Péguy, Péricard. Pour mémoire, deux noms, deux exemples, parmi des centaines de milliers d’autres héros anonymes, dans cette grande boucherie humaine de la Première Guerre mondiale.
Cliquez ici pour télécharger gratuitement l’extrait sur la Première Guerre Mondiale
« Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre ! Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés ! »2588
(1873-1914), Ève (1914)
Deux derniers alexandrins d’un poème qui en compte quelque 8 000. Le poète appelle de tous ses vœux et de tous ses vers la « génération de la revanche » qui trouve écho sous la Troisième République, alors amputée de l’Alsace-Lorraine. Lieutenant, il tombe à la tête d’une compagnie d’infanterie, frappé d’une balle au front, à Villeroy, le 5 septembre, veille de la (première) bataille de la Marne.
Guillaume Apollinaire, engagé en décembre 1914, blessé de guerre en 1916, évacué, trépané, mourra en 1918, deux jours avant la fin de la guerre, ayant écrit : « Ah Dieu ! que la guerre est jolie / Avec ses chants, ses longs loisirs. »
« La mystique républicaine, c’est quand on mourait pour la République, la politique républicaine, c’est à présent qu’on en vit. »2556
Charles PÉGUY (1873-1914), Notre jeunesse (1910)
Et « l’essentiel est que […] la mystique ne soit point dévorée par la politique à laquelle elle a donné naissance ». C’est dire si Péguy, l’humaniste qui se voudra toujours engagé, a souffert de la « politique politicienne » née sous la Troisième République. Écorché vif, de plus en plus isolé, il témoignait à la fois contre le matérialisme du monde moderne, la tyrannie des intellectuels de tout parti, les manœuvres des politiques, la morale figée des bien-pensants.
« Debout les morts ! »2593
Adjudant PÉRICARD (1876-1944) du 95e RI (régiment d’infanterie), 8 avril 1915. Fait rapporté par Maurice Barrès, L’Écho de Paris du 18 novembre 1915
Dans l’attaque de la Woëvre (plaine à l’ouest de la Lorraine), les Allemands ont envahi la tranchée, les soldats français gisent à terre. De cet amas de blessés et de cadavres, soudain un homme se soulève et crie. À cet appel, les blessés se redressent et chassent l’envahisseur.
Par cette citation épique et mystique, l’adjudant de 36 ans, engagé volontaire, entre dans la légende en héros. Durant l’entre-deux-guerres, devenu père de dix enfants, c’est un « ancien combattant » qui réunit 6 000 témoignages de poilus, dans un ouvrage collectif : Verdun 1914-1918.
Joffre, qui doit rompre le front pour reprendre la guerre de mouvement en terrain libre, multiplie les attaques. Bilan des opérations, en 1915 : 250 000 morts français (autant de blessés et de prisonniers), pour des gains de terrain insignifiants : « Je les grignote » disait-il. Mais le « grignotage » mine le moral des hommes.
« Je vais chanter le bois fameux
Où chaque soir, dans l’air brumeux,
Rode le Boche venimeux
À l’œil de traître,
Où nos poilus au cœur altier
Contre ce bandit de métier
Se sont battus sans lâcher pied
Au Bois le Prêtre. »2592Lucien BOYER (1876-1942), Au Bois le Prêtre (1915), chanson
Destinée à maintenir le moral des troupes, cette chanson évoque un épisode de l’interminable guerre de tranchées. Le front s’étend de Craonne (dans l’Aisne) à l’Argonne (aux confins des Ardennes, de la Meuse et de la Marne). La France est occupée, en ses plus riches provinces, et c’est elle qui doit reconquérir sa terre perdue. Le Bois le Prêtre est, avec les Éparges, un des points de l’Argonne témoin des combats les plus acharnés, en cette année 1915. « Après la guerre nous irons / Et nous nous agenouillerons / Sur chaque croix, nous écrirons / En grosses lettres : / Ci-gît un gars plein d’avenir / Qui sans un mot, sans un soupir / Pour la France est tombé martyr / Au Bois le Prêtre. »
Vous avez aimé ces citations commentées ?
Vous allez adorer notre Histoire en citations, de la Gaule à nos jours, en numérique ou en papier.