L’engagement politique mobilise les intellectuels, majoritairement à gauche, mais l’humour relève du second degré. Le Front populaire fait diversion et Claudel fait erreur. Quant à Sartre, il voit juste, mais (sou)rit rarement. Ainsi va l’Histoire en citations.
« On a ri longtemps de ce mélodrame où l’auteur faisait dire à des soldats de Bouvines : « Nous autres, chevaliers de la guerre de Cent Ans ». C’est fort bien fait, mais il faut donc rire de nous-mêmes : nos jeunes gens s’intitulaient « génération de l’entre-deux-guerres » quatre ans avant l’accord de Munich. »2668
Munich, ce sera octobre 1938.
Quatre ans plus tôt, l’Europe assiste à la montée au pouvoir d’Adolf Hitler. Autrichien naturalisé allemand, porté au pouvoir par la crise économique des années 1930 qui jette les millions d’ouvriers chômeurs et de petits rentiers ruinés vers les partis extrêmes, il manipule l’armée et les puissances financières, devenant chancelier du Reich le 30 janvier 1933, puis Führer, maître absolu, dictateur en 1934. Plébiscité, il promet à son pays de le libérer du « Diktat » de Versailles (traite de paix notoirement maladroit de 1919), en échange de gros sacrifices : « Des canons plutôt que du beurre. » En vertu de quoi il annonçait : « Mon Empire vivra mille ans. » Mais le pire n’est jamais sûr et la mégalomanie impériale fut souvent condamnée à brève échéance, dans l’Histoire du monde.
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« De toutes les « inventions » surréalistes, la tentation du communisme est bien sûr la plus démoniaque. »2647
Roger VAILLAND, Le Surréalisme contre la révolution (1948)
Le Manifeste du surréalisme d’André Breton (1924) lance le mouvement. Nombre d’artistes sont séduits par le communisme, surtout après le Second Manifeste du surréalisme (1930). La revue du mouvement, Révolution surréaliste, devient Le Surréalisme au service de la Révolution. Vailland, auteur proche du surréalisme par sa révolte, reste politiquement hostile au communisme.
« Je suis communiste parce que cela me dispense de réfléchir. »2643
Frédéric JOLIOT-CURIE, La Politique en citations : de Babylone à Michel Serres (2006), Sylvère Christophe
Raison paradoxale de la part de ce grand scientifique (prix Nobel de chimie avec sa femme, en 1935), membre actif du Parti communiste, à partir de 1942.
« Ce qu’il nous faut, ce sont des électeurs. Mais des militants, point du tout. Il n’y a rien de plus em… que les militants. »2648
Marquis de MOUSTIER. La France et les Français en 1938-1939 (1978), René Rémond, Janine Bourdin
Sénateur du Doubs, libéral. La Fédération républicaine, partagée entre ses divers courants de droite vers 1925, reste un parti de notables et de cadres qui se méfie des militants et refuse d’enrégimenter les électeurs. Elle se différencie de l’Action française, de Maurras, à la fois antirépublicaine et militante.
« Les banques, je les ferme, les banquiers, je les enferme. »2677
Vincent AURIOL, ministre des Finances, Front Populaire, 1936
Avocat et expert financier de la SFIO, avant de devenir caution bourgeoise sous la prochaine République, Auriol apparaît à nombre de Français comme un parangon de la révolution, en 1936. Le Front Populaire va tenir ses promesses, avec les premières lois sociales dignes de ce nom, au prix de grandes grèves, mais dans la joie et sans violence - fait remarquable.
« Croquemitaine se dégonflera. »2705
Paul CLAUDEL, Le Figaro, 19 août 1939
Claudel fait naturellement allusion à Hitler. Le dramaturge qui fut également diplomate, de 1893 à 1936, se trompe. Hitler envahit la Pologne, le 1er septembre. Cela vaut déclaration de guerre.
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