Les années Chirac, Sarkozy et Hollande
Le refus de la guerre en Irak
Jacques Chirac prend Jean-Pierre Raffarin comme Premier ministre. Populaire au début, dans « la France d’en bas » comme dans « la France d’en haut », il se fait remarquer par ses formules surprenantes. Mais le second mandat de Jacques Chirac est rythmé par les questions internationales, qui permettent au chef de l’État de marquer les esprits : lors du sommet de la Terre de 2002, il affirme que « la maison brûle », mettant en garde contre le péril mortel que constitue le réchauffement climatique. Puis, dans une posture gaulliste, Chirac s’oppose à la guerre en Irak et se désolidarise des États-Unis.
Les commentaires sont allégés, les coupes signalées (…) Retrouvez l’intégralité dans nos Chroniques de l’Histoire en citations.
« La route est droite, mais la pente est forte. »3376
Jean-Pierre RAFFARIN (né en 1948), nouveau Premier ministre à l’Assemblée, 3 juillet 2002. La Route est droite, mais la pente est forte : un an déjà (2003), Marie-Noëlle Lienemann
Célèbre raffarinade !
Au lendemain des législatives gagnées dans la foulée de l’élection présidentielle, Jacques Chirac unifie la droite en créant un nouveau parti, l’Union pour un mouvement populaire (UMP), que Bayrou refuse de rejoindre. Les législatives de juin 2002 amorcent la rebipolarisation du paysage politique français : l’UMP obtient une majorité absolue de députés.
Chirac, président réélu par défaut, prend comme Premier ministre un giscardien, donc plutôt centriste, l’un des rares « chiraco-compatibles » : « La politique, ce n’est pas un sport, ce n’est pas une équipe contre une autre : on est tous l’équipe de France. » Malgré tout, Raffarin a le cœur à droite : « La France n’est encore, dans son chemin du paradis, qu’au purgatoire puisqu’il reste des socialistes. » (…)
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l’admettre. L’humanité souffre. Elle souffre de mal-développement, au nord comme au sud, et nous sommes indifférents. La Terre et l’humanité sont en péril et nous en sommes tous responsables. »3377
Jacques CHIRAC (1932-2019), Sommet mondial de Johannesburg, Afrique du Sud, 2 septembre 2002
Plus de 100 chefs d’État (et quelque 60 000 participants) font le bilan du Sommet de la Terre, tenu à Rio de Janeiro en 1992, et du Protocole de Kyoto (Japon) en 1997, les États signataires s’engageant à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, dioxyde de carbone en tête (…)
« Et c’est un vieux pays, la France, d’un vieux continent comme le mien, l’Europe, qui vous le dit aujourd’hui, qui a connu les guerres, l’occupation, la barbarie. Un pays qui n’oublie pas et qui sait tout ce qu’il doit aux combattants de la liberté venus d’Amérique et d’ailleurs et qui pourtant n’a jamais cessé de se tenir debout face à l’Histoire et devant les hommes. Fidèle à ses valeurs, il veut agir résolument avec tous les membres de la communauté internationale. Il croit en notre capacité à construire ensemble un monde meilleur. »3378
Dominique de VILLEPIN (né en 1953), Discours au Conseil de Sécurité à l’ONU, 14 février 2003. La Chute de Bagdad : chronique d’une guerre controversée (2003), Alain Fillion
Paradoxe de cette citation : tout le monde se rappelle la situation, beaucoup approuvent ce beau et juste discours, mais personne ne peut se rappeler une phrase aussi alambiquée. En bref, la France refuse la guerre d’Irak et se désolidarise des États-Unis. Plus précisément, pour intervenir militairement contre Saddam Hussein suspecté de développer des « armes de destruction massive », mais président d’un État souverain, il faut l’accord du Conseil de sécurité, et la France mettra son veto (…)
« La moitié du nuage d’ozone qui sévit dans la région parisienne est d’importation anglaise et allemande. »3379
Roselyne BACHELOT (née en 1946), ministre de l’Écologie et du Développement durable, Le Parisien, 20 septembre 2003
Citation nommée en 2004, pour le prix de l’humour politique, décerné annuellement par le Press Club.
