« Si j’étais accusé d’avoir volé les tours de Notre-Dame, je commencerais par m’enfuir. »843
Appréciation sur la justice attribuée à divers hauts magistrats à la fin du XVIIe siècle
Dictionnaire de français Larousse, au mot « vol ».
La monarchie absolue va de pair avec un certain arbitraire. Les intendants ne peuvent veiller à tout et partout. Le seigneur demeure puissant sur ses terres, tandis que le noble de robe ou le bourgeois récent acquéreur de la seigneurie n’est pas moins âpre !
Les magistrats sont trop peu nombreux (8 648 juges pour 17 millions d’habitants en 1665), parfois complices des nobles et alliés à eux. L’autorité royale n’intervient qu’en cas d’oppression flagrante. « La justice est une si belle chose qu’on ne saurait trop cher l’acheter », écrit Lesage dans Crispin rival de son maître (1707).
« Selon que vous serez puissant ou misérable
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. »842Jean de LA FONTAINE (1621-1695), Fables, Les Animaux malades de la peste (1678)
La Fontaine se sert « d’animaux pour instruire les hommes », mais aussi pour faire une satire de son époque, comme Molière et La Bruyère.
L’arbitraire des cours de justice de l’Ancien Régime va apparaître de plus en plus choquant au Siècle des Lumières. Critiqué par tous les philosophes, ce sera l’une des justes causes de la Révolution à venir.
« Il n’y a point de liberté si la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’exécutrice. »1011
MONTESQUIEU (1689-1755), L’Esprit des Lois (1748)
C’est le fameux principe de la séparation des pouvoirs : « Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps […] exerçait ces trois pouvoirs : celui de faire les lois, celui d’exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers. »
La constitution anglaise, monarchique en apparence, républicaine en réalité, présente un bon équilibre des trois pouvoirs : elle séduit le philosophe qui l’a vu fonctionner sur place. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (article 16) consacrera cette séparation des pouvoirs au début de la Révolution, en 1789.
« Il vaut mieux hasarder de sauver un coupable que de condamner un innocent. »1023
VOLTAIRE (1694-1778), Zadig ou la destinée (1747)
Ainsi parle Zadig, « celui qui dit la vérité », alias Voltaire
Dans son Dictionnaire philosophique et en divers essais, il se bat pour une réforme de la justice, dénonce les juges qui achètent leurs charges et n’offrent pas les garanties d’intelligence, de compétence et d’impartialité, se contentant de présomptions et de convictions personnelles. Il réclame que tout jugement soit accompagné de motifs et que toute peine soit proportionnelle au délit. En cas de crime, l’erreur judiciaire est irréversible, au temps de la peine de mort.
Quand la Révolution va mettre au Panthéon le grand homme (seul à partager cet honneur avec Rousseau), sur son sarcophage qui traverse Paris le 11 juillet 1791, on lira : « Il défendit Calas, Sirven, La Barre, Montbailli. » Plus que le philosophe réformateur ou le théoricien spéculateur, la Révolution rend hommage à l’infatigable combattant pour que justice soit faite.
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