2. Saint-Barthélemy à Paris. La nuit du massacre : déchainement de violences encouragé par le roi (et sa mère), relayé par les « forces de l’ordre » et par le peuple, dans un engrenage qu’on retrouvera aux pires heures de la Révolution française (sous la Terreur) et de la Commune de Paris (1871).
« Tuez-les, mais tuez-les tous, pour qu’il n’en reste pas un pour me le reprocher. »523
(1550-1574), 23 août 1572
Nouvelle Histoire de France (1922), Albert Malet.
« Tous ». Ils sont tous rassemblés, les protestants venus fêter le mariage de leur prince ! Parmi eux, l’amiral de Coligny a échappé la veille à un attentat, vraisemblablement organisé par les Guise. Le célèbre médecin des rois, Ambroise Paré, assure que ce coup d’arquebuse au bras sera sans conséquence.
Le roi s’est rendu au chevet de son conseiller : l’Amiral l’a conjuré de se « défier de sa mère ».
Rentré au Louvre, il répète pourtant ses propos à Catherine de Médicis, qui se concerte avec les Guise : le massacre des huguenots est décidé. Les protestants se répandent déjà dans les rues, réclamant justice au nom de Coligny. Catherine persuade son fils. Et à contrecœur, le jeune roi donne son accord : « Tuez-les, mais tuez-les tous… »
« Si c’était un homme du moins ! C’est un goujat ! »524
COLIGNY (1519-1572), dans la nuit du 23 au 24 août 1572
L’Amiral de France toise l’homme qui va le frapper, un certain Bême, sbire des Guise, même pas un seigneur digne de lui ! Cette exclamation de mépris peut être considérée comme son « mot de la fin ». Le second attentat va lui être fatal.
Ce grand militaire a servi tous les rois de France, depuis François Ier, participé à toutes les guerres, quitté plusieurs fois la cour pour fuir ses intrigues, toujours rappelé pour ses qualités de courage, de diplomatie et même de tolérance, quand il se convertit à la religion réformée.
Sa fin à 53 ans est des plus humiliantes : surpris dans son lit, achevé à coups de dague, son corps jeté par la fenêtre, éventré, émasculé, décapité, puis porté au gibet de Montfaucon, exhibé, pendu par les pieds, exposé à d’autres sévices, pour finir à nouveau pendu place de Grève.
« Le corps d’un ennemi mort sent toujours bon. »525
CHARLES IX (1550-1574), le 24 août, jour de la Saint-Barthélemy (du nom du saint, fêté sur le calendrier)
Les guerres de Religion, série de conjurations, abjurations, assassinats et autres massacres, l’une des pages d’Histoire les plus riches en « mots ».
Ce mot (de l’empereur romain Vitellius) est donc attribué à Charles IX, devant le corps de Coligny. Cet assassinat et ses suites – les milliers de morts et le sacrifice de son conseiller – hanteront les nuits du jeune roi déjà malade de tuberculose, jusqu’à sa mort prochaine.
Faible de caractère, manipulé par sa mère et ses proches (les Guise et son frère Henri, le duc d’Anjou), il semble qu’il ait donné son accord pour tuer tous les chefs… Oui, mais pas tous les protestants de Paris, de Navarre et de France !
Selon certaines sources (dont Agrippa d’Aubigné), il tirait à l’arquebuse sur les fuyards, posté à une fenêtre du Louvre, château royal. Selon d’autres historiens, il a tenté d’arrêter la tuerie qui commence dans les rues, les ruelles. De toute manière, il est trop tard ! On a fermé les portes de Paris et la capitale est profondément anti-huguenote.
La haine se déchaîne et chaque protestant passe pour un Coligny en puissance : « Tuez-les tous ! » L’ordre royal du 23 août est répété à tous les échos, tous les carrefours.
« Hélas qu’ai-je donc fait ? — Si tu n’as rien fait, cela doit te consoler : tu mourras innocent ! »526
Réplique d’un capitaine suisse au jeune Saint-Martin, nuit du 23 au 24 août 1572
L’« innocent » Saint-Martin, dit Brichanteau, est arquebusier du roi. Et le Suisse transperce le cœur du « parpaillot », la nuit de la Saint-Barthélemy. L’ordre est clair : « Tuez-les tous ! »
Ce mot terrible a déjà résonné, lors du massacre des cathares au sac de Béziers, le 22 juillet 1209. On retrouvera ce climat de guerre civile sous la Terreur révolutionnaire en 1793-1794 et la Commune de Paris de 1871.
Notre série de citations (sanglantes) sur la Saint-Barthélemy :
- Michel de L’Hospital : « Qu’y a-t-il besoin de tant de bûchers et de tortures ? »
- Charles IX : « La messe ou la mort. »
- Catherine de Médicis : « Il valait mieux que cela tombât sur eux que sur nous. »
- Michel de l’Hospital : « Périsse le souvenir de ce jour ! »
- Notre Chronique de citations sur les guerres de Religion
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