Le plus « drôle », c’est que c’est vrai. Un mois après la canicule meurtrière d’août 2003, un rapport du ministère dresse le bilan : « Les durées de vie des composés impliqués dans la pollution photochimique obligent à considérer le problème sur une grande échelle de temps (plusieurs jours) et d’espace (…)
A contrario et rétrospectivement, cela démontre le mensonge d’État selon lequel le nuage radioactif de Tchernobyl s’était prétendument arrêté à la frontière en avril-mai 1986, au prétexte que l’anticyclone des Açores protégeait la France.
« Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible. »3380
Patrick LE LAY (1942-2020), PDG de TF1, juillet 2004. Philosophie et modernité (2009), Alain Finkielkraut
Déclaration plus que malheureuse, alors qu’il est interviewé pour son livre Les Dirigeants face au changement. Il énonce quelques professions de foi qui vont choquer l’opinion : « Soyons réalistes : à la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit… »
(…) Rappelons que la télévision, sous le signe de Malraux et de ses successeurs au ministère de la Culture, avait pour mission de divertir, d’instruire et d’informer.
« Quand on paye 15 euros des expertises au tarif d’une femme de ménage, on a des expertises de femme de ménage. »3381
Jean-Luc VIAUX (né en 1949), procès d’Outreau, mai-juillet 2004. Outreau et après ? : La justice bousculée par la Commission d’enquête (2006), Florence Samson
Parole d’expert, au sortir d’une audience ou il a été mis en cause pour ses expertises. Cette phrase, détachée de son contexte, exploitée par la presse, poursuivra Jean-Luc Viaux qui défendra ensuite son travail, tenant à rappeler que 4 personnes seront condamnées définitivement en juillet 2004, et 12 enfants reconnus victimes - dont ceux des condamnés. Il précisera qu’une expertise psychologique n’est pas une preuve : elle sert « a fournir une intelligibilité, pas a fabriquer une vérité judiciaire. » (Libération, 8 mars 2006). Et la cour d’appel de Rouen jugera que ni cette phrase, ni son travail lors de ce procès, n’étaient critiquables (…)
« Je décide, il exécute. »3382
Jacques CHIRAC (1932-2019) parlant de son ministre des Finances, Nicolas Sarkozy, 14 juillet 2004. Un pouvoir nommé désir (2007), Catherine Nay
(…) Pour contrer les trop visibles ambitions de Sarkozy, Chirac fixe une règle ad hoc, l’interdiction du cumul d’un portefeuille ministériel et de la présidence de l’UMP – Union pour un mouvement populaire, ex-Union pour la majorité présidentielle, créée en 2002 pour soutenir la candidature de Chirac a sa réélection. Sarkozy choisit l’UMP, le parti du président, conquis au nez des chiraquiens. Il a besoin de cette machine de guerre pour gagner la prochaine bataille présidentielle. C’est déjà une revanche sur son échec de 1995, et sur son élimination du pouvoir !
Il sera bientôt rappelé au sein du gouvernement, et le duel fratricide continuera jusqu’en 2007. Fin 2008, il reprendra la formule de Chirac, à peine modifiée : « Je décide et ils exécutent. » Cette fois, c’est l’omniprésident qui gouverne à la tête de l’État, et tous les ministres n’ont qu’a suivre.
« Un Premier ministre, on le lèche, on le lâche, on le lynche ! »3383
Alain JUPPÉ (né en 1945). La Malédiction Matignon (2006), Bruno Dive, Françoise Fressoz
Il a vécu un court état de grâce, devenu Premier ministre (1995-1997) et maire de Bordeaux. Reconnu par Chirac comme « le meilleur d’entre les hommes de droite », il se rend vite impopulaire, par le projet de réforme des retraites, le gel des salaires des fonctionnaires, la déroute des Juppettes (huit femmes débarquées du gouvernement après quelques mois d’exercice) et cette raideur de l’homme qui se dit lui-même « droit dans ses bottes. » Mais le pire est à venir. En 1998, il est mis en examen pour « abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux, et prise illégale d’intéret » (…)
« Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. »
« Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. »3384Charte de l’environnement (élaborée à l’initiative de Jacques Chirac), articles 1 et 2
Texte défendu par les ministres de l’Écologie, Roselyne Bachelot, puis Serge Lepeltier, présenté et adopté en premiere lecture par l’Assemblée et le Sénat, entériné par le Parlement réuni en Congres à Versailles, le 28 février 2005.
L’environnement entre dans la Constitution, au même niveau que les droits de l’homme et du citoyen de 1789, et les droits économiques et sociaux de 1946 (…)
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