIV - 5 mai 1789, ouverture des États généraux).
Cette époque nous parle de nous, parce que nous en venons, alors que le Siècle de Louis XIV, certes admirable, semble si lointain !
Les philosophes sont nos frères et nos maîtres, des amis avec lesquels on aimerait dialoguer, à commencer par Voltaire, quatrième auteur le plus cité dans l’Histoire en citations (après Napoléon, de Gaulle, Hugo) et premier « intellectuel engagé ».
La Chronique du temps n’est certes pas héroïque comme la Révolution ou l’Empire qui vont suivre, mais son humour est sans égal dans l’histoire. Le siècle des Lumières peut sourire de tout et se moque aussi bien de la guerre perdue que de la mort des grands. On ne fait pas un drame des faits divers les plus dramatiques et plus rien n’est sacré, surtout pas la religion !
Enfin, la langue française n’a jamais été si bien écrite, parlée en Europe et « lumineuse ».
Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.
« Notre siècle, j’en conviens encore avec Votre Majesté, ne vaut pas le siècle de Louis XIV pour le génie et pour le goût ; mais il me semble qu’il l’emporte pour les lumières, pour l’horreur de la superstition et du fanatisme. »950
(1717-1783), Lettre au roi de Prusse, 14 février 1774
Correspondance avec Frédéric le Grand (1854).
Le plus célèbre encyclopédiste correspond avec l’un des « despotes éclairés » du siècle, Frédéric le Grand. Taine écrit, dans Les Origines de la France contemporaine : « Aux approches de 1789, il est admis que l’on vit « dans le siècle des lumières », dans « l’âge de raison », qu’auparavant le genre humain était dans l’enfance, qu’aujourd’hui il est devenu « majeur ». »
Prologue
Le roi, le gouvernement et la cour
« L’ordre public tout entier émane de moi et les droits et les intérêts de la nation […] sont nécessairement unis avec les miens et ne reposent qu’entre mes mains. »951
LOUIS XV (1710-1774), Déclaration solennelle au Parlement de Paris, 3 mars 1766. Histoire des Français (1821-1844), Simonde de Sismondi
Séance dite de la flagellation : c’est encore le temps de la monarchie absolue et de droit divin. Louis XV se montre très jaloux de son autorité, mais par saccades, face à la révolte parlementaire chronique sous son règne (…)
« Les rois sont avec leurs ministres comme les cocus avec leurs femmes : ils ne savent jamais ce qui se passe. »952
VOLTAIRE (1694-1778), Le Sottisier (posthume, 1880)
Louis XV s’intéressa sans doute tardivement à son métier de roi (…) Louis XVI, très consciencieux, fut vite dépassé par la situation et la complexité des problèmes. Mais les ministres eux-mêmes sont fort peu au courant de l’état du royaume, faute de bonnes enquêtes et statistiques pour éclairer leur politique.
« Il fallait tenir le pot de chambre aux ministres tant qu’ils étaient en puissance, et le leur renverser sur la tête sitôt qu’on s’apercevait que le pied commençait à leur glisser. »953
Maréchal de VILLEROI (1644-1730). Mémoires de Saint-Simon (posthume, 1879)
« Grand routier de cour », ami d’enfance de Louis XIV, médiocre militaire sous son règne quoique maréchal de France et gouverneur fort critiqué de Louis XV enfant. Les ministres se succèdent au rythme de réformes abandonnées presque aussitôt qu’entreprises et de disgrâces succédant aux faveurs royales.
« Amitié de cour, foi de renards, société de loups. »954
CHAMFORT (1740-1794), Pensées, maximes et anecdotes (posthume, 1803)
La cour reste un microcosme où les places sont chères et les appelés toujours en plus grand nombre que les élus. Mais elle cesse d’être l’appareil d’État comme sous Louis XIV, pour devenir l’instrument des intérêts particuliers de la haute noblesse, lieu de toutes les intrigues, cabales et corruptions sous Louis XV. Pire encore sous Louis XVI (…)
« Quand dans un royaume il y a plus d’avantage à faire sa cour qu’à faire son devoir, tout est perdu. »955
MONTESQUIEU (1689-1755), Pensées diverses (posthume)
Faveurs, pensions, dérogations, exceptions, exemptions et autres privilèges sont distribués pour soi-disant désarmer les oppositions. Ils ne servent qu’à paralyser l’administration et à exaspérer les ambitions et les jalousies (…)
« Un État chancelle quand on en ménage les mécontents. Il touche à sa ruine quand on les élève aux premières dignités. »956
DIDEROT (1713-1784), Principes de politique des souverains (1774)
Paradoxe majeur de ce siècle de tous les paradoxes : les privilégiés luttent contre le régime, s’opposant à toute réforme, et c’est sur eux que le pouvoir s’appuie.
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