Victor Hugo se révèle comme chef de l’opposition, avec autant d’humour que de passion - deux qualités rarement réunies. La presse d’opposition se trouve aussi un caricaturiste de génie en la personne du peintre Daumier. Tandis que Louis-Napoléon poursuit son irrésistible ascension.
« Situation grave pour le cabinet. Que faire ? Comment sortir de là ? Le bon sens répond : par la porte. Le gouvernement dit : par une loi. »2207
À propos de la loi sur la presse votée le 16 juillet 1850. Cela pourrait s’appliquer aux autres lois réactionnaires qu’il fustige et qui passent, mais qui vont réveiller en lui l’homme de gauche et en faire un député d’opposition.
Le poète, qui a renoncé au théâtre, entre sur la scène politique en 1848. Il crée en juillet son journal, L’Événement, avec une devise empruntée à un de ses discours électoraux de mai : « Haine vigoureuse de l’anarchie, tendre et profond amour du peuple. » Élu par la bourgeoisie le 4 juin, favorable à la fermeture des Ateliers nationaux et partisan résolu de la répression des journées insurrectionnelles, Hugo demeure pourtant libéral. Tout en refusant le socialisme, il s’oppose au gouvernement Cavaignac et au parti de l’Ordre, qui menace la liberté de la presse et multiplie les mesures répressives.
Dans son journal, il écrit la plupart des articles, même s’il ne signe pas. Il a deux buts : promouvoir sa candidature à la présidence de la République et défendre le suffrage universel pour cette élection à venir. Au passage, il attaque le général, candidat très populaire : « M. Cavaignac n’a encore remporté de victoires que contre les talents et les libertés. De pareils Austerlitz sont toujours des Waterloo ! »
Dès le mois d’octobre, influencé par son ami Émile de Girardin, grand patron de presse, Hugo renonce à se présenter, mettant L’Événement au service du prince Louis-Napoléon qui lui apparaît comme la solution au drame du pays. Comprenant trop tard son erreur, il va combattre l’homme qu’il soutenait avec d’autant plus de passion !
Toutes les citations qui suivent
sont commentées dans nos Chroniques.
« L’an passé, ils adoraient le sabre. Les voilà maintenant qui adorent le gourdin. »2209
Victor HUGO, mots prémonitoires, datés de novembre 1849. Actes et Paroles. Avant l’exil (1875)
Hugo constate les progrès de l’autorité et l’irrésistible ascension du prince Louis-Napoléon. Le premier Bonaparte a eu sa campagne d’Italie, le second s’offre une campagne de France. La « folie impériale » redoutée par Mme Thiers se précise.
« Surtout n’ayez pas peur du peuple, il est plus conservateur que vous. »2142
Louis-Napoléon BONAPARTE, Du système électoral. Questions de mon temps : 1836 à 1856 (1865), Émile de Girardin
Paroles du principal gagnant de cette République numéro deux, élu président, bientôt plébiscité empereur. C’est fort bien vu dans la France de l’époque et, l’heure venue, il saura se présenter comme le champion du suffrage universel, conquête de la Révolution de 1848.
« Belle dame, voulez-vous accepter mon bras ?
— Votre passion est trop subite pour que je puisse y croire ! »2213Honoré DAUMIER, légende d’une célèbre caricature (1851)
Ratapoil (Louis-Napoléon Bonaparte) offre son bras à la République, pour des noces reconduites. Personne n’est dupe… sauf le peuple ! L’homme est devenu trop populaire pour être stoppé dans sa marche au pouvoir, mais la Constitution lui interdit de se représenter.
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