Petite histoire de la justice : 4e épisode. Révolution
En cinq ans, la France passe de l’Ancien Régime millénaire - celui des privilèges, des inégalités, de l’arbitraire - à un monde nouveau. Liberté, égalité, fraternité, ces trois principes n’ont de valeur réelle qu’avec l’institution d’une justice en bonne et due forme.
Il faudra encore quelques révolutions, quelques républiques et des milliers de morts pour que justice soit faite.
« La même autorité divine qui ordonne aux rois d’être justes défend aux peuples d’être esclaves. »1262
(1758-1794), lors de sa dernière plaidoirie à Arras (Affaire Dupond), début de l’année 1789
Robespierre, politique et mystique (1987), Henri Guillemin.
À la veille de la Révolution, Maximilien (de) Robespierre, futur révolutionnaire, bientôt « maître absolu de la France » (dira Necker), est avocat en province, mondain, poudré, tiré à quatre épingles, épris de notoriété et de respectabilité - tout le contraire d’un Marat ou d’un Mirabeau !
Sous ces apparences lisses se cache un tout autre personnage : « Le Ciel qui me donna une âme passionnée pour la liberté m’appelle peut-être à tracer de mon sang la route qui doit conduire mon pays au bonheur. J’accepte avec transport cette douce et glorieuse destinée. »
Il s’est imprégné des philosophes, notamment Rousseau visité à Ermenonville, peu de temps avant sa mort, et le Contrat social va déterminer son engagement politique. Il est et restera l’homme d’une grande idée : la nation souveraine.
Quant à la justice, il va pousser très loin l’idée qu’il s’en fait. Cet extrémisme conduira logiquement à la Terreur.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« Quand tous les hommes seront libres, ils seront égaux ; quand ils seront égaux, ils seront justes. »1277
SAINT-JUST
Très jeune théoricien de la Révolution, il décrit un cercle idéalement vertueux, conforme à l’idéologie de Robespierre. Liberté, égalité, justice… Les faits démentent ce genre d’optimisme.
« C’est, Messieurs, une grande erreur de croire […] que le salut public puisse commander une injustice. Cette maxime a toujours été le prétexte de toutes les tyrannies. »1404
CONDORCET
Encyclopédiste, mathématicien et philosophe en renom, élu député à la Législative, réélu à la Convention, il finira Girondin, se suicidant pour échapper à la guillotine.
« Quand la justice a parlé, l’humanité doit avoir son tour. »1472
VERGNIAUD, janvier 1793
Girondin (du département de la Gironde), ex avocat, il cherche à sauver la tête de Louis XVI, déclaré coupable à la quasi-unanimité (conspiration contre la liberté de la nation et attentats contre la sûreté générale de l’État).
« Peuple, souviens-toi que si dans la République la justice ne règne pas avec un empire absolu, et si ce mot ne signifie pas l’amour de l’égalité et de la patrie, la liberté n’est qu’un vain nom ! »1600
ROBESPIERRE, Discours du 26 juillet 1794 (8 thermidor an II), veille de sa chute
La Révolution ne finira jamais, si un théoricien d’une telle rigueur garde le pouvoir absolu de mettre ses principes en pratique. D’où le coup d’État de Thermidor.
« La justice est à l’ordre du jour. »1608
Cri de ralliement des vainqueurs, au lendemain du 9 Thermidor (1794)
Réponse au slogan : « La Terreur est à l’ordre du jour » (décret du 5 septembre 1793). Après la période girondine, puis montagnarde, la Convention thermidorienne clôt Révolution.
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