François Ier, le roi Chevalier, personnage solaire, séducteur et séduisant, incarne idéalement la Renaissance aux yeux de l’Europe. Il va régner 32 ans, aussi à l’aise dans la guerre et l’amour que sur le trône de France.
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« Nutrisco et exstinguo. »« Je le nourris et je l’éteins. »436
(1494-1547), devise accompagnant la salamandre sur ses armes
Encyclopédie théologique (1863), abbé Jean Jacques Bourasse.
Allusion à l’ancienne croyance selon laquelle cet animal est capable de vivre dans le feu et même de l’éteindre.
Depuis un siècle, les rois de France ont des emblèmes personnels souvent associés à un animal : le lion pour Charles VI le Fou, le cerf ailé pour Charles VII et Charles VIII, le porc-épic pour Louis XII. La salamandre se marie bien à cette Renaissance où la frontière est floue entre nature et surnature, chimie et alchimie, astronomie et astrologie. On croit l’air et l’onde peuplés de démons – même le très savant Ambroise Paré !
« Car tel est notre plaisir. »437
FRANÇOIS Ier (1494-1547). L’Art de vérifier les dates (1818), David Bailie Warden
Après sept jours de règne, cette formule royale dit assez la volonté de pouvoir du nouveau roi. Celui que sa mère Louise de Savoie appelle son « César triomphant » et les Italiens « Sa Majesté » (à l’égal de l’empereur) ne convoquera jamais les États généraux, en 32 années de règne. Il est assez fort pour s’en passer. Il crée le Conseil secret (dit aussi Conseil étroit, ou Conseil des affaires) : « Ce conseil est nouveau et fut introduit par François Ier qui avait en haine les conseils trop nombreux et qui fut le premier à prendre de son chef les grandes décisions », écrira l’ambassadeur de Venise Michel Suriano en 1561. La cour elle-même, brillante, peuplée d’artistes, de poètes, de nobles venus de leurs terres de province, d’étrangers accourus (souvent d’Italie) et de dames aussi belles que fastueuses, devient un instrument du règne de ce personnage séduisant et léger, aussi galant avec les femmes que brave au milieu des soldats.
« Avant moi [François Ier], tout était grossier, pauvre, ignorant, gaulois. »387
FÉNELON (1651-1715), Dialogues des morts (1692-1696)
Cet auteur de la fin du XVIIe siècle met en scène et oppose Louis XII et François Ier. Baptisé par Brantôme « Père et vrai restaurateur des arts et des lettres », François Ier incarne la Renaissance au cœur du beau XVIe qui succède au Moyen Âge.
Ce ne sont plus seulement les couvents et les universités qui diffusent la culture ; les cours donnent l’exemple, pratiquant le mécénat, lançant les modes et cultivant le raffinement. « François Ier, découragé des guerres lointaines, veuf de son rêve d’Italie, se fait une Italie française » (Michelet). Il invite Léonard de Vinci et sa Joconde (achetée 4 000 florins d’or, soit 15 kg), puis d’autres artistes prestigieux, Cellini, le Rosso, le Primatice. Favorable à l’esprit nouveau et bien que peu instruit (il ne sait pas le latin), il protège les savants et les écrivains, secondé par sa sœur Marguerite d’Angoulême (future reine au royaume de Navarre), l’une des femmes les plus cultivées du siècle.
« Il est jeune et à la fleur de l’âge, libéral, magnanime, expérimenté et habile à la guerre. Il a bonne paix avec tous ses voisins, en sorte qu’il pourra employer au service de Dieu et de la foi sa personne et tout son avoir, sans que nul le détourne et que rien l’empêche. »445
FRANÇOIS Ier (1494-1547), autoportrait et déclaration de candidature, en 1519. François Ier (1953), duc de Lévis-Mirepoix
Le roi brigue la couronne impériale, à la mort de Maximilien (12 janvier 1519). L’adversaire est de taille : Charles, prince bourguignon (arrière-petit-fils de Charles le Téméraire), devenu prince des Pays-Bas en 1516, puis roi d’Espagne sous le nom de Charles Ier, roi de Sicile sous le nom de Charles IV, héritant par sa mère des possessions espagnoles de l’Amérique latine (mines d’or et d’argent inépuisables) et par son père des terres héréditaires des Habsbourg !
Charles l’emporte assez naturellement dans cette compétition par ailleurs « truquée » – les sept princes-électeurs allemands sont plus sensibles aux florins et ducats allemands et espagnols qu’aux écus français. Une fois élu, il devient empereur du Saint Empire romain germanique, le 28 juin 1519 à la Diète de Francfort. Il sera Charles Quint pour l’histoire. Et l’histoire de France en est changée. Le nouvel ennemi héréditaire n’est plus l’Anglais, mais le Habsbourg, trop puissant, rêvant de dominer toute l’Italie, et voulant récupérer la Bourgogne de ses ancêtres, « tyranniquement et indûment détenue et occupée par le roi de France ». Face à Charles Quint, nos guerres vont devenir plus défensives qu’offensives.
« Souvent femme varie
Bien fol est qui s’y fie. »446FRANÇOIS Ier (1494-1547). Vie des Dames galantes, extraites des Mémoires de Brantôme
Brantôme, abbé laïc et chroniqueur du xvie siècle, nous donne à voir le roi chevalier écrivant ces mots, sur le côté d’une fenêtre au château de Chambord. Le jeune et beau François délaisse son épouse Claude de France, boiteuse et laide, mais très populaire, lui faisant quand même deux fils. Il va multiplier les aventures. Michelet donne ce portrait du roi dans son Histoire de France : « Les femmes, la guerre – la guerre pour plaire aux femmes. Il procède d’elles entièrement. Les femmes le firent tout ce qu’il fut, et le défirent aussi. » Remarque pertinente, si l’on se rappelle l’importance de sa mère Louise de Savoie et de sa sœur Marguerite d’Angoulême, ou de favorites influentes comme la duchesse d’Étampes, et les multiples maîtresses qui, à la fin de sa vie, lui donnèrent la vérole – le fameux « abcès » dont il mourra à 52 ans.
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