En France, avec autant de convictions affirmées au plan politique et social, mais avec une liberté d’expression et une diversité de ton inégalées. Les mouvements de gauche l’emportent, mais la droite réagit parfois violemment.
« Il s’agit, après avoir toujours plié, tout subi, tout encaissé en silence, d’oser enfin se redresser. Se tenir debout. Prendre la parole à son tour. Se sentir des hommes pendant quelques jours… »2678
(1909-1943), La Révolution prolétarienne, 10 juin 1936
Histoire de la Troisième République, volume VI (1963), Jacques Chastenet.
Agrégée de philo, ouvrière chez Renault, pour être au contact du réel, elle écrit sous le pseudo de Simone Galois son article sur le Front populaire. Passionnée de justice, toujours du côté des faibles, des vaincus et des opprimés, la jeune femme vibre à cette aventure et participe à ces « grèves de la joie » : « Joie de vivre parmi ces machines muettes, au rythme de la vie humaine… Joie de pénétrer dans l’usine avec l’autorisation souriante d’un ouvrier. Joie de trouver tant de sourires, tant de paroles d’accueil fraternel. Joie de parcourir ces ateliers où on était rivé sur sa machine. »
« Si le 6 [février 1934] fut un mauvais complot, ce fut une instinctive et magnifique révolte, ce fut une nuit de sacrifice, qui reste dans notre souvenir avec son odeur, son vent froid, ses pâles figures courantes, ses groupes humains au bord des trottoirs, son espérance invincible d’une révolution nationale. »2664
Robert BRASILLACH (1909-1945), Notre avant-guerre (1941)
La plupart des révoltes citées et actées sont de gauche, la droite étant plutôt pour l’ordre établi. Il y a des exceptions. Dans l’entre-deux-guerres de la IIIe République, il y eut cette « Nuit debout ». Brasillach, jeune intellectuel séduit par le fascisme et la pensée de Maurras (extrême droite), témoigne pour regretter « la révolution manquée du 6 février ». Une menace contre les institutions républicaines. Le 9, contre-manifestations de gauche : 11 morts, 300 blessés. Un front antifasciste se crée entre communistes et socialistes, annonçant le Front populaire.
« En mai dernier, on a pris la parole comme on a pris la Bastille en 1789. »3080
Michel de CERTEAU (1925-1986), « Pour une nouvelle culture : prendre la parole », Études, juin-juillet (1968)
Mai 68 a duré deux mois. Le phénomène a marqué plus d’une génération et changé la société. En quoi, on s’interroge encore… Une chose est sûre : tout le monde a eu droit à l’expression, presque tout le monde en a profité. Le meilleur a côtoyé le pire, éclairs de génie poétique et discours soporifiques. Foire aux idées, fraternité universelle, démocratie directe, société sans classe, spectacle permanent, happening.
« Si les jeunes ne croient à rien, c’est qu’on ne leur offre rien à quoi ils puissent croire. Quand on n’est pas digne d’avoir des opposants, on a des révoltés : ce sont les enfants du mensonge. »3136
Jean-François REVEL (1924-2006), L’Express, début mars 1972
Une partie de la jeunesse n’a pas fini sa révolte des « Années de rêve » et le début des années 1970 va être agité de mouvements violents : on parle des « Années de poudre ». La révolte se durcit, sur fond de crise économique (premier choc pétrolier, inflation, chômage). GP (Gauche prolétarienne), maoïstes, lycéens, casseurs : cocktails explosifs, d’où manifs, sittings, commandos…
Dans Le Figaro, le politologue Raymond Aron dit comprendre le gauchisme qui ébranle la bonne conscience des privilégiés. Le journal publie un sondage de la Sofres : 53 % des jeunes éprouvent de la sympathie pour ceux qui ont « choisi de contester la société actuelle », 69 % estiment qu’on va « vers des crises profondes ».
« Indignez-vous ! »3443
Stéphane Hessel (1917-2013), titre de son essai (Indigène éditions, 2010)
Parole d’un jeune homme en colère de 92 ans. Ce livre de 32 pages, publié par un petit éditeur de Montpellier, traduit en 34 langues, se vendra à 4 millions d’exemplaires.
Sorti le jour où la réforme des retraites est votée, il coïncide avec une vague de fond nourrie du mécontentement des Français. Edgar Morin diagnostique le « réveil public d’un peuple jusqu’à présent très passif », avec un engagement des citoyens hors des partis politiques. Le mouvement des Indignés, soutenu par les réseaux sociaux sur Internet et associé au Printemps arabe, va essaimer dans le monde et manifester un peu partout en 2011 : plus de 70 pays, Espagne en tête avec ses Indignados contre la crise, jusqu’aux États-Unis (près de Wall Street, temple du capitalisme). La France ne suit pas vraiment. Est-ce la répression policière qui en dissuade, notre protection sociale qui amortit les effets de la crise, ou la perspective des prochaines élections qui mobilise déjà l’opinion ?
À ce rythme - 4 citations par jour - les 10 Chroniques de l’Histoire en citations sont à vous dans trois ans. Encore trois ans et vous aurez aussi le Dictionnaire. Mais que de temps perdu !
Faites un tour dans la Boutique, feuilletez les 20 premières pages de chaque volume et voyez si ça vaut le coût (4 € le volume).
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.